Les conséquences fâcheuses du népotisme en Algérie (vendredi, 28 septembre 2012)

 

Par Le Matin DZ |

 

 

 

La question du pouvoir en Algérie aurait pu être réglée sans violence si la propension de certains dirigeants à ériger un pouvoir personnel avait été mise de côté.

 

De Boumediene à Bouteflika, le pétrole a servi plus à se maintenir au pouvoir qu'à construire des institutions viables.

 

En plus, la découverte du pétrole, dans la deuxième moitié des années cinquante, aurait pu faciliter la réalisation des desiderata du peuple algérien. Néanmoins, bien que la France ait retardé l’indépendance du pays de six ans, après la découverte du pétrole à Edjeleh et à Hassi Messaoud en 1956, il n’en demeure pas moins que l’action des maquis intérieurs et les efforts accomplis par la diplomatie algérienne finiront par apporter leur fruit en 1962.

 

D’une façon générale, cette source d’énergie, depuis son avènement, n’apporte pas que du bonheur au peuple algérien. Au contraire, elle est, dans le premier temps, à l’origine de la furie coloniale et, ensuite, le facteur de l’instabilité politique après l’indépendance. En tout état de cause, bien qu’on ne puisse pas affirmer que cette cupidité animait tous les dirigeants de la révolution algérienne, force est de reconnaitre qu’à l’indépendance, les dirigeants successifs n’ont utilisé cette ressource que pour renforcer leur pouvoir, et ce, sans se soucier des préoccupations du peuple algérien. Remontant jusqu’à la guerre d’Algérie, Hocine Malti, dans Histoire secrète du pétrole algérien, paru aux éditions La Découverte, décrit comment le pouvoir personnel, celui des 3 B notamment, est survenu en pleine guerre d’Algérie. "Ils ont été suivis plus tard par un quatrième B (Houari Boumediene), qui a instauré un régime dictatorial –qui prévaut jusqu’à ce jour –, avant que Chadli Bendjedid et Abdelaziz Bouteflika n’entament l’œuvre de destruction du pays", poursuit-il.

 

Tout compte fait, malgré les tiraillements internes, la fin du joug colonial est célébrée dans la plus grande hilarité. Bien que les nouveaux mîtres aient préparé, avant le cessez-le-feu, un projet les remettant à la case de départ, c’est-à-dire à un statut de sujétion, il n’en reste pas moins que le peuple a cru à un retour rapide à la normale. Mais, l’histoire a prouvé que cette domination sauvage n’est pas prête de cesser. Et pourtant, tous les ingrédients, pour réussir le pari de construire une grande nation, sont réunis. En plus de l’unité effective du peuple algérien en 1962, l’Algérie dispose aussi de grandes ressources énergétiques, notamment le pétrole et le gaz. "On ne peut que constater, plus d’un demi-siècle plus tard, que le bonheur de ce peuple lui a été volé par ses dirigeants, que le pays est devenu enfer, tandis que le sort de millions d’Algériens n’est que mal vie et souffrances, voire sang et larmes", note à juste titre Hocine Malti.

 

De toute évidence, sans que ce jugement soit entaché de la moindre animosité, le malheur du peuple algérien vient de la cupidité de ses dirigeants. En effet, bien que le peuple algérien se soit prononcé sans ambages au referendum d’autodétermination, les nouveaux dirigeants lui dénient par la suite le droit de choisir librement son destin. "Ces dirigeants despotiques se sont emparés du pouvoir par la force des armes au lendemain de l’indépendance, un pouvoir que des successeurs corrompus ne veulent toujours pas remettre, à la fin de la première décennie du XXIème siècle, entre les mains de son propriétaire légitime, le peuple, et qui ont fait des hydrocarbures leur bien personnel", affirme Hocine Malti.

 

Toutefois, bien que les Algériens tentent de s’organiser, à chaque fois, la victoire revient au régime dont la force de frappe est incommensurable. Résultat des courses : la perspective de l’instauration d’une République juste et démocratique est renvoyée aux calendes grecques. Et pourtant, à les écouter, on dirait que l’Algérie se porte à merveille. Constitué sur la base clanique, ce pouvoir décrète que sans lui, l’Algérie tomberait en panne. Or, comme l’affirme le spécialiste algérien du pétrole, "la véritable malédiction est dans le système de gouvernance instauré par ces dirigeants, qui attribue tout le pouvoir à un homme et à un quarteron de généraux. Elle est dans le mode de transmission de ce pouvoir au sein d’un seul et unique clan qui prétend être une « famille révolutionnaire ». Elle est également dans la façon sont gérés les hydrocarbures au profit de cette seule caste".

 

Immanquablement, si la manne pétrolière avait été utilisée à bon escient, au lieu d’être utilisée à affermir un système, l’Algérie aurait sûrement atteint un niveau de développement comparable à celui des grandes nations. Hélas, un demi-siècle après le recouvrement de l’indépendance, la survie du peuple algérien dépend littéralement de la vente des hydrocarbures. En tout cas, il est un secret de polichinelle que le pays évolue au rythme du marché de l’or noir. À titre d’exemple, en 1986, quand le prix du baril a atteint son plus bas niveau, les Algériens ne trouvaient rien à acheter dans les magasins.

 

Par ailleurs, après les événements d’octobre 1988, qui ont donné naissance au forceps à la démocratie, le régime s’est enfin ouvert à la compétition. Et dès les premières élections où les Algériens pouvaient s’exprimer, ces derniers ont sanctionné le régime en votant en faveur d’un parti extrémiste, le FIS en l’occurrence. Cela dit, la prise du pouvoir par celui-ci aurait plongé le pays dans une crise encore plus abyssale. Toujours est-il, en démocratie, on doit accepter le choix majoritaire, sinon ça ne servira à rien de lutter pour la démocratie si elle exclut la victoire des uns ou des autres.

 

Cela dit, la perspective de perdre le pouvoir a fait sortir les vrais décideurs de leur gond. Vingt ans après le coup d’État de janvier 1992, on peut dire que les architectes du coup de force ont pensé à leurs intérêts qu’à celui de l’Algérie. Sinon comment expliquer que l’Algérie soit gouvernée par des personnes dont la moyenne d’âge dépasse les 70 ans, alors que la majorité écrasante de la population ne dépasse pas la trentaine. En tout cas, dans les pays où le dirigeant sert l’intérêt de son pays, il ne trouve aucun inconvénient à céder la place. L’exercice des hautes responsabilités – et c’est le moins que l’on puisse dire, est harassant. Or, en Algérie, les postes clés sont occupés par des dirigeants dont l’âge avoisine les 80 ans. C’est intrigant quand même !  

 

Boubekeur Aït Benali

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