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La triste condition des paramédicaux

 

La triste condition des paramédicaux

« Les primes de risques, les primes de zone doivent être revues à la hausse. Le statut particulier n’est pas encore au point. La nouvelle grille des salaires est une catastrophe », se plaignent les paramédicaux.

 

Malgré un calme apparent, une colère sourde commençait à monter hier dans les hôpitaux algériens. Au centre hospitalo-universitaire Mustapha Pacha, à Alger, le mot d’ordre de grève lancé par le syndicat des paramédicaux occupait de nombreuses conversations. Les notes d’information adressées aux membres du syndicat attisent les commentaires les plus favorables comme les plus acerbes. Dans le service de transfusion sanguine, un infirmier technicien supérieur de la santé (TSS) dit adhérer « à 200% » à la grève. « Nos problèmes ressemblent peut-être à ceux de tous les Algériens, ce sont des soucis qui affectent grandement notre vie sociale et professionnelle. La question des salaires est la plus importante. Je ne vois aucune différence entre la nouvelle grille des salaires et l’ancienne. Nous sommes ici dans un CHU, la charge de travail est très importante. Il n’y a pas de recrutement pour cause de non ouverture de postes budgétaires », se plaint-il. Notre interlocuteur affirme que le revenu d’un technicien supérieur de la santé ayant trois années d’expérience ne saurait dépasser les 17 000 DA. Dans le service d’imagerie médicale, un quadragénaire examine de très près la note du syndicat des paramédicaux. Même s’il ne peut pas suivre le mot d’ordre de grève du fait qu’il travaille dans les urgences (service minimum oblige), le cœur, nous dit-il, y est. « Nous n’avons pas de primes de panier ni de prime de transport. Les primes de risques, les primes de zone doivent être revues à la hausse. Le statut particulier n’est pas encore au point. La nouvelle grille des salaires est une catastrophe. Les échelons n’ont pas été débloqués. J’étais classé auparavant à la catégorie 14/1, je suis aujourd’hui à la 10/1. Il n’y a pas de postes budgétaires. Pour moi, le système LMD pour les paramédicaux est intéressant, car j’ai envie d’évoluer, je pourrais même enseigner, faire passer mon expérience à d’autres générations », nous dit-il en vrac. Il se plaint également des nombreuses incohérences, disparités et autres aberrations qui sont légion dans les hôpitaux. « Il y a des membres du personnel qui travaillent sans gants. Il y a souvent des pénuries de désinfectants. Les tenues vestimentaires sont distribuées tous les 3 ou 4 ans alors qu’on devrait le faire au moins une fois par an », s’indigne-t-il. Il s’insurge également contre le « favoritisme ». « Il y a de nombreuses incohérences. L’on peut prendre deux paramédicaux qui ont la même fonction, le même diplôme, le même nombre d’années d’expérience, mais qui n’ont pas le même échelon. Il y a des mentalités qui doivent changer. Ici ce sont généralement des personnes étrangères qui bénéficient des bons de soins », affirme-t-il. Le mot d’ordre de grève exaspère certains employés. Pour une employée de l’hôpital qui travaille en tant qu’agent polyvalent, ces journées de protestation élargissent encore le fossé entre les techniciens supérieurs et les agents polyvalents. « Avec cette grève, l’on veut appliquer l’adage ‘‘diviser pour régner’’, en créant une division entre les techniciens supérieurs (TSS) et les agents polyvalents », embraye-t-elle. Elle enchaîne : « Avec quel visage je vais affronter les patients le jour de la grève ? Pourquoi sommes-nous les derniers informés ? Le planning des visites a été arrêté, les citoyens n’y sont pour rien dans cette histoire. Certains ont attendu très longtemps pour pouvoir faire une radio ou un scanner, on ne doit pas leur faire subir la grève. » Puis elle sort la fiche de paie de son sac : son salaire de base est resté figé à près de 5800 DA. En y ajoutant les primes, le salaire net atteint à peine 9580 DA mensuellement. « Dans ce métier, nous ne sommes pas à l’abri des microbes. Mais la prime de risques reste dérisoire. Ma santé vaut-elle 1500 DA ? », déplore-t-elle. Elle nous raconte comment elle a commencé sa carrière, d’abord en tant qu’infirmière puis comme agent polyvalent, voilà déjà dix ans. « Je termine la semaine avec une tension de 14,1, il est nécessaire d’améliorer les conditions de travail », lance-t-elle. Joint par téléphone, Gueddou Hanafi, représentant du syndicat des paramédicaux à Sétif, estime que « ce ne sera pas une grève, ce sera une leçon ». Infirmier diplômé d’Etat, marié, 3 enfants, 15 années d’expérience, classé au 5e échelon, M. Gueddou touche actuellement 25 400 DA. Hier, il préparait des autocollants frappés de la phrase « Paramédical en grève ». A Sétif, les paramédicaux grévistes porteront ces autocollants tout en poursuivant une journée de travail ordinaire. Une grève à la japonaise, en somme.

 

Par Amel Blidi

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