C’est donc la semaine où il obligeait ses députés à se déchirer autour d’une loi factice criminalisant le colonialisme, que le président algérien va accourir à Nice pour écouter la France parler à ses anciennes colonies africaines. Comme pour démontrer que les serments, même les plus beaux, sont faits pour être trahis. Et qu’après tout, le discours politique, comme dit Orwell, est destiné à rendre vraisemblables les mensonges, respectables les meurtres, et à donner l'apparence de la solidité à ce qui n'est que vent. On ne saura probablement jamais à quoi riment ces retrouvailles d’un autre âge où quelques dictateurs africains et deux ou trois nations décharnées papotent avec l’ancien Empire de leur condition d’anciens colonisés. Et qu’a donc à faire l’Algérie dans ce sommet France-Afrique, elle qu’on supposait affranchie de ces protocoles d’allégeance et qui, nous rebattait-on les oreilles, attendait de son ancien colonisateur qu’il se repentît de ses crimes ?Décidément, oui, la dignité algérienne, dans la bouche de nos dirigeants, a quelque chose de simple slogan de camelot. Ils n’en mesurent pas la gravité, ils se contentent de l’exhiber en tenue de soirée. Mais l’essentiel, n’est-ce-pas, est que Bouteflika soit de la fête du côté de la Promenade des Anglais, lui qui n’avait pas vu Sarkozy depuis deux ans. Méfions-nous, cependant : à trop vouloir montrer que les serments, même les plus beaux, sont faits pour être trahis, on fera de Kassamen une ballade pour vieillards gâteux. Kassaman est une promesse faite aux hommes. Dans l’Algérie d’aujourd’hui, elle devient une promesse non tenue. « nous avons juré de mourir pour que vive l´Algérie ! Témoignez ! Témoignez ! Témoignez !»
Comment espérer faire trembler par décret nos enfants sur ce chant d’orgueil quand un demi-siècle de gabegie et de corruption les pousse aujourd’hui aux portes du consulat de France et leur président à Nice, dans les bras de Sarkozy ?
M.B.