Le compte à rebours a déjà commencé. Rentrées scolaire et sociale font des échauffements avant de rejoindre le terrain. A mesure que les jours s’égrennent, les économies des ménages fondent comme neige au soleil.
Cette année encore, le Ramadan a coïncidé avec les vacances d’été et la rentrée scolaire. Des périodes réputées «budgétivores ». Sur la corde raide, les ménages suffoquent et halètent, en essayant de colmater les brèches du mieux qu’ils peuvent. «Plaie d’argent n’est pas mortelle», dit le proverbe. Mais tout de même ! Avec le poulet à 400 DA le kilo, on a vite fait de se retrouver déplumés ! Sans compter les autres denrées alimentaires dont le prix a pris l’ascenseur, comme chaque Ramadan. Mais bon, on connaît la chanson ! De son côté, l’Aïd, cette fête qui clôture ce mois sacré, n’a pas du tout l’intention de faire de la figuration. Elle débarque avec ses exigences de starlette : fringues neuves, «m’hiba» pour la fiancée, parfum pour la belle-mère sans oublier miel, amandes et sucre pour préparer les meilleurs gâteaux de la famille. On achève bien les chevaux !
SOS budgets en détresse
La météo est loin d’être clémente. Les budgets déjà grevés par une kyrielle de dépenses en relation directe avec notre tube digestif ne sont pas près de reprendre des couleurs. Anémiés, et mal en point, ils sont sous perfusion. Alerte. Le pronostic vital est engagé.
C’est déjà la rentrée !
A la rue Bab Azzoun, tabliers, cartables et fournitures scolaires envahissent les étals des camelots rappelant aux parents que la cloche de la rentrée sonnera bientôt. Un homme, la quarantaine, s’arrête, s’enquit des prix des blouses roses, s’offre un léger rictus et passe son chemin. «Je viens de laisser mes derniers biftons au marché. Un kg de viande pour la chorba et le djouaz, quelques fruits et, hop, mes poches sont à sec ! Je vais devoir emprunter pour faire face à deux autres hémorragies qui nous guettent : celles de l’Aïd et de la rentrée scolaire», se plaint-il.
Trop cher, le couffin
Ramadan, rentrée, Aïd. Le top trois de l’ennemi juré des portefeuilles a mis les budgets des foyers sur les genoux. Toutes les personnes rencontrées nous ont révélé souffrir du décalage entre leur salarie et la réalité des prix de tout ce qui a trait à la consommation en général, y compris le transport. «Même le ticket de bus a augmenté. On n’arrive plus à joindre les deux bouts. A force de serrer la ceinture, c’est l’asphyxie », s’insurge un citoyen rencontré aux abords du marché Ferhat- Boussaâd (Meissonier). Une dame, les bras chargés de sachets, qui avait suivi la conversation, renchérit : «Vous avez vu le prix du poulet et de tout le reste ? Comment voulez- vous préparer un repas correct avec un Smig à 15 000 DA !!»
Cigale ou fourmi ?
Pour ne pas se retrouver dans la mouise, certaines familles ont pris les devants en achetant fringues et articles scolaires avant les vacances. C’est le cas de ce couple, avec deux enfants scolarisés au primaire. Il nous a révélé avoir coupé la poire en deux, anticipant sur les inéluctables dépenses de septembre. «Cela fait deux ans qu’on adopte ce système en achetant fournitures scolaires et vêtements en juin. Cela nous permet de passer ce cap sans trop de casse», assure-t-il. Mais ce n’est pas facile pour tous les chefs de famille de jouer les fourmis en dégageant un budget à l’avance. Alors comment faire pour arriver au mois d’octobre sans trop de dettes ? Surtout que, chez nous, on a tendance à faire bombance durant ce mois sacré avec beaucoup de gaspillage, il faut le reconnaître. Ahmed (51 ans, fonctionnaire) n’a pas eu besoin de chercher longtemps avant de trancher : «A partir du 10e jour de Ramadan, voyant que mon compte en banque était au rouge, j’ai pris une décision. Plus de kalbellouz, de viande, de fruits et autres “skayate” sur ma meïda. J’ai expliqué aux enfants que c’était le seul moyen pour ne pas hypothéquer leur rentrée scolaire. Je crois qu’ils ont compris !» Le Ramadan, c’est le mois de toutes les envies, de toutes les dépenses, souvent démesurées. Des frais engendrant souvent des dettes qu’il faut honorer tout au long de l’année. Juste le temps de tout éponger et voilà qu’un autre Ramadan pointe le bout du nez. La vie est un éternel recommencement !
SabrinaL
SabrinaL_Lesoir@yahoo.fr