Les réfugiés subsahariens victimes d’abus en Algérie
Sans se départir de sa prudence «diplomatique» coutumière, le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’homme (Remdh), basé à Copenhague (Danemark), vient de clôturer l’année 2010 par un véritable réquisitoire dressé à l’encontre de l’Algérie.
Cette fois-ci, c’est la situation des migrants, demandeurs d’asile et autres réfugiés vivant dans notre pays, qui a suscité son intérêt. La prudence du réseau danois est clairement affichée dans son étude de fin décembre, où il est, en effet, précisé que même si elle a pu être réalisée grâce au «généreux» soutien de la Commission européenne, le contenu de ce rapport ne peut en aucun cas être perçu comme reflétant la position de l’Union européenne.
Cette prudence est d’autant plus légitime, eu égard aux graves et multiples dépassements dont est accusé notre pays. Manquements aux engagements internationaux, non-respect de ses propres lois, discrimination, racisme et manipulation des données présentées aux institutions onusiennes, en passant par les violations des droits de l’homme. Grâce à des enquêtes et des recherches effectuées sur le terrain (en Algérie) avec également l’apport financier de la fondation Ford, l’agence danoise d’aide au développement international (Danida) et de l’agence internationale suédoise de coopération au développement (Sida), l’étude est axée sur le cas des demandeurs d’asile et des réfugiés subsahariens.
Ceux-ci sont maintenus dans une situation de non-droit, considère le Remdh.
En cause, le Bureau algérien pour les réfugiés et les apatrides (Bapra), en place depuis 1963 et relevant du ministère des Affaires étrangères. Bien que celui-ci ait la compétence exclusive pour se prononcer sur les demandes d’asile et reconnaître le statut de réfugiés aux personnes reconnues comme telles par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), le taux de reconnaissance pour les demandeurs d’asile subsahariens est invariablement de 0%, souligne le Remdh.
Interpellées sur la question, les autorités algériennes ont reconnu que la procédure de reconnaissance de la qualité de réfugié était conduite avec l’assistance du HCR, tout en se gardant d’aborder le rôle du Bapra, des modalités et des critères présidant à la détermination du statut de réfugié en Algérie, note le rapport.
D’où la réforme de cette institution, en préparation. Le nouveau texte réglementaire vise à rénover le Bapra et à redéfinir ses attributions, sans pour autant préciser en quoi consisteraient les modifications attendues, ni indiquer d’échéance pour l’adoption de ce règlement, relèvent les auteurs de l’étude. Plus «clément», le Remdh a parfois recours à la mise en exergue de certains points positifs à travers lesquels notre pays veut projeter l’image d’un pays respectueux des droits de l’homme. Ainsi, écrivent les rapporteurs, les conventions sur l’asile (convention de 1951 et convention de l’OUA) font partie du droit positif algérien. L’article 132 de la Constitution stipule que «les traités ratifiés par le président de la République, dans les conditions prévues par la Constitution, sont supérieurs à la loi».
En revanche, il est fait état de l’absence de disposition spécifique sur l’asile dans la Constitution, excepté l’article 69, qui interdit l’extradition des réfugiés. Même l’opinion publique et la presse nationale n’ont pas été épargnées par les critiques du Remdh.
Il leur est surtout reproché d’entretenir l’amalgame entre l’immigration, l’asile, le trafic de drogue et la criminalité. Ainsi, outre la barrière de la langue pour les anglophones, les migrants subsahariens pâtissent du racisme des Algériens qui ont des réactions négatives à leur égard, car associant migrants et sida.