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10 ans après le printemps noir, le goût inachevé de la contestation

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zoom | © Souhil B.

Dix ans plutôt, la Kabylie a bravé l’interdit pour porter des revendications démocratiques auxquelles le pouvoir algérien a répondu par le crime. En 2011, la contestation touche les quatre coins du pays, mais la voix du peuple demeure inaudible, et les pouvoirs publics plus «cléments». Le scénario du printemps noir de 2001 est-il possible en 2011 ?

«En 2001, la Kabylie a été provoquée afin de régler des comptes au sommet de l’Etat, contrairement à 2011, où les revendications sont socio-économiques et émanent du peuple. Donc, un autre printemps noir ne verra certainement pas le jour !», révèle L. M., ancien membre du Mouvement citoyen de Kabylie (archs) et l’un des rédacteurs de la plateforme d’El Kseur. Le printemps noir est, selon ce militant pour la démocratie, l’œuvre de hauts dirigeants de l’Etat qui ont toujours instrumentalisé la région de la Kabylie, bastion de la révolte, pour se maintenir au pouvoir. 126 morts et des centaines de blessés en un temps record, tel est le bilan des événements de Kabylie de 2001. Le pouvoir algérien n’a pas hésité à user des armes à feu pour étouffer la voix des protestataires. Dix ans plus tard, les Algériens continuent et intensifient leur révolte contre la précarité qui caractérise leur vie.

Grève, sit-in et marches sont organisés dans les rues du pays, en particulier celles de la capitale. Le front social bouillonne, les forces de l’ordre se mobilisent, répriment et matraquent. Mais les organisations de la société civile demeurent «éparses», de l’avis de Saïd Salhi, ancien membre du mouvement citoyen de Kabylie et responsable du bureau de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme à Béjaïa. «Les actions de protestation menées un peu partout, notamment à Alger par les différents segments structurés ou pas de la société restent très éparses et sectaires. Cela dénote bien le degré d’émiettement des organisations de la société civile et politique et leur faiblesse à se muer en véritable front social et politique autour des revendications transversales et plus globales», analyse-t-il. A quoi est dû cet «émiettement» ? 

Pour L. M. «Le pouvoir algérien a pu acheter certains porte-voix de la population. Aujourd’hui, les partis politiques et les différentes organisations de la société civile sont  discrédités. Comment se fait-il que les deux partis politiques les mieux implantés en Kabylie n’arrivent pas à marcher conjointement pour dénoncer plus de soixante enlèvements dans la région ?», dénonce-t-il, avant d’enchaîner : «Le pouvoir algérien a réussi à créer un climat de suspicion et de manque de confiance entre figures rassembleuses et population.» Pourtant, Saïd Salhi se montre optimiste quant à un éventuel changement du régime : «Ce qui se passe en ce moment en Algérie et dans le monde arabe annonce inévitablement une nouvelle ère. Le changement arrivera sans conteste. Les différents mouvements convergeront sans doute vers une dynamique plus large et plus profonde, la société finira par forger ses outils et secréter ses propres organisations et représentants.»

Quant à L.M., il assure que «les différents compartiments du pouvoir algérien, contrairement à ce que l’on croit, sont plus que jamais solidaires et évitent de titiller la Kabylie, première région à se soulever. Au contraire, le régime fait tout pour rassurer la population quitte à mettre la main à la poche. Et cela se répercutera, sans doute, sur le successeur de Bouteflika qui trouvera un peuple assoiffé de changement et des caisses défaillantes».
 

Lamia Tagzout

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