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la dérive de la justice algerienne vers le pouvoir fantoche

 

Le maire de Zéralda ou les graves dérives du système judiciaire algérien

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Mouhib Khatir

Mouhib Khatir, le président d'APC de Zéralda poursuit au risque de sa vie sa grève de la faim. La date de l’audience de la première des trois affaires dont il est accusé est fixée pour le 29 août 2011. On s’est dit un moment que la raison a pris le dessus sur la passion et que la Rahma de ce mois sacré a rempli le cœur de nos magistrats qui se sont rendu compte de leur bavure, vont libérer un innocent pour le laisser passer la fête de l’Aïd avec ses six enfants et sa femme opérée du cœur.

Mais ce rêve s’est vite transformé en illusion lorsque le dimanche 14 août 2011, la juge en charge de l’instruction de ce dossier, décide à la veille de son départ en congé de «boucler » la deuxième affaire relative aux portables qui requiert elle aussi un mandat de dépôt. Donc, même si le maire est innocenté dans cette affaire prévue fin août, il ne sortira pas de la prison jusqu’à l’audience de la deuxième dont la date n’est pas encore connue. Et tout ceci est piètrement calculé, c’est justement ce que nous essayerons d’étayer tout au long de notre exposé.

L’exécutif de la mairie de Zéralda manœuvre pour destituer le maire

Pendant que Mouhib Khatir est en prison, l’exécutif de la mairie de sa commune ne perd pas une journée pour rassembler le maximum de voix afin de demander au wali d’Alger sa destitution et son remplacement officiel par un autre membre. C’est justement le but recherché depuis le début, pourquoi ? Sa destitution permettra au nouveau maire de retirer toutes les plaintes contre le fameux procureur général auprès de la cours de Blida et de ses sbires à l’intérieur de la commune. Donc la connivence de certains membres de l’exécutif de l’assemblée populaire de Zéralda avec certains magistrats de Blida est incontestablement établie. Ce qui explique le silence des habitants de cette commune égarés dès le début de l’installation de leur maire par ce double pouvoir local aux résonances contraires.

Mouhib Khatir a été piégé par son vouloir de secouer le «mammouth» sans avoir pris la précaution de s’assurer de la fiabilité de ses troupes. Et quel maire peut s’assurer de la fiabilité de ses troupes avec un statut officiel de figurant et au demeurant dépourvu de la protection du parti unique ou de ses satellites ?

Maintenant pourquoi programmer une première audience la veille d’une fête religieuse ? Ce choix est délibéré car il vise un objectif précis. Celui d’éviter une forte médiatisation du procès. Les commanditaires de cette opération n’ont pas prévu autant de bruit autour de cette affaire qui commence à consolider une solidarité qui dépasse les frontières de l’Algérie. Tous les yeux sont braqués sur cette première audience entre autres la presse, les ligues des droits de l’homme, nationales et internationale, sans compter les institutions de souveraineté algériennes qui ne souhaitent pas être impliquées dans un engrenage déclenché par l’imprudence d’un procureur.

Pourquoi cette crainte d’une forte médiatisation du procès ?

Eh bien tout simplement, il n‘y a aucune accusation crédible à présenter en public. Dans une première affaire, sept agents de la brigade antiterroriste agressent un officier de la police judiciaire dans une impasse à l’insu des regards, le désarme, l’embarque lui et sa voiture. Ils n’ont ni mandat d’arrêt ni compétence territoriale. La dénonciation d’un responsable politique, des ONG et la presse nationale et internationale n’a inquiété aucun responsable du secteur de la justice qui continue à cultiver le silence. Ne sommes-nous pas dans une jungle ? Que pensera le public qui assistera à cette audience et qui suivra les auditions et la plaidoirie des uns et des autres ?

C’est certainement tout cela qu’on tente d’éviter pour faire un procès en catimini pour condamner à une longue peine ce maire et le faire taire définitivement du moins jusqu’à ce que l’opinion publique se calme. Il est clair que la veille de l’Aïd, les gens sont plus affairés par les achats et la préparation de la fête que de s’intéresser à un procès dans une daïra située à prés de 200 km d’Alger. Maintenant, si cette année, on ne jeûnera que 29 jours, alors l’audience coïncidera avec un jour férié et sera donc renvoyée aux calendres grecques.

La lecture du dossier de fond de la deuxième affaire relative aux fameux «portables» laisse un juriste ordinaire perplexe. Une affaire purement commerciale qui n’aurait même pas besoin d’être instruite et n’a absolument rien à voir avec le code pénal et notamment son article 372. Le maire a agit en tant que personne morale, le plaignant devait engager une procédure en civil pour recouvrir son droit s’il se sent lésé. Or, il n’existe aucune trace d’une quelconque plainte de ce vendeur de portables comme si on l’a incité à se plaindre sans lui faire signer quoique ce soit. Ceci ressemble à une manipulation pure et simple.

Quand on se penche sérieusement sur le fond du dossier, surtout pour un étranger qui ne connaît pas les différentes affaires de corruption qu’à connues notre pays ces dernières années, il aura l’impression qu’il nage dans un pays de rêve blanc comme la neige. Le système judiciaire avec une extrême vigilance n’a même pas laissé passer l’acte d’un responsable sur le témoignage de son collègue, lui-même repris de justice pour avoir pris deux portables qui coûtent au plus 6000 dinars. Le public algérien, Dieu merci ! qui assistera à cette audience et qui sait que son pays a dépassé le seuil rouge dans le classement des pays les plus corrompus au monde et a laissé filer des milliards de dollars outre-Atlantique, comprendra qu’organiser une audience sur le dos du contribuable et déranger un public à la veille d’une cérémonie religieuse pour une affaire de deux portables soi-disant pris par un responsable relève du ridicule. Une vraie mascarade !?

Donc ce problème devient encombrant pour ceux qui ont commandité cette opération et leur seule porte de sortie serait une condamnation à huis clos comme ils l’ont fait avec d’autres. Il se trouve que les données ont changé. Et persister à croire à cette approche serait se leurrer lourdement. Les choses ont évolué en Algérie et pour preuve la forte médiatisation de cette affaire sur le net, les journaux et la prise de conscience du citoyen lambda.

On dirait que les responsables au pouvoir ne se rendent pas compte des changements qui s’opèrent malgré eux et indépendamment de leur volonté. Le développement de l’affaire Mouhib Khatir aura au moins eu le mérite de montrer que même dans l’application des méthodes maffieuses, nos stratèges restent incompétents. Comment peut-on les qualifier alors ?

Rabah Reghis

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