Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

sans commentaire!!!!

Bavures militaires, kidnappings, attentats…
A Tizi Ouzou, la population s’interroge sur les vraies raisons de l’insécurité permanente

Imene Brahimi

Le jeudi 23 juin 2011, Mustapha Dial, ouvrier de 42 ans et père de quatre enfants, est victime d’une bavure militaire dans la villa où il effectue des travaux, à Azzazga. Le 11 septembre, Zahia Kaci, 55 ans et mère de quatorze enfants, revient d’un enterrement avec deux cousines. Elle est tuée à bout portant alors qu’elle emprunte un passage jouxtant la caserne des parachutistes à Fréha. Le 29 novembre, deux habitants du village de Tigounatine (commune d’Akerrou), Maatoub Ramdane, 65 ans, et Rafik Haddad, 17 ans, sont tués dans une embuscade à 200 mètres en contrebas de leur village.
 
Trois "bavures" successives en moins de six mois qui s’ajoutent à d’autres, moins médiatisées, déjà enregistrées auparavant dans la wilaya. Le phénomène laisse la population locale perplexe. La multiplication de ces bavures dénote-elle un fléchissement du professionnalisme de l’armée ?  Une faiblesse dans l’instruction des soldats ?  Ou tout simplement une provocation qui ne dit pas son nom ? Si c’est le cas, au profit de qui ?
 
 
Un scénario bien rodé
 
A chaque fois, le scénario est le même. Acte I : les militaires tentent de justifier leur acte sous couvert de lutte contre le terrorisme. Et d’expliquer que les personnes tuées pouvaient « apparaître comme des terroristes ». C’est ce qui a été répondu aux représentants de la population d’Azzazga peu de temps après la mort de Mustapha Dial. Quelques minutes avant la "bavure", les militaires avaient essuyé un attentat à la bombe à la sortie de l’hôpital d’Azzazga, et investi la villa où travaillait ce père de famille. Dans le cas de la mort de Zahia Kaci, les responsables de la caserne de Fréha ont tenté de convaincre la population que la victime passait sur les lieux au moment où un homme armé tirait sur la caserne. Enfin, juste après la mort de Maatoub Ramdane et de Rafik Haddad, les militaires ont expliqué aux habitants de Tigounatine que les deux chasseurs auraient riposté à des coups de feu de sommation.
 
Acte II : juste après la mobilisation des villageois, les chefs des bataillons finissent par admettre qu’il s’agit de « méprise », de « bavure », d’« erreur ». Le wali, accompagné des membres de la commission de sécurité, présente alors ses condoléances, s’entretient avec les représentants de la population, promet un statut de victime de terrorisme aux tués, ce qui implique des  réparations financières. Et que « toute la lumière sera faite sur les circonstances du drame et les auteurs seront sanctionnés ». Dans chaque cas, on tente de rassurer les citoyens en expliquant que les auteurs des « bavures » ont été identifiés et suspendus en attendant leur traduction devant un tribunal militaire.
 
 
Un contexte d’insécurité permanente
 
Coupure dans la diffusion de l’information, suspension de la procédure ou simple manipulation en attendant que la population, à raison en colère et consternée, se calme ? Les habitants s’interrogent toujours, notamment sur les véritables raisons et sur les conséquences d’un phénomène nouveau qui vient aggraver une situation sécuritaire déjà complexe : attentats à répétition, faux barrages à vocation de racket et multiplication des kidnappings ont déjà poussé de nombreux opérateurs économiques à fuir la région. A Tigounatine, comme à Fréha, à Azazga, à Mizrana ou à Béni Aissi, où le cardiologue Djellal Nacer approche de son vingtième jour de captivité, la population liste toutes les hypothèses mais ne trouve aucune réponse. Elle ne peut que se contenter d’évoquer l’ambiance générale « d’insécurité », qui viendrait tantôt du terrorisme, tantôt du banditisme. Mais aussi, estime-t-elle depuis quelque temps, de la passivité et des bavures de l’État.
 
De leur côté, les représentants de l’État avancent la même explication au problème de l’insécurité : elle serait due au départ de la gendarmerie après les événements de Kabylie et, surtout, au refus de la population de contribuer à la lutte antiterroriste. A l’inverse, la population de la région se souvient bien que la résistance a toujours été incarnée par les groupes de patriotes qui ont permis de sauver l’Algérie du péril terroriste. Originaires d’Igoujdal, ces groupes sont toujours en activité en dépit de la précarité de leur propre situation sociale et du marasme qui frappe la Kabylie. De l’aveu même des représentants des forces de sécurité, il n’est pas un seul de leurs succès qui ne soit dû aux précieux renseignements fournis par ces patriotes.

Les commentaires sont fermés.