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Comment pardonner à quelqu’un qui n’a pas présenté d’excuses ?


Par Hakim Laâlam  
Email : hlaalam@gmail.com Dernière minute ! La carte Chiffa est valable pour…

… se rendre en Tunisie !

Je ne me lève pas tous les matins en exigeant que la France se repente de ses crimes coloniaux. Je ne me couche pas non plus tous les soirs en fermant les yeux sur ces crimes. Pour dire juste que même si je ne suis pas du FLN, même si je ne suis pas de l’Onec ou de toute autre organisation qui plaide à vide, cycliquement et presque en ronronnant pour la repentance de la France, je n’en suis pas moins convaincu d’une chose, et d’une seule en la matière : rien ne pourra se faire réellement si la France ne vient pas sur la place publique, officiellement dire le mal qu’elle a fait, qu’elle a engendré et qu’elle alimente aujourd’hui encore en Algérie, chez moi. Rien ne pourra vraiment «démarrer» entre nos deux pays avant que les plus hautes autorités françaises ne reconnaissent les statuts de chacun. L’agresseur. L’agressé. Le colonisateur. Le colonisé. Le répresseur. Le résistant. Toutes les prochaines célébrations de l’indépendance, la 51e et les suivantes pourront se dérouler de manière apaisée (et non modérée, Monsieur Alain !) si Paris s’amende de ces crimes. Mon Dieu ! Il ne s’agit pas de vivre sur le passé. Il s’agit de vivre son passé pour que ce dernier n’obstrue pas son présent et son futur. Et Allah Ghaleb ! Mes ancêtres, mes grands-parents, mes parents ont été agressés, violentés et pour des millions tués par la France officielle, pas par une étrange épidémie qui se serait abattue sur Al Djazaïr en 1830 et qu’aucun épidémiologiste n’aurait réussi à identifier au jour d’aujourd’hui, 50 ans après. Je suis l’agressé ! Je suis le colonisé. J’exige des excuses. Car je ne peux accorder mon pardon à qui ne me présente pas d’excuses ! C’est élémentaire ! Je suis même étonné que l’on se posât encore ce genre de problématique. L’œuvre «civilisatrice» de Fafa, je ne l’ai pas demandée, et mes aïeux ne l’ont pas attendue, puis acclamée sur les plages de Sidi Fredj. Ils l’ont combattue. Comme ont combattu du fin fond des campagnes et des tréfonds des villes de France les résistants contre l’occupant allemand. L’Allemagne a demandé pardon à la France. La France a demandé pardon aux juifs. C’est bien. Et mes aïeux, b… ? Que vais-je leur dire ce jeudi ? Que puis-je raconter à mon oncle Saïd, torturé et donné à manger aux chacals, sans que l’on ait pu faire notre deuil ? Que puis-je expliquer à M’hamed, ce cheminot de père qui a commis le crime de dissimuler la fameuse Ronéo dans un wagon de train et qui l’a payé de quatre années de bagne, à Saint-Leu et à Port-Cazelles ? Que puis-je répandre sur leurs tombes en guise de fleurs ? Cette énormité voulue par nos amis français et leurs relais-comptoirs laissés ici, en Algérie : la modération ? Dire Maâlich, au nom de la modération ? Ou tout simplement classer l’affaire en évitant le regard de Ben M’hidi et d’Abane ? Je ne puis ! Je ne puis ! Je ne puis ! Je suis un enfant des balbutiements de l’indépendance. Je ne suis pas du FLN. Je ne suis pas de l’Onec. Ou de toutes autres free-shop de l’histoire mercantilisée. Mais je ne trouverais repos et apaisement que lorsque ce beau pays qu’est la France reconnaîtra officiellement ses laideurs algériennes. En attendant, je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue.

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