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Les suites brutales du plébiscite

 

Par : Mustapha Hammouche

Des agents qui surgissent dans le champ de la caméra, juste pour le plaisir d’assener coups de poing et coups de pied à la tête et dans le dos de personnes déjà arrêtées et empoignées. L’un d’eux s’acharne à coups de botte sur un jeune homme inerte, avant que d’autres ne viennent le traîner sans même jeter un regard sur “leur prise” pour s’assurer de son état…
Certains accourent uniquement pour cogner, pour ensuite se déporter vers une autre proie qui passe, colletée par des collègues, et qu’ils frappent encore. Parfois, ils sont si nombreux à se partager la même victime que le dernier venu peine à trouver un espace par lequel faire passer son poing ou sa matraque.
Et l’on peut voir tout cela le temps d’un film de deux minutes ! Ce n’est donc, là, qu’une infime séquence de la journée de répression contre les manifestants commémorant le trente-quatrième anniversaire du Printemps amazigh à Tizi Ouzou. On peut imaginer ce que les jeunes subissent une fois à l’intérieur des locaux.
Les images de cette vidéo révèlent une hargne répressive qui en dit long sur l’état d’esprit du service d’ordre dépêché pour “encadrer” la marche. Cet état d’esprit n’a pas, tout de même, spontanément submergé tous ces agents, ce 20 avril ! L’on n’en voit aucun, dans ce film, qui tente de s’interposer pour freiner l’excès de brutalité de ses collègues, comme cela arrive quand des fonctionnaires cèdent à l’énervement.
La célébration du “printemps 1980” constituant, depuis vingt-cinq ans, une tradition et un acquis tacite, l’initiative de son empêchement équivaut à un acte de provocation envers la masse de populations attachées à la revendication que cette date symbolise. L’on retrouve, dans la gestion politique de l’événement comme dans sa gestion sécuritaire, l’esprit d’une campagne électorale tout entière, animée, sur toute sa durée, d’une volonté d’étouffement de toute expression divergente — y compris par la répression violente — et d’une inclination au rabaissement méprisant de l’adversaire. En engageant toutes les institutions dans sa “guerre” électorale totale, le pouvoir a fait de l’adversaire politique du régime un ennemi public. Il ne faut, donc, point s’étonner du fait que défense de l’Etat et défense d’un clan politique, défense de l’ordre public et répression d’une opinion… se confondent. Les menaces du type “On s’expliquera après le 17 avril”, émises en pleine campagne par les promoteurs du quatrième mandat, commencent à prendre tout leur sens.
Il se peut même que la volonté d’en découdre, retenue jusqu’au jour du scrutin, pour en réduire les effets médiatiques, ne fait que se libérer, maintenant que le pouvoir croit avoir retrouvé le huis clos si confortable, quand il s’agit pour un régime autoritaire de sévir contre son peuple.
Quand un régime est élu à 81%, il faut que “l’ordre”, c’est-à-dire le silence, règne, pour que la vie publique traduise l’assentiment général exprimé par le plébiscite. Au demeurant, le pouvoir n’a pas fait un secret de ses velléités d’étouffer la parole. Le mouvement Barakat, la chaîne de télévision Atlas TV ou le quotidien Djazaïr News l’ont déjà éprouvé.
Nous, comme le monde qui nous regardait, avons trouvé cette élection surréaliste jusqu’au cocasse. Il semble que l’on va moins rire, désormais.

 

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