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ça bouge pas mal à alger

  • ça bouge pas mal à Alger

    Par : Mustapha Hammouche

    L’Algérie n’est pas la Tunisie, ni l’Égypte, ni la Libye, ni le Yémen, ni le Bahreïn… Le président Bouteflika l’a écrit dans son message du 19 mars : elle ne ressemble à nul autre pays.
    Mais, une fois l’axiome posé, il semble que cela ne suffit pas à rassurer. Ni le pouvoir qui craint que son tour n’arrive d’être invité à “dégager”, ni les opposants qui craignent d’être dépassés par les virtuels évènements, ni les opposants “embeded” comme le MSP, ni les vrais soutiens et faux critiques, comme le PT.
    Le régime ne sait plus où donner de la tête : tantôt distribuant des “augmentations” ou revenant sur un décret, tantôt distribuant des coups de matraque et de gaz lacrymogène, il oscille entre le fusil et le bâton.
    Les graves affrontements qui, hier, ont eu pour décor la cité Climat-de-France, à Alger, sont significatifs de cette gestion approximative de l’ordre public par un État et de l’embrouillement d’un pouvoir partagé entre la peur d’allumer la mèche et le désir d’exhiber sa poigne.
    Les mêmes autorités, ou d’autres, ont bien dû fermer les yeux, par souci de paix civile, sur la construction de baraques qui a, tout de même, demandé quelques semaines d’ouvrage. Et les mêmes autorités, ou d’autres, ont fait appel à la troupe pour assurer leur démolition, comme si les bidonvilles en question venaient d’être subitement découverts.
    Cette intervention musclée intervient dans un contexte où, par ailleurs, le pouvoir fait montre de complaisance là où, d’habitude, il faisait preuve d’excessive rigidité : les commerces informels sont autorisés et les chauffards ne courent plus le risque du retrait de permis ; les étudiants ne veulent plus du nouveau règlement et le décret est aboli, moins de deux mois après sa promulgation. C’est dans ce contexte de permissivité conjoncturel qu’on laisse pousser et qu’on va détruire une trentaine de bidonvilles. Les collectivités locales, apparemment non instruites de manière cohérente, ballottent à leur tour entre la rigueur de principe et la bienveillance de conjoncture.
    Même les policiers ne doivent plus savoir sur quel pied danser. Hier, dressé en guetteur au milieu de la voie et prêt à dégainer le bon de retrait de permis, l’agent est sommé de faire le flic débonnaire devant les menus dépassements de l’automobiliste jusqu’ici traité presqu’en ennemi public.
    Mais l’expression du malaise politique ne se limite pas à la gestion de l’ordre au quotidien. Même si l’Algérie ne ressemble pas à ses voisins, on s’active autour d’un projet d’arrangement constitutionnel, au cas où l’ébullition, pour le moment d’expression sociale, tournerait à la revendication politique.
    Pendant ce temps, dans l’opposition, Sadi tente d’occuper un terrain où la troupe le précède à chaque fois, Aït Ahmed tente d’occuper épistolairement la scène, Soltani prend verbalement ses distances d’un pouvoir désormais sans assurance-vie et Louisa Hanoune le critique pour mieux s’en rapprocher.
    Décidément, l’Algérie ne leur ressemble pas, à ces pays “frères” : là-bas, ça bouge dans un sens ; ici, ça bouge dans tous les sens.

    M. H.
    musthammouche@yahoo.fr