Par : Mustapha Hammouche
La “Coordination nationale pour le changement et la démocratie” a “décidé” d’une manifestation pour le 12 février.
Alors que le vent de Tunisie souffle jusqu’aux confins de la péninsule Arabique en passant par l’égypte et pousse les dictatures vers la trappe de l’histoire, la “coordination” propose que le mouvement se conforme à son calendrier, offrant, volontairement ou non, un sursis au “système” dont elle revendique pourtant “le départ”. Un objectif contredit, d’ailleurs, par une “plate-forme” qui se limite à “exiger la levée de l’état d’urgence, l’ouverture du champ politique et médiatique et la libération des personnes arrêtées pour des raisons de manifestation ou de délits d’opinion”.
Dans ce contexte, où s’exprime une volonté de rupture partagée par des peuples désespérés de voir leurs dictatures se réformer, il n’est plus question de droits politiques parcellaires.
écoutons leurs slogans !
Ressortir maintenant des méthodes d’action datant de… vingt-trois ans pour se mettre en travers de l’onde de choc, faire attendre le train du changement pour pouvoir l’emprunter, reviennent à réduire les chances du pays d’être touché, dans la foulée, par l’élan transformateur parti de Tunisie. Cette pratique elle-même fait partie du système : la question identitaire, la revendication démocratique, la révolte de Kabylie ont eu à souffrir et à s’immoler du fait de cet opportunisme de leadership.
Si les initiatives “encadrées” pouvaient contribuer à l’évolution démocratique en Algérie, on l’aurait su, depuis 1988. En…vingt-trois ans, des “coordinations” et autres mouvements sont nés, des leaders ont prospéré en anticipant les luttes pour, ensuite, échanger leurs dividendes politiques contre des gains de statut. Les reniements tactiques des conversions opportunes, des tentations carriéristes ont eu raison des générations de militants, et les “chefs” se sont ensuite remis à l’affût de la vague revendicatrice suivante pour la chevaucher en surfeurs aguerris.
Parfois, ils s’en passent, de cette base militante, pour s’assurer une existence politique. Ainsi, Louisa Hanoune, déclarée premier parti de l’opposition par “le système des quotas” et qui, forte de cette promotion du système, proclame qu’“en cas de révolution, nous serons prêts à l’encadrer et à être à la hauteur”. L’encadrer pour le compte de qui ?
Mokri et le MSP peuvent alors faire mieux : siéger dans l’alliance au pouvoir dans la sérénité que procure l’état d’urgence et exiger la fin de la loi d’exception qui protège son régime.
Ces “coordinations”, attelages de circonstance, à géométrie variable parce que l’on s’y pousse du coude pour être le premier, polluent l’expression des mouvements sociaux et politiques populaires. Devenues politiquement contreproductives, elles n’inquiètent plus les régimes, à l’heure des révolutions Internet. Les réactions de Ben Ali et Moubarak n’ont pas été de faire taire les partis d’opposition, les associations et les “élites”, mais de fermer Internet et de couper le téléphone. Aujourd’hui, ce sont les sites, les blogs, Facebook et Twitter qui “coordonnent” les luttes des nouvelles générations. Notre engagement d’entrepreneurs politiques a aussi besoin de faire sa révolution.