ABDELKADER BENSALAH MIS DANS L’EMBARRAS
Deux projets de loi anticonstitutionnels devant le Sénat !
Le Conseil de la nation est appelé à examiner deux des nouvelles lois sur les réformes politiques, successivement celle portant sur les cas d’incompatibilité des mandats parlementaires et celle traitant des quotas des femmes dans les assemblées élues. Une simple formalité ? Pas cette fois-ci. Et pour cause.
Kamel Amarni - Alger (Le Soir) -L’une et l’autre s’avèrent anticonstitutionnelles ! Une source très bien informée nous révèle, en effet, que le gouvernement tente de rattraper le coup avant que cela ne soit trop tard. «Abdelkader Bensalah est vraiment dans une position peu enviable, lui qui hérite d’un autre cadeau empoisonné que lui a légué Abdelaziz Ziari», nous confie notre source. Il s’agit de l’avant-projet de loi sur la représentativité des femmes dans les assemblées élues. «Complètement modifié au niveau de l’Assemblée, le texte voté par les députés n’a plus rien à voir avec celui présenté par le gouvernement. Sur pression de Abdelaziz Belkhadem, la commission juridique a trituré le texte sans pour autant procéder aux simulations d’usage en pareilles circonstances. A savoir examiner l’applicabilité des dispositions modifiées. Or, la commission juridique revoie le taux de la représentativité féminine, initialement fixé à 30% par le gouvernement sans tenir compte des mécanismes de la mise en application en réel, ni de la Constitution.» S’agissant de la première tare, l’applicabilité impossible de ces dispositions, l’on cite par exemple le cas d’une législative et des quotas réservés aux femmes sur les listes électorales pour la communauté algérienne à l’étranger. Le nombre total des sièges de la communauté est de huit, dont quatre rien que pour la communauté établie en France. Pour le reste des circonscriptions (reste de l’Europe, Amérique du Nord et Asie, Maghreb arabe et le reste du monde arabe), il est prévu un siège chacune. «Comment dès lors faire appliquer la parité pour un seul siège comme prévu par la commission juridique de l’APN ?» ironise notre source. Au niveau national, la même commission juridique prévoit des taux respectifs de 40% pour Alger, de 35% pour Oran, Sétif et Tizi Ouzou, 30% pour trente wilayas et 20 % pour quatorze autres wilayas. Pour ces quatorze dernières wilayas, le cas relève également de l’insolite. Pour la simple raison qu’il s’agit des wilayas dont le nombre de sièges à se disputer est de quatre et moins. Or, 20% de 4, c’est 0.8 ! «C’est mathématiquement juste, mais humainement irréalisable ! Nos députés sont dans l’irréel. Et c’est inadmissible lorsqu’on sait que le président de l’APN a, à sa disposition, une armée de conseillers», fera remarquer notre source. Des conseillers qui auraient également pu aisément lever l’autre entorse, constitutionnelle celle-là, faite en procédant à la répartition des quotas à des taux différents entre les wilayas. «De quel droit accorde-t-on aux femmes d’Alger 40% et celles du Sud par exemple 20% seulement ?» Une répartition en tout cas qui tombe en parfaite violation de l’article 29 de la Constitution algérienne qui stipule ce qui suit : «Les citoyens sont égaux devant la loi, sans que puisse prévaloir aucune discrimination pour cause de naissance, de race, de sexe, d’opinion ou de toute autre condition ou circonstance personnelle ou sociale.» C’est dire que, même si le Sénat adopte la loi telle que modifiée par l’APN, elle sera invalidée par le Conseil constitutionnel ! «Des tractations sont en cours d’ailleurs pour que les membres du Conseil de la nation puissent, comme ils en émettent le vœu, procéder à un vote article par article. Cela passe par une réunion des membres des bureaux des deux chambres du Parlement», nous confie encore notre source. Les cas d’incompatibilité ? C’est tranché depuis 1989 ! L’Assemblée populaire nationale et le gouvernement se partagent par ailleurs la responsabilité d’avoir fait adopter un autre texte de loi en violation de la Constitution : la loi sur les cas d’incompatibilité des mandats parlementaires. Telle qu’approuvée par les députés jusque-là, cette loi dispense deux catégories professionnelles, les professeurs d’université et les professeurs de médecine de la contrainte de ne pas cumuler exercice du mandat et celui de leur profession. C’était exactement ce que prévoyait l’article 8 de la loi 89-14 portant statut du député adopté en été 1989, déjà. Mais qui sera invalidé par le Conseil constitutionnel par arrêté n° 2-83 du 30 août 1989, faisant référence aux dispositions du même article 29 de la Constitution cité plus haut ! Le même projet de loi est présenté aujourd’hui, mardi, au niveau du Sénat par le ministre de la Justice, Tayeb Belaïz. Sans la moindre chance de voir le jour, un jour...
K. A.