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  • Le black-out politique

    Absence du président de la scène, paralysie des institutions et colère des citoyens

     

     

    Par : Djilali BENYOUB

    Les coupures d’électricité récurrentes, conjuguées à une indécision politique, confortent le sentiment général que le pays se trouve dans un black-out politique total, propice à toutes les rumeurs.

    Depuis les législatives du 10 mai, le sommet de l’État est à l’arrêt temporaire. D’aucuns s’interrogent sur l’éclipse des responsables, l’absence du président de la République et, bien entendu, la toile qui fourmille d’informations, de rumeurs, de supputations et, surtout, un flot de questions que le silence officiel contribue savamment à amplifier sans apporter la moindre réponse.
    Black-out également devant les préoccupations de la population exprimées désormais exclusivement par l’émeute. Ni les ministres ni les walis ne peuvent convaincre avec leur “théorie” et leurs chiffres des citoyens excédés par la gestion des affaires et surtout les services publics. En cette période de Ramadhan et de grandes chaleurs, l’État est quasiment out, alors que le citoyen est soumis à des coupures récurrentes d’électricité, d’eau, et justification, au bas de l’échelle des responsabilités, les ministres et le Président étant hors champ, l’incivisme qui s’est érigé ces dernières années en mode national.
    C’est cependant oublier trop rapidement les chiffres et les promesses de régler ces problèmes de délestage et de coupure d’eau. En l’absence d’un responsable, un ministre capable de s’adresser à la population, d’expliquer ces ruptures intempestives que les justifications du P-DG de la Sonelgaz n’ont convaincu personne, le citoyen est réduit à un état “élémentaire” usant de tous les moyens pour dire son mécontentement.

    Domestication du gouvernement
    Cela dure depuis des mois, et même les ministres n’arrivent pas à se défaire du blocage que leur ont provoqué les sermons et les critiques du Président qui, avec le temps, a accaparé de larges pans de leurs prérogatives. Jusqu’au droit de regard sur tous les secteurs. Ils ne sont, après tout, que des exécutants de son programme.
    Il est devenu le seul maître de la décision, le donneur d’ordre à tel point que même les citoyens ayant saisi ce schéma ont compris que le Président constitue l’ultime et unique recours devant les dépassements de l’administration, le recours pour reprendre un droit. En concentrant tous les pouvoirs, le Président a réussi une sorte de domestication du gouvernement et à focaliser toute l’attention sur lui. Et chacune de ses absences devient un sujet de débat, d’interrogation et, surtout, compte tenu de son état de santé, un motif de suspicion, de doutes et de spéculations. On évoque depuis le début du Ramadhan le rituel des auditions, mais il n’en fut rien. En revanche, le secteur de l’énergie fait bien l’actualité avec la fragilisation de l’économie depuis la dégringolade des prix du brut qui poussa d’ailleurs le ministre à parler. Et cette histoire d’électricité qui touche directement le citoyen que le premier responsable du secteur, M. Youcef Yousfi, évitera comme un black-out.
    M. Bouterfa ne pourra rien devant la colère de plusieurs régions qui se sont mises à attaquer les symboles de la compagnie d’énergie. Ne reste alors, comme pour les contractuels de l’éducation, les gardes communaux ou les médecins, que la saisine on live du président de la République.

    Des questions et des hypothèses
    Mais où est-il exactement ? Il n’apparaît plus. Ni à la télévision ni en public. Ce qui a engendré un immobilisme institutionnel, une léthargie politique et donne l’impression que l’État est totalement absent. Là, la voie est ouverte à toutes les hypothèses, les rumeurs les plus fantaisistes, les plus pessimistes, le Net aidant, à toutes les lectures et projections que le silence accrédite dans un certain sens.
    Ce qui donne, sans doute, une atmosphère d’opacité dans la gestion du pays. Bien plus, une sorte d’État sans dirigeants dont les clés sont entre les mains d’une seule personne qui trouve un malin plaisir, par ce procédé, à rappeler qu’elle est la seule et unique maîtresse des lieux et dont dépendent tout mouvement et geste dans le pays. Faudra-t-il alors attendre la réapparition du président de la République pour trouver une réponse aux délestages et éventuellement une solution ? Même attente pour la régulation du marché, pour booster l’investissement privé, pour secouer l’administration, pour débloquer les crédits, pour améliorer Internet, pour rendre justice, pour parler diplomatie et prendre position… tout un programme. Aussi lourd qu’un fardeau.
    À quoi sert alors le gouvernement ? Où est le Président ? Des questions qui doivent faire partie de la spécificité algérienne.


    D  B