Par : Mustapha Hammouche
La longue bande-annonce de ce navet provocateur traîne sur la Toile depuis deux mois sans retenir l’attention, même sous-titrée en arabe. Ce film d’horreur vient de se traduire dans la réalité par des manifestations de violence qui ont occasionné l’assassinat, qu’il ne peut justifier, d’un ambassadeur et de fonctionnaires américains en Libye.
Le pasteur incendiaire de Grenville, qui s’est déjà illustré en organisant un autodafé du Coran, en est le principal promoteur. Il ne s’agit point de simple opinion sur les effets culturels de l’islam ou sur la personnalité de son Prophète : l’intention du “réalisateur”, de ses sponsors et promoteurs de provoquer et d’insulter les musulmans ne fait aucun doute. L’agent immobilier qui s’est improvisé réalisateur “pour la cause” ne s’en cache pas, lui qui traite l’islam de “cancer” en revendiquant son statut de “juif israélien”.
Pendant tout ce temps, des puissances, dont les États-Unis, qui ont la capacité et le souci de surveiller les flux Internet à travers la planète, n’ont rien fait pour désamorcer une telle bombe.
La secrétaire d’État américaine, par courage ou par calcul politique, a dénoncé l’atteinte à une religion en même temps que l’assassinat de l’ambassadeur des États-Unis en Libye et de ses collaborateurs. Mais l’Amérique, qu’Israël soumet à ses desiderata, par son influence électorale décisive, a-t-elle latitude de concevoir sa politique autonome envers l’islam et le monde musulman ? Rien n’est moins sûr. Paradoxalement, la superpuissance qui tient en dépendance plus ou moins entière la majorité des États des pays dits arabes ou musulmans, subit, à travers sa sociologie électorale, la pression permanente d’Israël. Pendant que le “juif israélien” de Californie diffuse des images et des dialogues qui défient les musulmans dans leur foi, Netanyahou enchaîne Obama au téléphone une heure durant pour lui arracher une clarification sur les conditions d’intervention militaire américaine contre l’Iran.
L’Islam, comme institution, ne dispose pas d’autorité pour le défendre contre les affronts qu’il viendrait à subir ; la guerre des doctrines déchire les populations dans sa sphère de dominance. Et les États des pays musulmans sont affaiblis structurellement par les déchirements internes et politiquement par l’obsolescence de leurs régimes despotiques et stériles et par l’influence grandissante de l’islamisme belliqueux. Celui-ci constitue la seule manifestation politique perceptible du monde musulman par un monde libéral asservi à un Israël tout aussi hégémonique et belliqueux.
En renonçant à ses responsabilités devant la tragédie des Palestiniens, par parti pris et par calcul électoraliste, la démocratie occidentale, où la moindre récession économique se transforme en crise nationalo-identitaire, nourrit la régression politique dans le monde musulman. La guerre arrangeant plus que la paix les affaires d’Israël, ses apôtres ne cessent de souffler la haine qui, là-bas, porte au pouvoir les extrêmes droites racistes, les gauches pro-sionistes, les “T-party” xénophobes, et les islamophobes effarouchés.
La première victime de cette impasse violente, on la voit, encore une fois, dans les pays du Printemps arabe, c’est la perspective démocratique dans le monde musulman. Le “choc des civilisations” sera peut-être déclenché par leurs formes les plus dégradées.