Complot terroriste pour tuer le pape ou application du principe de précaution: le Vatican et nombre de policiers penchaient pour la deuxième option samedi après l'arrestation médiatisée de six suspects en pleine visite de Benoît XVI à Londres.
"Nous n'avons jamais accordé une grande importance à ces arrestations", a déclaré samedi à l'AFP le porte-parole du Vatican, Federico Lombardi. L'ecclésiastique a jugé "excessifs les commentaires des médias", tandis que le souverain pontife poursuivait, imperturbable, sa visite d'Etat.
Cette sérénité affichée contrastait avec les titres accrocheurs des tabloïdes britanniques et d'une partie de la presse italienne.
"Un complot musulman pour tuer la pape", proclamait à la une le Daily Express sans guère de doutes sur le fait que les suspects étaient "des terroristes déguisés en faux éboueurs". Le Daily Mirror, plus catégorique encore, affirmait que "les six (suspects) voulaient pulvériser le pape à l'aide de bombes dissimulées dans des poubelles".
Mêmes titres de La Stampa et de Il Messagero: "Ils voulaient tuer le pape". Selon le Corriere della Sera, premier quotidien italien, Scotland Yard a bénéficié du "tuyau" d'un informateur ayant indiqué: "ils veulent tuer le pape".
The Guardian croit savoir que l'unité antiterroriste a agi "sur la foi d'une conversation entendue par dessus l'épaule". Pressée par le temps, elle n'aurait voulu courir aucun risque.
Dans son premier communiqué -- beaucoup plus explicite qu'à l'ordinaire --, Scotland Yard avait signifié vendredi matin que son coup de filet visait cinq hommes de 26 à 50 ans soupçonnés d'avoir "commandité, préparé ou inspiré" des actes de terrorisme. Une sixième interpellation a été opérée dans l'après-midi de vendredi. Les cinq premiers suspects ont été arrêtés avant l'aube dans un dépôt de la société de nettoyage Veolia Environment opérant dans le secteur du Parlement et de l'abbaye de Wesminster. Deux lieux figurant sur le parcours officiel du souverain pontife vendredi.
Samedi, Scoland Yard était beaucoup moins disert, alors que les six hommes étaient toujours interrogés. Elle s'est refusée au moindre commentaire sur la nature du mystérieux complot, la nationalité des suspects (Algériens selon nombre de médias), se contentant d'indiquer n'avoir découvert ni armes, ni explosifs qui accréditeraient un projet d'attentat.
"Il est probable que la police a agi rapidement, à titre de précaution", a confié au Times l'ancien directeur-adjoint des opérations spéciales de Scotland Yard, Andy Hayman. Il exprimait à haute voix une opinion formulée sous couvert de l'anonymat par plusieurs responsables des services de sécurité. "Il serait faux de prétendre que l'arrestation est le résultat d'investigations de longue durée", a confié l'un d'entre eux au quotidien Financial Times.
D'après I.MEDIA, agence de presse spécialisée sur le Vatican, l'entourage du pape estime "que l'arrestation de ces hommes frise l'excès de zèle".
Le dispositif de sécurité était très visible et en force samedi dans le centre de la capitale. Des centaines de bobbies portant un gilet fluorescent jaune étaient alignés tout au long du parcours que devait emprunter la "papamobile" blindée, à l'avant-dernier jour de la visite de Benoît XVI.
Le pape célébrait dans la soirée une veillée de prière en plein air, à Hyde Park, où 80.000 personnes sont attendues. Peu après une manifestation d'opposants à sa visite.
L'envoyé spécial de La Repubblica a confié que le souverain pontife pouvait aussi compter sur la présence du chef de la gendarmerie et services de sécurité du Vatican, Domenico Giani. L'homme a acquis le surnom "d'ange gardien du pape" depuis qu'il s'est interposé à Noël dernier, quand une femme s'est jetée sur Benoît XVI.