Par : Mustapha Hammouche
De l’argent frais va être injecté dans des entreprises publiques. La mesure devrait, dit-on contribuer à “porter la part de l’industrie de 5% à 10% en 2014”. L’argent du pétrole, qui sert déjà à financer toutes sortes d’équipements à fonds perdus, le différentiel du taux de change à l’importation et le déficit du pouvoir d’achat, servira, une nouvelle fois, à entretenir des taux de croissance et d’industrialisation fictifs.
L’essentiel de la rente est dépensé en compensation du non-développement dans la perspective d’assurer un niveau de fonctionnement et de consommation qui limite les manifestations de la panne de croissance. L’État payeur s’inquiète de ne pouvoir s’assurer le contrôle des ressources libérées et vise, à travers ses plus récentes décisions, sur le contrôle des opérations financières, grandes ou petites, à limiter les dégâts en matière de gaspillage de la rente.
Les restrictions introduites par la loi de finances complémentaire n’ont, apparemment pas assuré un niveau d’économie de devises suffisant. Le gouvernement s’attelle visiblement à une recherche systématique de “niches d’économie” dans tous les
secteurs. À titre d’exemple, le ministère de la Santé est en passe de se transformer en ministère du Commerce du médicament, tant il s’occupe essentiellement de tenter de “raccourcir” le circuit commercial des produits pharmaceutiques et d’élaguer la nomenclature des médicaments autorisés à l’importation, de sorte qu’on perçoit si peu d’échos sur les autres aspects de la mission de santé publique.
Dans ce contexte où, faute de maîtrise de l’assiette fiscale et des flux financiers liés à l’activité économique, ce sont les opérateurs économiques et commerciaux qui sont déclarés suspects de fraude. On innove alors en instituant un registre de commerce renouvelable tous les deux ans. À commencer par les registres d’import-export et de gros, nous dit le ministre du Commerce dans une interview accordée au site tsa-algerie. “Certains détenteurs s’en servent pour s’adonner à des pratiques illégales comme l’évasion fiscale et la tromperie sur la qualité” ; c’est ainsi que Benbada justifie la précarisation administrative de l’activité commerciale. Quel pouvoir de négociation peut avoir, en effet, un importateur qui, en plus d’être contraint au crédit documentaire, dispose d’un registre de commerce provisoire ?!
Selon le ministre, le registre “constitue l’une des sources principales de beaucoup d’opérations de fraude”. Alors, faut-il sévir en priorité contre les commerçants enregistrés et oublier le commerce informel qui étend son emprise sur près de 30 % de l’offre nationale ?
Or, de l’aveu même du ministre, c’est “l’administration qui n’arrive pas à faire le suivi complet du registre de commerce”. Si elle ne peut gérer un registre statique, fait de créations et de radiations d’activités, comment pourra-t-elle gérer un registre dynamique où les inscriptions devront être régulièrement réactualisées ?
On peut se méfier du marché en ce qu’il favorise ses règles objectives et en ce qu’il dissout une part du pouvoir d’allocations de ressources de l’administration. La bureaucratie étant source de surcoûts économiques et sociaux, il n’est peut-être pas bon de confondre réglementer et bureaucratiser.