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crimes

  • Un autre 1er novembre aux couleurs du régime, loin des aspirations démocratiques

     


    Zehira Houfani Berfas 
    In Le Quotidien d’Algérie
    Le 01 novembre 2012

     

    Il n’y a pas de meilleure école que la dictature pour pervertir le patriotisme

     

    N’est-ce pas que notre pays illustre parfaitement cette maxime puisqu’il est victime d’un désamour collectif dû à la mauvaise gouvernance de ses dirigeants successifs?

     

    Qu’est-il advenu de la terre de la « Révolution exemplaire », l’Algérie, depuis son indépendance? Du registre de la reconnaissance universelle pour sa « grandeur » et la bravoure de son peuple, à celui de l’indigence et de l’humiliation, le règne de M. Bouteflika a achevé le maigre filon d’espoir repêché de l’hécatombe de la décennie noire.

     

    Qui ne se souvient des premières déclarations du président Bouteflika, quand il annonçait devant la presse mondiale sa volonté de guérir l’Algérie et de la hisser à nouveau au sein des nations respectables. En l’écoutant, bien des Algériens, émergeant du chaos de la sale guerre, ont voulu croire à l’homme « providentiel » qui allait ressouder les liens brisés de la société algérienne, et mettre hors d’état de nuire ses détracteurs. Il disait alors, vouloir «restituer à l’Algérien la fierté d’être Algérien ». Ah, la fierté! Quel préjudice pour un peuple que de la perdre, surtout après l’avoir si chèrement payée comme ce fut le cas de notre peuple. La recouvrer, fut sa grande promesse de président à un peuple à blessé et à genoux! Une promesse hélas vite rompue, car dans les faits, l’homme « providentiel » n’était qu’un leurre et le peuple algérien comprend à ses dépens que son régime ne fera que prolonger le drame du pays, et poursuivre la mise en berne du peu qui restait des symboles de la fierté nationale.

     

    D’un mandat à l’autre, la mal-vie s’amplifie et la corruption aussi

     

    Durant les 2 premiers mandats sensés guérir la République, le régime a répandu à la grandeur du pays la pandémie de l’irresponsabilité et de la corruption, exilant ou décapitant, au passage, les plus brillants de nos esprits, au profit de la culture de la peur, de la médiocrité et de l’« aplat-ventrisme » si chers aux dictatures vieillissantes. Quant à l’image respectable de l’Algérie, il n’y a qu’au bal annuel des ministres que cette Algérie virtuelle fait surface, le temps d’une rencontre. Elle n’a rien à voir avec la jungle qu’est devenue l’Algérie, celle du « citoyen lambda », où le droit et la justice sont décrétés hors-la-loi. C’est le pays d’un peuple dépouillé et maltraité par ses gouvernants. Un peuple mal éduqué, mal logé et mal soigné, tandis que les responsables et leurs familles dilapident ses richesses et jouissent des bienfaits des systèmes de santé et d’éducation des pays développés.

     

    L’Algérie réelle ne figure pas dans les bilans complaisants et autres statistiques biaisées exhibés par les ministres, avec la double bénédiction d’une presse muselée ou complice et des « élus » grassement corrompus par le trésor public.

     

    Le seul bilan, qui reflète cette Algérie subie au quotidien fait état :

     

    - de la mal vie et du désarroi des gens,
    - de la faillite de nos services publics,
    - du désastre de notre économie et de notre environnement,
    - de la piètre qualité de nos universités, qui ne rivalisent même plus avec les pays pauvres d’Afrique,
    - du délabrement de notre système de santé,
    - de l’indigence de notre éducation,
    - de la fuite de nos richesses matérielles et humaines,
    - de nos enfants qui se jettent à la mer pour échapper à leur prison,
    - et pour couronner le tout, de la corruption généralisée par votre régime couvert indûment du plus fabuleux trésor que le pays n’ait jamais possédé.

     

    Voilà où en est l’Algérie qui débourse des fortunes pour être tournée en dérision par ses propres gouvernants. Sinon, comment peut-on si mal faire avec autant de richesses et ne jamais rendre des comptes?

     

    Des promesses qui finissent en mépris

     

    Après la terrible guerre fratricide, les discours du président et ses couffins bondés de promesses ont eu l’effet d’un baume sur le cœur, le temps d’un répit, pour des populations meurtries qui n’en espéraient pas moins de vous : la paix pour une Algérie enferrée à la violence, la justice pour un peuple tyrannisé, une vie décente pour les millions de victimes de la « hogra » érigée en norme nationale, et enfin, de l’espoir pour la jeunesse désespérée. Mais rien de tout cela ne sera au rendez-vous ni du 1er, ni du 2e et assurément pas du 3e mandat, que le président s’est octroyé contre tout bon sens, en violant la constitution, au lieu d’instaurer la première base d’une bonne gouvernance qui mette le pays sur la voie démocratique.

     

    Berné encore une fois, le peuple se retrouve inutile et ballotté entre d’une part, un pouvoir répressif, imbu de la puissance des pétrodollars, qui peut tout acheter, et d’autre part une élite plus souvent qu’autrement intéressée, complice et/ou indifférente, ainsi qu’une opposition pour le moins phagocytée. Le délabrement des valeurs est tel dans le pays que la classe dirigeante, chapeautée par M. Bouteflika, ne s’encombre plus de scrupules et verse ouvertement dans un rôle de prédateur des richesses nationales, qu’elle se partage copieusement avec un tout-venant de multinationales, et autres spéculateurs internationaux, bien au fait de sa corruption. Et bien sûr, seul le peuple algérien en fait les frais, dans le silence assourdissant de ses « élites ».

     

    De pareilles attitudes au plus haut niveau de l’État portent atteinte à la dignité de notre pays et dévalorisent le peuple aux yeux de ses partenaires. Comment, dès lors, prétendre à la défense des intérêts suprêmes de la nation? Impossible, notre réalité est là pour en témoigner. Qui peut comprendre qu’un pays comme l’Algérie manque de pomme de terre! C’est une insulte à notre mémoire et à notre histoire. Ce n’est pourtant qu’une des multiples aberrations que vivent les Algériens. N’importe qui ferait mieux avec un aussi fabuleux butin que celui de l’Algérie. Qui peut comprendre l’interdiction faite à un peuple de créer ses propres télévisions alors qu’il a accès à celles des autres, qu’importe le contenu? Qui peut comprendre qu’un pays comme l’Algérie devienne aussi dépendant de l’étranger puisqu’il est le plus gros importateur de produits alimentaires en Afrique?

     

    C’est bien plus que de la négligence, on n’est pas loin de la trahison, pourtant personne ne semble concerné pour s’insurger sérieusement, sans doute convaincu, que l’impunité est la marque du pouvoir, comme le montrent les nombreux scandales d’atteinte aux intérêts supérieurs de la nation. Bien que rapportés régulièrement par la presse, ils ne reçoivent jamais de traitement adéquat puisque les concernés sont visiblement au-dessus des lois. Quelles conséquences désastreuses sur le comportement collectif. Ne dit-on pas que le meilleur enseignement se communique par l’exemple. Et tout comme la corruption, on conclut aisément que le régime communique par les mauvais exemples.

     

    Dans la foulée des révoltes de janvier 2011 et la chute de Benali qui avait produit un séisme au sein de tous les régimes totalitaires de la région, les Algériens ont cru que leurs dirigeants prendraient conscience de leur désastreuse gouvernance et agiraient en conséquence. Ce n’était qu’un rêve, le régime n’a pas hésité à faire preuve de mépris en ignorant les revendications démocratiques, suivant sa propre feuille de route. Les réformes promises aux Algériens durant la période de trouble par un régime « paniquant » se sont révélées vides de sens, sans le moindre impact sur la vie sociale et politique du pays. Après la mascarade d’élections pour un parlement artificiel d’aucune utilité pour le pays et la création d’une flopée de nouveaux partis qui ajoutent à la confusion et aident à couvrir le régime, le peuple se retrouve encore une fois, dépouillé de ses droits, à la veille du 58e anniversaire de sa Révolution pour l’indépendance et l’état de droit.

     

    Le changement n’a de sens que dans la disparition du pouvoir actuel

     

    Aujourd’hui, tout un chacun sait que le changement politique en Algérie n’est plus qu’une question de temps. On se demande si sursaut il y aura jamais chez la classe politique. Alors que les Algériens s’interrogent angoissés où va leur pays et qu’un concert de voix s’accordent pour dire la gravité de la situation, le régime fidèle à lui-même, ne démord pas de sa fuite en avant, et semble tout à fait imperméable au désarroi des populations, des jeunes en particulier, qu’il se contente d’arroser de quelques miettes du butin des pétrodollars. Nous savons tous que l’histoire, c’est comme la vie, elle ne revient pas en arrière. Et notre crainte, en tant que peuple, est que cette histoire s’écrive, encore une fois, à notre insu. Au moment où l’impuissance se fait sentir, on se prend à rêver d’un sursaut patriotique collectif qui sauvera l’Algérie de ses détracteurs internes et externes. N’est-ce pas, la dernière chance pour les compatriotes qui ont à cœur les intérêts de la nation de mettre fin au système politique perverti qui a fait table rase des valeurs universelles et livré le pays au pillage et à l’anarchie, sous la gouverne de M. Bouteflika. Serions-nous capable, en tant que peuple, longtemps cadenassé par l’ignorance et la misère de nous affranchir enfin de la tutelle abusive des fossoyeurs de notre liberté. Nous sommes jeunes, riches et apte à écrire une nouvelle page de notre histoire, sans aucune mainmise de ceux, que l’âge, l’incompétence et l’usure du pouvoir, ont transformé en force de nuisance pour l’intérêt général. Si l’heure est grave, comme l’observent de nombreux experts, notamment à cause du contexte international, c’est aussi l’occasion pour nous Algériens de nous réapproprier nos espaces de liberté, notre histoire usurpée pour mieux affronter les défis qui se posent à notre pays, à commencer par sortir l’Algérie indemne et unie de ce régime. Qui réussira le pari de coordonner tous les appels au changement pacifique pour donner vie à la citoyenneté algérienne? Indice : Écriture d’un chapitre glorieux pour l’histoire des générations futures, en référence au chapitre du 1er novembre 1954, écrit par nos parents. L’épreuve commence ce 1er novembre 2012 et nul algérien-ne ne doit se sentir inutile, impuissant.

  • La France en Afrique De la mission civilisatrice à la guerre des civilisations


    Omar Benderra,


    Ceux qui s’interrogent sur la nature des relations franco-africaines obtiennent aujourd’hui une réponse aussi claire que consternante : la France bombarde en Libye et en Côte d’Ivoire. Sous couverture de l’ONU, certes, mais l’État français est en première ligne, les armes à la main dans des conflits africains. Pour les meilleures raisons du monde : il s’agit ici de protéger des civils contre les troupes du colonel Kadhafi et là de permettre au vainqueur des élections présidentielles de prendre les rênes du pouvoir. Dans le discours officiel, la guerre est fondée sur le droit, la justice et la raison. La tradition est respectée : les aventures militaires occidentales sont toujours menées au nom des plus hautes valeurs civilisées. Les agressions sont légitimées par des discours de circonstances qui révèlent rapidement leur manque de substance quand il ne s’agit pas de mensonges purs et simples. De l’affaire du coup d’éventail prélude à la colonisation de l’Algérie aux armes de destruction massives pour envahir l’Irak, les prétextes sont innombrables.

    L’intervention en Libye a été précédée d’une gestion médiatique jouant sur tous les registres de l’émotion : l’armée sanguinaire d’un dictateur fou aurait écrasé avec une brutalité inouïe des contestataires pacifiques. Ainsi l’opinion est « informée » que des avions de combat auraient été utilisés pour réprimer des manifestations et selon un opposant libyen, qui a entretemps disparu des écrans, il y aurait eu près de 6 000 morts dès les premiers jours de troubles. Aucune preuve n’est venue étayer ces graves accusations. Il faut souligner ici l’intéressante concordance de traitement de l’actualité libyenne par les médias lourds franco-britanniques et les chaines satellitaires arabes, Al Jazeera notamment, qui ont relayé, sans grandes nuances, un discours univoque et préparé l’opinion à l’intervention armée. Dans un climat très « émotionnel », la France a joué un rôle essentiel dans l’adoption de la résolution 1973 du Conseil de Sécurité des Nations unies qui consacre clairement le droit d’ingérence. Pour les spin-doctors parisiens, il s’agissait de démontrer que la France volait au secours d’un peuple arabe privé de droits et militairement menacé. L’opération est tellement grossière qu’elle en est une insulte au bon sens.
    La France, amie de tous les autocrates

    Ceux qui conduisent l’État français, qu’ils se réclament de la droite ou de la gauche, ont systématiquement soutenu les pires dictatures arabes et ont couvert des crimes gravissimes et généralisés contre l’humanité perpétrés par ces régimes. Les appréciations flatteuses sur la qualité de la gestion économique et sur la détermination des dictateurs à lutter contre « l’islamisme » constituent une part importante du discours français en direction du monde arabe. Au nom d’un réalisme sans principes et d’une politique sans éthique, la démocratie française est l’amie des tyrannies et un adversaire résolu des forces démocratiques et des oppositions dans le monde arabe. Est-il besoin de rappeler l’accueil réservé au dictateur libyen lors de son séjour parisien en décembre 2007 ? Le président Sarkozy avait publiquement déclaré son bonheur de recevoir un tyran avec tous les égards protocolaires et tous les fastes de la République. Est-il besoin de rappeler que Hosni Moubarak, dictateur égyptien, était le vice-président de l’Union pour la Méditerranée et que Tunis, alors capitale du despote Zine el Abidine Ben Ali, devait un moment accueillir le siège de cette improbable organisation voulue par Nicolas Sarkozy ? L’image de la France dans le monde arabe est à peine meilleure que celle des États-Unis, ce qui n’est pas peu dire. Le ci-devant pays des droits de l’Homme est celui où l’islamophobie décomplexée et le discours raciste anti-arabe constituent une des bases principales du consensus politico-médiatique des élites de pouvoir. Les faux-débats de diversion sur la laïcité et l’Islam ne trompent que ceux qui subissent passivement le matraquage médiatique de médias aux ordres de l’exécutif français. Est-il possible de modifier favorablement une image aussi profondément dégradée sur le dos du peuple libyen ? On peut légitimement en douter. D’autant qu’au fil des bombardements, il apparaît clairement que la situation en Libye est loin de correspondre au manichéisme simpliste que diffusent les propagandistes du néoconservatisme « à la française ». Il faut observer que les opinions au Maghreb ont changé avec l’évolution de la crise en Libye. D’une franche sympathie pour l’insurrection contre le régime de Kadhafi, l’opinion maghrébine est désormais beaucoup plus réservée du fait de l’entrée en action des armées occidentales.

    En Côte d’Ivoire, c’est encore sous la couverture des Nations unies que des troupes françaises participent à une guerre civile avec comme toujours les meilleures intentions du monde. Il s’agit dans ce cas d’imposer que le résultat officiel, internationalement admis, de l’élection présidentielle se traduise dans la réalité et qu’Alassane Ouattara remplace Laurent Gbagbo à la tête d’un pays en danger de partition. Mais sur la scène ivoirienne, personne n’est moins qualifié que l’ancienne puissance coloniale pour arbitrer dans un conflit interne. Dans les faits, le France ne se proclame plus seulement en tuteur de ce pays du pré-carré néocolonial, mais prend le risque considérable d’une gestion politique directe d’un État qui est bel et bien ramené à son statut de colonie. Laurent Gbagbo, très proche des socialistes français, mis au ban des nations, est certainement coupable de toutes les dérives, mais cela ne justifie en aucune façon les menées guerrières d’une puissance extracontinentale contre son régime. Cette intrusion est très mal vécue par l’opinion africaine, qui même si elle n’éprouve guère de sympathie pour Laurent Gbagbo, ressent cette ingérence militariste comme une insulte à l’indépendance africaine et le retour de la politique de la canonnière. Pour de nombreux Africains, les équilibres ivoiriens sont fragiles et le résultat, plutôt serré, de l’élection présidentielle aurait dû conduire à une posture plus sage, à la recherche obstinée par tous les moyens de la politique et de la diplomatie d’un modus vivendi.
    Des castes contre les peuples

    L’arrestation de Laurent Gbagbo à laquelle ont – au moins – grandement contribué les forces françaises sous couverture de l’ONU est l’illustration de l’immixtion néocoloniale dans les affaires intérieures d’un pays réputé souverain. Si l’intervention française laissera certainement des traces profondes dans un pays divisé en deux camps d’importance comparable, elle a déjà des conséquences sur la perception du rôle de la France en Afrique. À travers l’Afrique, le silence coupable des leaders politiques ne doit pas faire illusion, une colère sourde est perceptible. Les déclarations méprisantes prononcées par le président français à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar en juillet 2007 sont le commentaire le plus approprié au déploiement des blindés et des hélicoptères français sur le sol africain. Si la guerre des civilisations a succédé à la mission civilisatrice, les discours et les méthodes ont à peine changé.

    Gbagbo et Kadhafi ne sont ni Lumumba ni Nasser. Ces autocrates vulgaires sont, au premier chef, responsables de la dévastation de leur pays, responsables des guerres civiles et responsables de l’intervention étrangère. Mais rien ne laisse supposer que leurs opposants leur soient supérieurs. Et c’est à ce niveau que se situent la matrice des convulsions africaines et l’alibi au néocolonialisme. De fait, le retour militaire de la France sur le continent martyr est avant tout l’expression de l’échec catastrophique des dirigeants politiques africains. Les hommes de pouvoir, en Libye, en Côte d’Ivoire, comme presque partout ailleurs en Afrique, assument l’échec de la décolonisation. La corruption et le pillage des ressources sont la caractéristique commune d’anti-élites civiles ou militaires affiliées aux réseaux d’affaires et aux groupes d’intérêts dans les anciennes métropoles. L’action continue de ces castes de pouvoir a précipité l’affaiblissement des États et à conduit à la destruction des sociétés gérées par la violence et la privation des libertés, plongées dans la misère et l’analphabétisme.
    Le néocolonialisme « humanitaire »

    Les interventions françaises répondent aux objectifs à moyen et long terme de ces groupes d’intérêts. En Libye comme en Côte d’Ivoire, il s’agit de conforter ou d’établir une présence dans des pays riches et qui ouvrent sur des régions stratégiques. Que ce soit l’Afrique de l’Ouest ou le Sahel, les régions visées sont à très fort potentiel minier dans la perspective d’une concurrence mondiale exacerbée pour le contrôle de ressources fossiles et minérales en raréfaction.

    Sur ces deux champs de bataille, les organisations régionales, la Ligue arabe et l’Union africaine, ont fait l’éclatante démonstration de leur impuissance, ou plus gravement dans le cas de la Ligue arabe, de faux nez au service des Occidentaux. Quant à l’ONU, réduite à son conseil de Sécurité dominé par les Américains et leurs alliés, elle est le centre suprême de légitimation du bellicisme occidental. La résolution 1973 est un modèle du genre : partie d’une zone d’exclusion aérienne, elle a abouti à un feu vert pour des bombardements généralisés sur les troupes de Kadhafi. L’interdiction d’envoi de troupes au sol – concession à des opinions occidentales qui ne souhaitent plus voir de corps expéditionnaires après l’Irak et l’Afghanistan – est en voie d’être contournée par le recours à des sociétés de guerres privées, du type Blackwater.

    Ainsi, ce bellicisme bien-pensant ouvre un vaste champ d’incertitudes et de périls. Au prétexte de voler au secours de la démocratie et du droit, le néocolonialisme aux habits neufs de l’humanitaire et de l’hégémonie néolibérale renaît sur les cendres des indépendances confisquées. Pour l’État français, le retour des vieux démons néocoloniaux n’est certainement pas le signe d’une relation renouvelée avec l’Afrique ou avec le monde arabe. Quant à ceux qui doivent leur accession au pouvoir par la force d’armes étrangères, ils doivent savoir qu’ils ont dénaturé leur combat politique et qu’ils devront assumer, sous une forme ou une autre, cette tare originelle et le déficit de légitimité qu’elle induit.