vu premier abord, vus de Google Earth, rien ne différencie ces deux «villages» voisins, affalés l’un et l’autre sur le bord de mer, mangeant du soleil iodé dans la banlieue ouest d’Alger. Pourtant, à quelques mètres de l’un de l’autre, ce sont deux mondes parallèles séparés par une solide limite administrative de souveraineté. Le régime du droit commun pour l’un, le royaume de l’impunité pour l’autre, avec adoubement consanguin par carte d’accès. A Zéralda, le maire, qui a eu la mauvaise idée de tenter de monter un syndicat des maires d’Algérie et d’avoir relevé plusieurs malversations dans la gestion de la commune, s’est retrouvé en prison pour avoir demandé à ce que l’on mette des intouchables en prison. Plainte sur plainte contre des abus liés à la corruption, la justice n’a jamais daigné bouger. Il a pourtant suffi de quelques plaintes de ceux-là mêmes dont il s’est plaint, pour que la justice se lève comme un jet-ski sur la mer calme et incarcère le maire.
Bien sûr, on ne sait pas tout de cette affaire, mais l’on sait déjà qu’un système ne change pas, surtout quand il promet de le faire. Il se régénère, ouvre quelques soupapes, change des pièces, paye plus de gens, mais ne touche pas à sa nature. Ceux qui ont emprisonné le maire de Zéralda font tous partie du même organisme vorace, liés par la seule nécessité biologique de (bien) vivre, en étant prêts à exterminer toute bactérie extérieure non recommandée. Dans cette affaire, il apparaît que le procureur est le cousin du plaignant, le corrompu le frère du voleur, l’impuni le beau-frère du suspect, le wali ami du Club des Pins et le juge notaire de la grande famille. On pourrait croire à la réforme de la justice promise par Belaïz, ou à celle de l’Etat promise par Bouteflika. On préfère aller nager parce qu’il fait très chaud. Mais à Zéralda, en hommage au maire qui est descendu sur la plage en oubliant son parasol.