Les activités africaines de l’opérateur émirati, DP World, pourraient être affectées par la restructuration de sa maison mère.
La nouvelle a surpris plus d’un analyste. Dubai World, le fonds souverain de Dubaï, envisage de vendre ses meilleurs actifs, pour un montant qui pourrait atteindre 15,3 milliards d’euros. Il faut dire que son endettement – 31 milliards d’euros – dépasse toutes les estimations communiquées fin 2009.
Il pourrait céder notamment Dubai Port World (DP World), dont il détient 77 % du capital et qui, jusque-là, faisait figure de joyau intouchable. Véritable cash machine, l’opérateur portuaire a bien résisté à la crise : son chiffre d’affaires affiche une hausse de 10 % au premier semestre 2010 (1,2 milliard d’euros), pour un profit net de 168 millions d’euros (+ 17 %).
Rassurer les créanciers
Présent dans 31 pays avec 50 terminaux, DP World a en une décennie connu une croissance importante, au point d’occuper aujourd’hui la troisième position mondiale (6,7 % de part de marché), derrière le singapourien PSA International (9,5 %) et le groupe Hutchison Port Holdings (6,8 %), coté à Hong Kong. En janvier, son PDG, Mohammad Sharaf, assurait que la compagnie présentait « une situation financière solide et assez de trésorerie pour poursuivre son développement ». Personne n’imaginait alors que la situation de la maison mère pourrait contrarier ses projets.
Pour certains observateurs, l’annonce faite par Dubai World ne serait qu’une manœuvre destinée à rassurer ses créanciers. Planifiée pour 2016, la vente de DP World serait abandonnée si le fonds souverain parvenait entre-temps à rétablir son équilibre. « Dans le pire des scénarios, il conservera la majorité du capital », prédit un analyste basé à Dubaï, cité par Reuters. Une option que privilégie aussi Bara Sady, patron du Port automne de Dakar (PAD), exploité depuis 2008 par DP World.
Cependant, d’autres experts du transport maritime envisagent une « vente par appartements » des ports que gère le groupe. Si celle-ci ne concernerait pas le hub dubaïote, les ports africains pourraient en faire les frais, notamment parce qu’ils présentent des volumes encore modestes mais réclament des investissements importants pour se développer.
Sur le continent, la compagnie s’est implantée dans cinq pays : à Djibouti en 2000, puis, à partir de 2006, en Égypte (Sokhna), au Mozambique (Maputo), au Sénégal (Dakar) et en Algérie (Alger et Djen-Djen). « DP World a su, par son identité et sa capacité financière, aller chercher des marchés difficiles dans les pays émergents », explique Paul Tourret, directeur de l’Institut supérieur d’économie maritime.
Quel repreneur ?
Pour la reprise des activités africaines de DP World, « Bolloré fait figure de favori, sauf en Algérie, où le contexte politique est compliqué », estime un opérateur présent en Afrique centrale. « Nous n’avons aucun contact avec DP World, précise Olivier de Noray, directeur ports et terminaux de Bolloré. Une telle discussion ne pourrait avoir lieu sans l’accord des pays concernés. » Les compagnies maritimes (Maersk, MSC…) pourraient aussi être intéressées, même si la crise a beaucoup réduit leurs capacités d’investissement.
À Dakar, l’annonce du possible retrait de DP World jette le trouble sur une collaboration avec le PAD, jusqu’alors présentée comme idyllique. « DP World a respecté tous ses engagements », assure Bara Sady. Reste à mesurer l’effet de l’annonce de Dubai World sur la stratégie du gestionnaire portuaire. En 2012, celui-ci doit livrer un nouveau terminal dont le coût est évalué à 390 millions d’euros.
Même incertitude en Algérie où, fin 2008, il avait annoncé 83 millions d’euros d’investissement dans les quatre ans. Enfin, à Djibouti, l’inquiétude est double : elle porte sur le port mais aussi sur la zone franche attenante, dont la gestion a été confiée à Jafza, une autre filiale de Dubai World menacée de cession.
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