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géopolitique

  • Populisme et géopolitique

     

     

    Par : Mustapha Hammouche

    Comme à chaque sanglante opportunité qui prend forme dans notre voisinage, “experts” et “professeurs de sciences politiques” viennent se prêter aux sollicitations des journalistes, pour mieux nous “éclairer” sur les origines de ces évènements et sur leur impact sur notre pays. Or, toutes leurs interventions se caractérisent par un handicap populiste fondateur. Le résultat en est que nos cérébraux disent, en substance, la même chose que l’analyste de quartier, le politicien de comptoir ou le prêcheur de bureau. Ils “intellectualisent” le discours unique.
    Le Mali vient de motiver une nouvelle occasion de vérifier la convergence entre l’exposé scientifique et le discours vulgaire quand il s’agit, pour nous, de décrire notre environnement géopolitique.
    On ne peut, bien sûr, se reprocher de mettre son pays au centre du monde ; c’est même le point de départ de l’effort de réflexion géopolitique. Mais, le travers dont le stratège doit se prémunir est celui de se murer dans l’hypothèse de nature chauvine, qui voudrait que tout ce qui ne vient pas de nous soit malintentionné et dangereux pour notre pays. On passe, là, de la posture méfiante habile à la posture nihiliste irrationnelle.
    Dans le cas de l’intervention de l’armée française au Mali, la problématique paraît pourtant simple : un pays souverain fait appel à un autre, plus puissant, pour repousser une invasion islamiste terroriste qu’il ne peut pas refouler par ses propres moyens. La puissance en question répond alors favorablement, et efficacement, à cette demande. Peut-être celle-ci arrive-t-elle avec ses propres arrière-pensées géostratégiques. Mais cela diminue-t-il l’intérêt universel à voir éliminer des hordes de terroristes ?
    Pourquoi donc devrions-nous être émus par le viol de la souveraineté malienne par l’armée d’un État occidental tout en restant indifférents à ce que cette souveraineté ait été foulée au pied par des armées de terroristes ?  Parce qu’ils sont de chez nous ?
    Pour justifier leur confortable adaptation populiste, nos intellectuels éclaireurs vont jusqu’à renier le péril intégriste né de l’offensive islamiste sur Mopti. “Ils ont été poussés à dépasser la ligne de démarcation entre le Sud et le Nord pour donner l’occasion à la France d’intervenir”, disait l’un d’eux, hier, au Soir d’Algérie. Mais qui les aurait donc obligés à ce geste insensé, les pôvres ? Que ne restèrent-ils donc, intouchables, à sévir en deçà de Mopti ?
    Mieux, celui-ci suggère que la France n’aurait pas dû répondre à l’appel d’un gouvernement illégitime car, ajoutait-il, “il est important de rappeler que l’actuel gouvernement est arrivé au pouvoir suite à un coup d’État”. Ô ironie ! Si l’on devait attendre que les gouvernements africains soient démocratiquement légitimés, il faudra patienter longtemps avant de pouvoir transiger avec les États de ce continent ! Et, nous sommes plutôt mal placés pour conditionner les relations internationales à la légitimité des gouvernements contractants.
    Le drame est que nos analystes, incapables de s’extraire du discours puisé dans la vulgate nationaliste et anti-impérialiste qui fait fi des périls nés chez nous et de se hisser au niveau scientifique, finissent par se mordre la queue : ils reprochent au pouvoir de ne pas intégrer leurs thèses, celles-là mêmes qu’ils lui ont machinalement empruntées !


    M. H.
    musthammouche@yahoo.fr