Par : Saïd Chekri
Le congrès de l’Organisation nationale des moudjahidine, qui s’ouvre demain, donne au président Bouteflika une nouvelle occasion de revenir à la charge pour tenter de sensibiliser les Algériens quant à “l’importance” de leur participation aux élections législatives du 10 mai prochain. Le chef de l’État vient de rééditer le même appel, formulé quasiment dans les mêmes termes, que ceux qu’il avait lancés le mois dernier, une première fois le 18 février à l’occasion de la Journée du chahid, puis une seconde fois, le 24, lors de la célébration de l’anniversaire de la création de l’UGTA.
S’il s’est gardé cette fois de dresser un parallèle entre le 10 mai 2012 et le 1er Novembre 1954, car il s’adresse à présent aux “enfants de Novembre” qui risqueraient de “ne pas aimer” pareille comparaison, Bouteflika n’a pas manqué de mettre en exergue la particularité de la conjoncture actuelle qui confère, selon lui, un caractère exceptionnel à la prochaine consultation électorale. Laquelle consultation mériterait donc, souligne-t-il en filigrane, la mobilisation des Algériens.
À ses précédents arguments, le chef de l’État en ajoute désormais un nouveau : il est temps de passer “de la légitimité historique à la légitimité constitutionnelle”. 50 ans après, oui, il en est plus que temps. Mais tout l’enjeu est là, dans le facteur temps : n’est-il pas trop tard ?
Un demi-siècle durant, la légitimité historique a rythmé la vie publique et la vie institutionnelle en Algérie, pesant sur tous les dossiers, tous les secteurs, toutes les options et, bien sûr, la distribution de la rente. Au final, elle a produit un système politique honni et décrié, celui-là même qu’un précédent chef de l’État avait qualifié de “pourri”, mais aussi celui-là même à l’ombre duquel sera organisé le scrutin de mai prochain. Bouteflika ne l’a pas dit crûment, mais à l’entendre, c’est au renversement de ce système (Isqat En-nidham) que nous allons assister en cette journée du 10 mai ! Le pari est gros. Il est même trop gros pour prétendre susciter une adhésion massive des Algériens qui, depuis 1988, ont fini par ne plus croire à la promesse de rupture.
Le pari est gros mais cet investissement personnel de Bouteflika pour une opération politique aléatoire lui fait courir un risque encore plus gros : s’il ne convainc pas grand monde à glisser un bulletin dans l’urne le 10 mai prochain, le flop sera le sien. Or, en politique, un flop, ça se paie cash. En principe.