Le Soir d'Algérie,
La compagnie pétrolière British Petroleum va exploiter les gaz non-conventionnels au niveau du bassin d’Illizi, a-t- on appris de source bien informée. Tout est fin prêt pour entamer les forages, mais la compagnie britannique préfère attendre l’adoption du projet d’amendement de la loi sur les hydrocarbures afin de bénéficier des avantages fiscaux contenus dans ce texte pour les sociétés qui investissent dans les gaz de schiste.
Selon nos sources, les premiers puits de gaz non-conventionnels seront exploités au niveau de Bourarhet, au sud d’In Amenas où BP opère déjà avec la Sonatrach.
Un intérêt stratégique
Les informations recueillies sur ce gisement font état d’une forte présence de «tight gas», assez proche d'un gaz conventionnel. On évoque la quantité de 50 tfc, soit l’équivalent des réserves actuelles de Hassi R’mel. Le tight gas est difficile à extraire en raison du fait que la roche qui le contient est très peu perméable. De même que la cimentation qui entoure les réservoirs est difficile à fracturer. Selon nos sources, des tests ont déjà été effectués sur ce gisement de Bourarhet et des difficultés énormes ont été rencontrées, non pas en raison des techniques de forage, mais plutôt à cause de la mauvaise prestation assurée alors (par une entreprise américaine) sur les services aux puits et à la nature de la fracturation. Mais, en dépit de toutes ces difficultés, le partenaire de BP, le norvégien Statoil, demeure très confiant et confirme par ailleurs dans un rapport récent les tests réalisés en Algérie : «Le nouveau flux de travail a été utilisé dans une étude sur le site de Tiguentourine dans le Sud-est algérien. Il s’agit d’un champ étanche aux gaz, exploité par une joint-venture entre Sonatrach, BP et Statoil. » Depuis 1995, BP aura été le plus grand investisseur étranger dans le secteur des hydrocarbures en Algérie avec plus de 5 milliards de dollars. La société est présente avec Sonatrach et Statoil dans le gisement d’In Salah (BP 33,15%) et In Amenas (BP 45,89%). En outre, elle est associée à hauteur de 60% dans le projet pétrolier de Rhourde El Baguel au sud de Hassi Messaoud, où elle a réalisé de belles performances. Seulement, certains investissements commencent à se rapprocher de leurs limites en raison de la baisse des produits extraits. Et BP devait penser à la reconversion de son activité en gardant pratiquement le même potentiel matériel. Dans cette démarche, la british a anticipé sur les gaz de schiste sans pour autant attirer l’attention sur cette opération. Dans le rapport d’activité de BP pour l’exercice 2011, il est clairement mentionné que la société mène des activités sur les gaz non-conventionnels en Algérie. «BP poursuit l’activité sur les gaz non-conventionnels aux États-Unis et dans d'autres pays tels que l'Algérie, à Oman et en Indonésie», a-t-on écrit dans ce rapport. BP ne donne pas de chiffres sur les volumes estimés ni encore moins sur les zones prospectées. Certaines sources expliquent que le choix de Bourarhet est judicieux à plus d’un titre. BP dispose déjà d’une infrastructure adéquate dans la région et du fait qu’il se trouve à proximité de la frontière avec la Libye, la société peut faire appel à ses experts qui opèrent au sud de Ghedames. Par ailleurs, la commercialisation des gaz ne devrait pas poser de problèmes d’investissement, car le gazoduc est déjà opérationnel. Mais cette exploitation reste aujourd’hui tributaire de la loi sur les hydrocarbures qui promet des avantages fiscaux aux sociétés étrangères qui viennent investir dans les gaz non-conventionnels. Et BP devra donc attendre l’adoption de cette loi pour pouvoir s’engager sur l’investissement en question.
Schlumberger garde le secret
Les recherches effectuées en Algérie sur les gaz non-conventionnels semblent relever du secret. Devant le mutisme de Sonatrach et de sa tutelle, les sociétés étrangères opérant en Algérie ne communiquent jamais sur les gaz de schiste. Et c’est un ancien cadre de Schlumberger, à travers le dépôt d’un CV au niveau d’une compagnie pétrolière, qui va révéler avoir travaillé avec Schlumberger sur les gaz non-conventionnels sur le projet de Tidikelt, au sud d’In Salah. Sonatrach a en fait dissimulé toute son activité sur les gaz non-conventionnels pour des raisons évidentes d’appréhensions liées à l’environnement. Car jusqu’à ce jour, les débats sur l’exploitation de ces gaz n’ont pas été abordés sur le fond. Et ce n’est pas un séminaire de deux jours qui est en mesure de tracer la stratégie du pays en la matière. D’ailleurs, à l’examen du programme moyen terme (PMT) 2012-2016, la Sonatrach n’a pas fait d’exposés sur le cas des gaz non-conventionnels. Dans la seule phrase évoquant le sujet de Bourarhet, il est écrit dans le document de la Sonatrach (PMT) : «L’effort d’exploration en partenariat se poursuivra pour les contrats conclus sous le régime de la loi 86-14 jusqu’en 2012, date d’arrivée à échéance de ces contrats, et concernera le forage de 2 puits en 2012 au niveau de Bourarhet Sud opéré par BP.»
Mokhtar Benzaki