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  • Le délire Stalinien de Toufik

     

    Aéroport Houari Boumediene ; c’est le début de l’après midi et c’est l’arrivée du vol Lyon-Alger en ce dix-huitième jour de jeûne du mois de ramadhan qui coïncide avec le 18 Aout 2011. A peine les formalités de frontière accomplies, pour lui-même et pour son fils, qu’il est brusquement appréhendé par un groupe de quatre hommes qui se présentent à lui comme des officiers du DRS et lui signifient son arrestation et le somment de les suivre dans le calme. La surprise est totale pour sa sœur qui vient l’attendre ainsi que deux autres membres de sa famille qui travaillent en sous-douane à l’aéroport et qui assistent hébétés à cette scène tirée d’un mauvais cauchemar. Le long silence du premier choque est brisé soudainement par les pleurs du petit Anes qui ne comprend pas pourquoi son père est molesté avec autant de violence. Il en est séparé sans que l’on lui explique ce qu’il a fait, lui qui est venu passer les derniers jours du ramadhan avec son grand père âgé de plus de 90 ans.

     

    Bachir Belharchaoui qui quitte le DRS en 1993, officiellement pour cause de maladie, vient d’être séquestré par les pires criminels que l’Algérie ait jamais connu; le groupe du sinistre colonel Haddad Abdelkader dit Nacer El-Djen et son binôme le colonel Brahimi Louanes dit Mourad. Les membres de la famille présents sur place tentent tant bien que mal de s’interposer mais très vite un déluge d’injures, de coups et de menaces s’abat sur eux. Bachir disparait rapidement sans que personne n’ait le temps de réaliser ce qui vient de se passer !

     

    Bachir Belharchaoui est conduit à Hydra dans les locaux de la DCPJ/SA (Direction Centrale de la Police Judiciaire/Sécurité de l’Armée) commandée par le général Mohamed Hadjar. Il faut savoir que depuis la fermeture officielle du CPMI de Benaknoun en 2004, les officiers de recherches et d’investigations se déplacent vers la DCPJ/SA pour interroger les personnes arrêtées ; en fait un subterfuge administratif pour effacer les traces ! Pendant dix jours, Bachir subit les pires atrocités de jour comme de nuit et ce n’est que le 29 Aout qu’il est présenté au tribunal militaire de Blida dans un état grave ; il ne peut même pas se dresser correctement, ni se déplacer à causes des tortures subites. Son frère ne le reconnait plus et distingue à peine le restant des traits de son visage tellement il est tuméfié de partout ; le spectacle et si insoutenable que le vieux père aussi présent perd connaissance à la vue de son fils !

     

    Ca se passe en Algérie vingt ans après le coup d’état ! C’est dire que rien n’a changé et que l’Etat de droit ce n’est pas pour demain. C’est toujours les mêmes qui torturent, les mêmes qui donnent les ordres, les mêmes qui profitent du système et les mêmes qui subissent!

     

     

    Le séisme de janvier 1992

    Beaucoup de choses ont été écrites sur le séisme de janvier 1992 que certains qualifient de coup d'Etat, d’autres d'arrêt de processus démocratique et d'autres même de recolonisation de l'Algérie! Ce qui est une réalité, c'est que le onze janvier 1992 a été tout cela à la fois et beaucoup d’autres choses encore qui ont au final conduit à la ruine du pays sur tous les plans. Avec le recul et en décortiquant les événements qui se sont enchainés, on se rend compte que ce qui s’est passé en ce mois de janvier 92, n'a pas été un acte spontané prit dans un moment de panique et de précipitation par des personnes écervelées; c'est absolument le contraire. Ce n'est qu'après une préparation minutieuse que les DAF (déserteurs de l’armée française), suivant une stratégie prédéfinie, sont passés à l'action avec des objectifs, des moyens et des pertes évaluées bien à l'avance. Bien qu'en réalité les pertes humaines n’aient jamais été un souci pour le commandement de l'aveu même de Khaled Nezar et son aide Gaid Salah ; Ce dernier répétera en toute arrogance à ses hommes, lors d'une réunion de commandement au siège du commandement du CFT/ Ain Naaja, que s'il fallait changer de peuple, ils le feront sans aucune hésitation donnant le ton de la répression!

     

    La confrontation des Algériens pleins d’enthousiasme, d’inexpérience et même souvent d’impatience avec les réalités d’une indépendance inachevée est terriblement douloureuse et laisse un arrière goût amer qui ne passe pas. Les vieux démons ne sont pas loin et infligent un rappel à l’ordre sévèrement douloureux que les Algériens payent de leur sang. En matière de géostratégie et de sécurité régionale, l’Algérie reste un tabou pour ses voisins du nord qui se sont immédiatement mobilisés pour soutenir des rejetons qui comme des asticots ont rongé l’Algérie. Une ironie de l’histoire ; ces DAF en manque de paternité rappellent avec difficultés un colosse de la guerre de libération pour présider le pays et en 166 jours, Mohamed Boudiaf suscite avec des discours francs, directs et sans détour une lueur d’espoir mais ébranle en contre partie ceux qui l’ont ramené. Ce chaoui à la fois têtu et simple, déterminé et flexible, s’adresse aux Algériens en Algérien et leur apporte miraculeusement de l’espoir qui fait défaut à une population apeurée par un futur obscur et une barbarie annoncée dont tout le monde parle et redoute. Boudiaf connait les lignes rouges préétablies, mais les craintes des premiers instants cèdent vite la place au courage du nationaliste dans le reflexe inné du baroudeur d’antan. Il a lu dans les visages des Algériens la soif de justice, d’égalité, de quiétude et de fierté!

     

    Jamais un président n’a suscité autant de respect et d’admiration, ni autant d’espoir et d’enthousiasme en si peu de temps et jamais la fracture entre le régime opaque, capable du pire pour subsister, et un peuple qui sert de décore, n’a été aussi large que le jour de l’assassinat de cet homme hors du commun. Le 29 juin 1992, un pilier de l’histoire algérienne s’écroule en direct, sous les yeux des Algériens qui suivent ses moindres faits et gestes avec minutie. Peu de temps après, une autre icône tombe avec la liquidation de Kasdi Merbah et d’autres symboles du nationalisme algérien suivront dans un silence assourdissant. A l’intérieur de l’Armée comme au sein de la société civile, l’escadron de la mort, nouvellement constitué par Toufik, va sévir souvent de nuit pour remplir la sale besogne décidée par le commandement.

     

    Le projet du pouvoir devient peu à peu évident, pour ceux qui ont réussi à garder la tête froide, et trouve toute sa logique dans l’enchainement des événements mois après mois ; année après année. Tout s’emboite parfaitement et les pièces du gigantesque puzzle révèlent les dessous d’un plan bien établi. Les DAF ont ordonnés l’élimination systématique de tous les nationalistes qui les gênent ou qui sont capables de se mettre au travers de leur chemin ou interférer avec leur plan démoniaque visant à détruire le pays.

    Mohamed Liamine Mediene dit Toufik va mettre en scène et réaliser de bout en bout tout les plans des DAF. Pour marquer la vitalité de sa présence au poste qu’il occupe depuis peu, il s’applique avec soin dès les premiers instants du coup d’Etat. Il excelle dans la mise en pratique des stratégies d’actions et veille personnellement au bon déroulement des opérations programmées par les DAF, dans leurs moindres détails. Ses prétentions sans limites, ses frustrations passées vont être les catalyseurs qui lui permettront de franchir sans réserve ni remords toutes les limites.

    La lutte contre le terrorisme n’a été qu’une couverture pour une purification plus profonde, un châtiment infligé à ceux du bas qui ont osé rêver d’un pays de droit. Les DAF leur ont fait subir une guerre sans pitié qui ne dit pas son nom avec des massacres, des charniers, des disparus, des crimes en tous genres….. En un rien de temps l’Algérie est meurtrie, l’Algérie est humiliée, l’Algérie est violée, l’Algérie est déshonorée par Khaled Nezar, Mohamed Touati, Mohamed Mediene….

     

     

    La justice est ailleurs

    La tragédie des années de braises a tout compte fait permis de mettre en évidence une réalité l’Algérie n’a jamais été souveraine avec en son sein une entité transparente mais très présente au somment de tous les appareils de l’Etat à commencer par l’armée, à savoir la secte des DAF. Vingt après, les bourreaux de l'époque restent plus que jamais actifs, comme on le remarque si bien avec la récente mobilisation pour soutenir le général Khaled Nezar où la désignation par Bouteflika du général Mohamed Touati pour organiser et réaliser les changements politiques annoncés. Soucieux de préserver les avantages acquis, les DAF et leurs alliés se sont unifiés en conglomérat constitué d’élites civiles et militaires. Leur point commun c'est que ces personnes ont pleinement profité de la décennie moribonde; alors que des Algériens vulnérables se faisaient massacrer. Ces parasites faisaient des affaires et amassaient des fortunes alors qu'une majorité d'Algériens soumis à la terreur se terraient pour éviter la foudre des sommets diaboliques, une minorité vivait dans l'exubérance et la luxure. Deux Algérie se sont bien distinguées, celle du régime qui est exhibée comme une vitrine pour l'occident et une autre effacée, silencieuse, terrorisée qui cherche tant bien que mal à survivre même au prix de la dignité humaine!

     

    Aujourd’hui Khaled Nezar, contre lequel pèsent de lourdes charges, est poursuivi par la justice helvétique et pour y faire face il n'hésite nullement à faire appel aux mercenaires du régime qui doivent comme à chaque moment critique faire preuve d'allégeance. Les mêmes personnes sont sollicitées pour cette sale besogne, les mêmes tactiques et les même relais sont utilisés deux décennies plus tard. Ce n'est plus 1990 mais tout comme les vieux ogres qui le constituent, le régime s'est effrité en s'auto- infligeant des mutilations profondes par ses propres acteurs. Gaid Salah, un trilingue analphabète qui se retrouve par miracle à la tête de l'ANP; une anomalie surnaturelle et une complexité rajoutée à l'équation du contrôle des forces armée. En effet, c’est le chef du DRS qui prend ainsi les grandes décisions pour toute l’armée puisque c’est l’officier le plus gradé et à grades égales, c’est la compétence qui prime. C’est la première fois que le chef d’un département de la défense devient de prime à bord le chef de l’armée grâce à un subterfuge savamment réfléchi.

     

    Jamais un chef militaire en Algérie n’a eu autant de pouvoir, autant de droit de vie ou de mort sur les autres, autant d’influence sur des générations qui n’ont pas encore vu le jour ; bref autant de prise sur le destin de l’Algérie et son peuple. Par contre cet homme qui pouvait être le sauveur et le faiseur de miracle pour les millions d’Algériens a sombré dans un délire stalinien emportant tout sur son passage. Autant que premier garant de la sécurité de l'Etat, Toufik est doublement responsable de ce qui est arrivé à l’Algérie d'abord en obéissant par cupidité à des traîtres à la nation et en persistant ensuite dans la même lancée pour asseoir son règne.

    la suite:http://www.anp.org/fr/ledeliredeToufik.html

  • Lettre ouverte au général régnant de l’Algérie, Mohamed Médiène : « DRS, dégage ! »

    par Habib Souaïdia, auteur de La Sale Guerre, Algeria-Watch, 5 mars 2011

    Mon général, je veux vous signifier par la présente que votre règne mortifère est à bout de souffle. Que le monde a changé, que la situation politique et sociale de l’Algérie a changé, que les Algériens ont changé depuis 1992. Les Algériens n’ont plus peur de l’épouvantail islamiste que vous brandissez à chaque occasion pour soumettre le peuple. Au cours des vingt ans que vous avez passés à la tête du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), l’Algérie a payé le prix fort du sang et des crimes économiques et sociaux. Vous êtes le principal responsable des maux de notre pays.

    Votre régime de terreur doit prendre fin. Vos jours ont été déjà comptés et vous appartenez désormais au passé. C’est ce qui me permet de vous suggérer de vous rendre à l’évidence et de préparer en douceur votre départ pour éviter un autre bain de sang. Aujourd’hui, vous êtes vieux et malade, vous appartenez à un monde révolu qui n’est plus celui de l’Algérie réelle, celle d’une jeunesse majoritaire et en révolte. C’est pourquoi votre tentative actuelle d’opérer un ravalement de façade de votre système de pouvoir, avec l’aide de pseudo-démocrates, serait un autre crime contre le peuple algérien.

    Il est trop tard pour un « ravalement de façade » de votre régime

    Pour accaparer à votre profit et à celui de vos obligés les richesses du pays, les revenus de son gaz et de son pétrole, vous avez utilisé votre police politique afin de maintenir notre peuple dans la misère et la hogra. Et vous avez fait torturer et tuer des dizaines de milliers d’hommes et de femmes. La gégène et le chiffon sont devenus vos instruments ordinaires de pouvoir, faisant de vos agents autant de criminels – souvent devenus des psychopathes et des névrosés.

    Votre gestion du pays est devenue si désastreuse qu’on peut se demander s’il pourra retrouver un jour ses lettres de noblesse, le respect et sa place éminente dans la sphère des nations. Et si le sort que vous lui préparez n’est pas celui de la Somalie. Vous avez, paraît-il, déclaré à Bouteflika, à Saïd Sadi et à l’ex-Premier ministre Mouloud Hamrouche que « l’Algérie va mal », le DRS ayant fait un sondage auprès du peuple algérien pour mesurer le mécontentement de la rue. Mais les Algériens n’ont pas besoin de sondages du DRS ou de tout autre organe du pouvoir pour connaître leur désarroi. La misère sociale et le sentiment d’injustice s’étalent dans les rues depuis des années. C’est pourquoi les émeutes de janvier 2011 vous ont fait paniquer : plus violentes et massives que celles qui secouent presque quotidiennement le pays depuis dix ans, elles vous ont amené à tenter de « prendre les devants », parce que, en effet, vous risquez gros.

    Il y a trois sortes de généraux dans le monde arabe, selon leur place dans l’appareil de pouvoir. Il y a la version des régimes de Ben Ali ou Moubarak, qui n’ont jamais eu affaire à une révolte de grande ampleur de la rue : pris de panique, ils ont multiplié les discours pour tenter de calmer le peuple et de négocier, avant de vouloir faire sortir l’armée dans la rue pour faire peur – mais ses chefs sont restés en retrait. Et il y a la version Nezzar ou Kadhafi, ceux qui ne parlent pas, mais qui tirent sur la foule à balles réelles quand elle les menace. Vous incarnez sans doute la troisième catégorie, variante perverse de la précédente : après avoir usé de la pire violence, avec votre coup d’État de 1992 et le « fleuve de sang » qui a suivi, vous avez instauré la manipulation et le mensonge pour « gérer le peuple ». Pour tenter de mater le peuple qui bouge, le peuple qui vibre, le peuple qui se révolte, le peuple qui hurle son besoin de démocratie, vous avez organisé le simulacre d’une opposition entre des partis clonés et un président cloné.

    Depuis votre coup d’État de 1992, on ne voit plus le bout du tunnel. Chaque jour apporte son lot de désolations. Rien n’a changé. Pire, on assiste dix-neuf ans plus tard à un reformatage de la vie politique pour remettre en selle des barons qui ont violé l’intimité de ce pays à la place d’un autre déclinant. Mais tenter un ravalement de façade avec un Mouloud Hamrouche, un Saïd Sadi ou un autre, par des manœuvres déjà mille fois vues pendant les années noires ne changera rien à l’aspiration du peuple au changement radical de la République.

    Le peuple algérien ne se contentera pas du départ de Bouteflika, il veut la fin de la police politique qui l’a amené au pouvoir. Et le prétendu bras de fer qui oppose la façade du « pouvoir » algérien incarné par ce dernier à la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNDC) n’est certainement pas la voie pour y parvenir. Certes, au sein de la coordination, il y a des hommes et des femmes qui méritent le respect de tous les Algériens. Mais on pourrait faire remarquer, au regard de sa faible capacité de mobilisation, que cette coordination comprend aussi des éléments visant clairement à tirer vers le bas le mouvement de révolte et qui se distinguent par leur complaisance avec vos desseins.

    Car hélas, vos agents sont partout. Pour vous maintenir au pouvoir, vous avez choisi en effet de vous appuyer sur votre police politique, ciment principal d’une alliance rentière et prédatrice, qui a gangrené tout le système politique algérien. Preuve en est le vide politique créé par une décennie sanglante durant laquelle le DRS, par son entreprise de destruction, a privé le pays de toute expression démocratique.

    L’intolérable impunité des généraux criminels à la tête de l’ANP

    En janvier 1992, une partie du peuple algérien pensait renouer avec l’espoir après le retour du président Boudiaf, puis elle a assisté six mois plus tard à son assassinat en direct. Votre justice aux ordres a ensuite qualifié l’assassinat d’« acte isolé », mais les responsables des services de renseignement chargés de la protection du président ont été promus et mutés vers d’autres unités. Mohamed Boudiaf a payé de sa vie son refus de jouer le jeu de votre mentor, le général Larbi Belkheir. Boudiaf était l’une des figures de la révolution algérienne, mais son histoire ne l’a pas protégé contre vos ambitions : vous avez oublié ce qu’il a été avant, pendant et après la révolution. Puis fut le temps de Liamine Zéroual, un général que vous avez « bricolé » dans vos laboratoires pour en faire un président ; et, encore une fois, cela n’a pas marché. Son mandat s’est achevé avec les massacres de masse de 1997, instrumentalisés par vos services pour le déposer définitivement.

    Mon général, sachez que l’intolérable impunité des « forces de l’ordre » a ébranlé le pays au plus profond de son âme. Car elle dit l’extrême violence, la corruption et le chaos qui règnent dans l’Algérie d’aujourd’hui. Pour mesurer l’ampleur du mal, il faut connaître le niveau d’implication de la nouvelle hiérarchie militaire dans les crimes contre l’humanité commis durent la « sale guerre » des années 1990. Toute la chaîne du commandement militaire actuel est composée de criminels, jusqu’au sommet. De surcroît, chacun « touche » à chaque étage, et chaque fois plus. C’est pourquoi un poste élevé au ministère de la Défense et à l’état-major se vend à celui qui à bien « bossé » dans les unités de « lutte antiterroriste ».

    Cette lutte antiterroriste, qui a transformé progressivement chaque soldat en animal, a aussi transformé des sous-lieutenants et des lieutenants en lieutenants-colonels. Et elle a promu des chefs de section en commandants de régiment, des lieutenants-colonels en généraux-majors, commandants de région militaire ou commandant des forces terrestres. Et à chaque fête nationale, la presse algérienne nous a gavés des noms d’assassins promus à des grades supérieurs – des hommes que mes années de jeune officier en exercice dans les forces spéciales, de 1990 à 1995, m’ont parfois permis de connaître de près.

    L’un de ces militaires, aujourd’hui général-major et commandant des forces terrestres – le second dans la pyramide après Gaïd Salah, chef d’état-major de l’armée – est le général-major Kadour Bendjemil. Cet artilleur, originaire d’Annaba, n’a cessé depuis son arrivée au commandement fin 1993, de se mouler dans le personnage militaire d’un homme qui ne recule devant rien. À l’époque, sa rage purificatrice n’a épargné personne dans son secteur d’intervention de Bouira (le « SOB »). Il a alors constitué une sorte de garde prétorienne composée de quelques officiers et sous-officiers de l’ANP et d’officiers du DRS, pour, d’après ses dires, « rétablir l’ordre » : au hasard des rafles qui avaient lieu, le jour dans les rues, la nuit dans les maisons, de jeunes Algériens étaient entassés dans des fourgons banalisés, enchaînés pour terroriser la foule et montrer comment l’armée traitait ses ennemis. Et beaucoup de soldats, de sous-officiers et d’officiers ont également perdu la vie à cause de la fameuse règle militaire selon laquelle le chef a toujours raison, même s’il a tort.

    D’autres noms ? La liste est longue, mon général, de vos officiers criminels occupant aujourd’hui les plus hauts postes de notre ANP ! Je pourrais en citer, hélas, des dizaines… Comme le général Abdelkader Benzerkhoufa, ex-commandant du 11e RIM, régiment d’infanterie mécanisé stationné entre 1993 et 1997 à La Gare Omar (Bouira). Ou le général Noureddine Hambli, parachutiste commandant du 25e régiment de reconnaissance, l’un des responsables du massacre du 5 octobre 1988 à Alger. Ou encore le général-major Habib Chentouf, aujourd’hui commandant de la 1re région militaire ; le général-major Omar Tlemçani, commandant de la 2e région militaire, ex-commandant du 4e régiment de parachutiste (4e RAP) ; le général-major Amar Athamnia, 3e et 6e région militaire, ex-commandant du 12e régiment de para-commandos (12e RAP) ; le général Maamar Boukhenoufa, commandant du régiment d’infanterie mécanisé stationné à l’époque à Dar El-Beida ; le général Tirech, ex-capitaine à l’Académie militaire ; le général Rachid Guetaf, le général Abed Litim, commandant parachutiste, ex-capitaine aux 4e et 18e RAP, aujourd’hui commandant de l’École d’application des forces spéciales à Biskra ; le général-major Saïd Chengriha, ex-commandant de la 1re division blindée puis commandant de la 8e division blindée, aujourd’hui commandant de la 3e région militaire ; ou aussi les pires criminels que sont le général-major Mhenna Djebbar, ex-commandant du CTRI de Blida aujourd’hui chef de la DCSA, le général-major Bachir Tartag ou le général-major Abdelrazek Chérif, parachutiste commandant de la 4e région militaire.

    Tous ces généraux ont été et sont toujours les acteurs d’une gigantesque entreprise de prise en otage d’un peuple entier. Avec demandes de rançons, chantage et détresse de dizaines de milliers de familles. De 1992 à 1999, ils ont conduit une « sale guerre » ciblant de manière délibérée des civils désarmés dans les zones sensibles, qui a fait 200 000 morts. Et en 2000 encore, ils ont lancé la terrible opération « Saïf El-Hadjaj » (« L’épée de El-Hadjaj »), dont le nom est le symbole même de la mort et de la terreur pour tous les musulmans. Avec vos pairs, vous avez ainsi mis en œuvre les principes de la « guerre psychologique » tels qu’ils ont déjà été appliqués pendant la guerre de libération par l’armée coloniale française, ou au Viêt-nam et en Amérique du Sud par les militaires américains et leurs alliés. Des méthodes qui incluent le bouclage physique des villes et des villages, la prise en otage de civils, les exécutions extrajudiciaires, l’enlèvement et la torture de toute personne soupçonnée d’appartenir à un groupe d’opposition.

    D’où la fameuse question qui vous taraude aujourd’hui, avec vos complices : « Si nous lâchons le pouvoir, nous serons jugés pour crimes contre l’humanité ou crimes de guerre. » Vos généraux ont donc en permanence à l’esprit un kit de survie psychologique, et ils font tout pour respecter le pacte criminel qui les unit.

    « DRS, dégage ! »

    Aujourd’hui, mon général, en Algérie comme à l’étranger, vos émissaires sont sur tous les plateaux de télévision. Ces charlatans et pseudo-démocrates prétendent nous expliquer « comment devenir des opposants ». Ils veulent nous montrer la voie du « salut » par des discours démagogiques tout droit sortis de vos laboratoires de désinformation. Or que représentent-ils réellement dans la société algérienne ? Est-ce qu’un « démocrate » qui va manifester avec des gardes du corps de la police est crédible ?

    Cette comédie peut peut-être abuser encore un temps des médias occidentaux – et français en particulier – qui ont depuis si longtemps renoncé à comprendre la perversité de votre système de pouvoir. Et vous avez su avec efficacité, à coups de prébendes et de désinformation, les encourager en ce sens pour vous soutenir. Mais vous ne pouvez plus abuser l’immense majorité du peuple algérien, qui est parfaitement lucide sur vos crimes et qui ne pense qu’une seule chose : « DRS, dégage ! »

    Je sais comme tout le monde que votre souci principal est de ne pas se retrouver devant un tribunal pénal international, pour les crimes que vous avez commis depuis 1991. Chaque Algérien sait aussi que votre poulain Bouteflika est âgé et malade et qu’il a, tout au long de son mandat, abusé des circuits de corruption que vous lui avez laissés. L’affaire Sonatrach, devenue votre cheval de bataille pour brider celui qui prétend contester votre emprise sur ces circuits, est un révélateur de l’état de l’Algérie : de ses inégalités, de ses injustices sociales, de ses déséquilibres institutionnels, des abus d’un président sans contrôle comme de ceux de votre propre clan.

    Dans votre régime en fin de règne, ces querelles misérables ne révèlent rien d’autre que la complicité conflictuelle qui vous lie, vous et votre président de façade, pour piller notre peuple. Ainsi, le DRS enquête et met à nu des réalités qui dévoilent les impostures et les mensonges d’un tout petit monde, qui par la faveur de votre pouvoir s’approprie la richesse nationale. On se souvient de ces grands titres de la presse dite « libre », mais très manipulée, qui révèlent telle ou telle affaire et de la fébrilité puis de la panique qui se sont emparées du cercle de votre président… Autant de faux-semblants d’une prétendue « lutte anticorruption » dont le seul objet est de préserver les pires pratiques de corruption.

    Voyez par vous-même, mon général : ce qui était impensable il y a encore quelques semaines en Tunisie et en Égypte, peut bientôt se reproduire en Algérie. Des dictateurs ont plié bagage devant la colère de la rue. Mais soyez-en sûr, l’intifada fondatrice ne sera pas organisée par les faux opposants.

    J’ignore ce qui va se passer maintenant. Nous avons des jours difficiles devant nous. Tout ce que je sais, c’est que l’Algérie a plus que jamais besoin d’hommes et de femmes profondément loyaux et intègres, et non pas de ceux qu’on achète et qui se vendent. Des hommes et de femmes qui défendraient la justice et la vérité même si l’univers s’écroulait. Qu’il ne soit jamais dit que les Algériens n’ont rien dit, n’ont rien fait contre la bête immonde qui détruit notre nation. Les événements de ce début d’année 2011 dessinent une trajectoire fatale qu’il faut identifier et contrer pour préserver notre pays. Y a-t-il encore quelqu’un pour écouter la voix d’un Algérien ? Avons-nous peur de nos responsabilités ? Que deviennent-ils, les fils et les filles de l’indépendance ? De la guerre de libération ? L’Algérie est notre mère patrie, elle souffre d’un interminable cancer. C’est pour cela que je propose un congrès de la vraie opposition, une sorte de nouveau Sant’Egidio, parce que nous arrivons à un moment critique de notre histoire, à une époque d’incroyables défis à relever.