La nouvelle loi organique sur l’information est passée à l’Assemblée populaire nationale comme une lettre à la poste. Le contraire aurait été étonnant. Il aura suffi aux élus du FLN et du RND l’appui des énigmatiques députés «indépendants» pour que le dernier volet des «réformes» annoncées «tambour battant» en avril dernier par le président de la République soit adopté au «pas de charge», même si ceux d’autres partis représentés au sein de l’hémicycle du palais Zighout Youcef ont choisi de ne prendre part ou de s’abstenir au vote en question. Une loi organique a été votée dans ces conditions par une APN pour le moins mal élue, faut-il le rappeler, avec seulement 35% de votants, selon les chiffres officiels.
Tout aura été écrit ou presque pour dénoncer, vingt et un ans après la promulgation du code de l’information, un projet de loi organique qui renforce davantage l’autoritarisme du pouvoir politique déjà maintes fois décrié depuis 1990. Avec le vote de mercredi dernier, le «verrouillage» dans l’acte d’informer à travers un dispositif des plus répressifs vise tout simplement à vider le journalisme de sa substance et faire des journalistes de zélés thuriféraires du pouvoir politique et de la presse nationale, une presse laudatrice qui en chanterai les louanges. D’ores et déjà les professionnels de l’information pointent du doigt l’article 2 et toutes les restrictions imposées aux journalistes au risque de voir s’installer le phénomène de l’autocensure par crainte de sanctions judiciaires. Le champ d’intervention du journalisme et de la presse indépendante s’en trouve réduit d’autant avec cette loi.
Plus question d’enquête journalistique sur la corruption au nom de la «préservation des intérêts économiques du pays», c’est tout juste si l’on a retiré celle relative «aux intérêts diplomatiques du pays» au moment où le ministre des Affaires étrangères était «entendu» par la commission des affaires étrangères de l’Assemblée française. Du jamais vu. Reste cependant qu’on ne sait pas pour l’instant ce que les juges rangeront comme délits de presse, les informations qui, selon leur intime conviction, pourraient «porter atteinte à la souveraineté nationale». Autant dire qu’une véritable «épée de Damoclès» pend au-dessus de la tête des journalistes.
Avec cette loi : plus de presse indépendante, ni de journaux critiques à l’égard du pouvoir et de ses dérives. Un «rêve» maintes fois caressé par presque tous les dirigeants qui se sont succédé depuis plus de vingt ans. Tous les journaux sous la même enseigne, celle du gouvernement, de l’Etat et de «l’officiel» comme dans les années 1960 et 1970, lorsque toute contestation, toute opposition étaient «étouffées dans l’œuf».
Il faut se rendre à l’évidence : on a à faire à une alliance liberticide entre l’Exécutif et le Parlement qui n’a rien à envier aux régimes les plus autocratiques que sont celui de la Corée du Nord ou de l’Iran, où toute opposition est tout simplement bâillonnée. On vient d’en avoir la preuve, une fois de plus, avec le vote de la loi sur l’information.