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  • Le citoyen face à la bureaucratie et la corruption de l'Administration

     

     

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    Le président de la République recevait mercredi 3 août Dahou Ould Kablia, ministre de l'intérieur et des collectivités locales, pour une réunion restreinte d’évaluation consacrée au secteur, pour reprendre le jargon consacré. Le sujet de cette réunion restreinte d'évaluation ?"L’amélioration, la modernisation des services publics, la qualification de la ressource humaine à même d’améliorer les prestations de services publics rendus aux citoyens", annonçait le communiqué. Cependant, le terrain traduit une vérité contraire de la rhétorique bien huilé auquelle nous ont habitués les communiqués officielles. Pour illustrer le propos, deux articles de presse qui montrent à quel point l’administration algérienne est encore loin d’être un service public. Exemple à Tizi Ouzou.

     

    Le rapport citoyens–administration  est continuellement "obstrué " et compliqué par une bureaucratie endémique. Loin de constituer une exception, Tizi Ouzou est justement l’une  des illustrations qui confirme le calvaire et les souffrances des citoyens  face à des  procédures administratives des plus tentaculaires. Que ce soit au niveau communal ou dans d’autres administration publiques, le poids de la bureaucratie se fait sentir jusqu’à la petite procédure ou autre opération qui ne nécessite, pourtant, absolument pas un temps prolongé. C’est l’un des maux les plus contraignants pour les citoyens. 

    La bureaucratie qui a gangrené le fonctionnement de l’administration locale à Tizi Ouzou tend à devenir un véritablement goulot d’étranglement pour la population prise, continuellement, sous le prisme d’une complexité "administrative " des plus paradoxales. En effet,  du secteur économique où les nouveaux investisseurs qui tentent de se lancer dans l’entreprenariat se heurtent aux lenteurs administratives, aux multiples démarches de constitution d’un dossier, recrutements entre autres, le poids de la bureaucratie se fait sentir à tous les niveaux.

    "L’acte de naissance ou l’illustration du gâchis …"

    La délivrance d’un acte de naissance par les mairies, notamment au chef-lieu communal de Tizi Ouzou, relève d’une tâche ardue appréhendée par les citoyens. Les guichets du service état civil de l’APC de Tizi Ouzou sont, quotidiennement pris d’assaut par des centaines de demandeurs de documents, contraints à y passer toute la journée. "Je suis ici depuis 7h du matin. En plein Ramadhan, je suis obligé de passer la journée dans ce hall qui sert de service d’état civil pour espérer avoir d’un extrait d’acte de naissance.  Ma sœur est venue hier, mais elle n’a pas pu avoir ce document du fait de l’importante demande", raconte, toute éreintée, une jeune fille rencontrée dimanche à l’APC de Tizi Ouzou. Il faut dire que de tout temps, ce service a constitué le talon d’Achille des différentes gestions qui se sont succédé. 
    Le mécontentement est visible et les citoyens ont du mal à cacher cette colère qui les rongent. « Au moment où les autres pays passent au numérique et rendent ce genre de service accessible aux citoyens via Internet, nous, il nous faut des journées entières pour se faire délivrer un simple document administration. C’est aberrant ! " commente un autre citoyen. Il faut dire que le poids de la paperasse, les lenteurs administrative et autres "symptômes" de la bureaucratie, dissuadent plus d’un à se lancer dans une quelconque activité.

    Quand bureaucratie rime avec… corruption ! 

    Cependant, si le fonctionnement au Smig et les habitudes héritées de l’ère de la révolution agraire expliquent en partie le travail au ralenti de certaines administrations, cela ne constitue pas, toutefois, la seule cause. Car, comme l’ont souligné à maintes reprises les opérateurs économiques, les lenteurs administratives sont parfois "provoquées" par certains  "vilains agents". "Pour viser une situation ou valider un marché, certains font appel à cette technique, qui relève du chantage, pour pousser l’entrepreneur à payer des commissions en contrepartie d’un traitement plus rapide de son dossier. À défaut, on fait voir aux demandeurs toutes les misères", déplore un entrepreneur. La bureaucratie est donc vécue comme une hydre de Lerne des temps modernes. Alors que cela relève d’un droit à part entière, la délivrance d’un document ou d’une pièce administrative est conditionnée par une intervention qu’on peut faire jouer une "petite" commission versée pour l’accélération du traitement de son dossier.  

    300 enfants privés de prénom

    Autre phénomène de l'administration municipale de l'état-civil de Tizi-Ouzou. Elle multiplie les refus d'inscription de nouveau-nés.  Motifs des refus ? Les prénoms amazighs seraient illégaux, en vertu d'un décret et d'une liste de 1981. Les cas s'accumulent au service de l'état-civil de l'Assemblée populaire communale de Tizi-Ouzou: en février, c'est le père d'une petite Masintha, née le 12 juin 2010, qui révèle à la presse qu'il ne peut inscrire sa fille à la crèche du fait du refus des employés communaux d'enregistrer sa fille à l'état-civil. La raison de ce refus est l'absence du prénom Masintha (prénom amazigh) du "lexique national de prénoms" concocté par l'administration d'Alger le... 7 mars 1981. Désemparé, M. Madouni (le père) constate que sa "fille a huit mois (...) mais aux yeux de l'administration, elle n'existe même pas". Sa tentative de porter l'affaire en justice a été rejetée par le procureur.

    Le 13 mars, le quotidien Le Soir d'Algérie publie une tribune signée Saïd Doumane. Ce respectable professeur à la faculté d'économie de Tizi-Ouzou, ancien détenu politique et militant de longue date des droits de l'homme et de la cause amazighe, dénonce le sort que fait à son petit-fils l'administration de la vile. Alors que les parents de l'enfant, né le 4 novembre 2010, souhaitent le prénommer Maksen (prénom amazigh), un officier d'état-civil, puis, suite à une plainte des parents, un magistrat, refusent de l'inscrire sur le registre. Pour Saïd Doumane, "décision discriminatoire ou raciste délibérée, l’acte est d’une extrême gravité parce que commis au nom de l’Etat algérien. Qu’un officier d’état civil ou un président d’APC aux ordres ou ignorant l’histoire et la culture de leur pays se conduisent de la sorte, passe encore car monnaie courante dans notre pays, mais qu’un magistrat censé protéger les citoyens des inepties et des abus de l’administration leur emboîte le pas, ça devient intolérable et ça pousse à la révolte. Quand on sait que des prénoms saoudiens, égyptiens, afghans etc. sont entrés allègrement dans la nomenclature des prénoms de notre administration, tandis que les prénoms authentiquement algériens sont soumis au bon vouloir de certaines autorités ! Cela s’apparente à du racisme officiel." Pour rappel, le président d'APC de Tizi-Ouzou est M. Naguim Kolli, élu du FLN, parti du président algérien Abdelaziz Bouteflika.

     

    Suite à ces affaires et à plusieurs dizaines d'autres, le président de l'Assemblée populaire de wlaya de Tizi-Ouzou, Mahfoud Belabbas a écrit le 19 mars au ministre de l'intérieur un courrier à ce sujet (consultable sur le site de l'APW). Il remarque notamment que le lexique officiel des prénoms a été rédigé en 1981, mais que l'article 5 du décret paru la même année et encadrant son usage prévoit qu'il puisse être révisé tous les trois ans. M. Belabbas propose donc au ministre de l'intérieur, M. Daho Ould Kablia (par ailleurs président de l'association des anciens du MALG, ancêtre des services secrets militaires algériens) de réviser, conformément au décret, la liste des prénoms pour y ajouter les prénoms amazighs. Aucune réponse du ministère n'a été rendue publique suite à cette demande.

     

     

    Lien article : http://www.depechedekabylie.com/evenement/98706-tizi-ouzou-bureaucratie-etouffante.html

    Lien article : http://amazigh.blog.lemonde.fr/2011/08/07/algerie-kabylie-300-enfants-prives-de-prenoms-par-la-mairie-de-tizi-ouzou/