Par : Mustapha Hammouche
Ce serait défoncer une porte ouverte que de s’émouvoir de l’état de l’Université algérienne. À la baisse tendancielle de son niveau pédagogique et scientifique, tout à fait dans la ligne du mouvement de régression nationale, s’ajoute la dégradation éthique qui affecte la gestion administrative et pédagogique des établissements universitaires, tout à fait dans la ligne de la décadence morale de la société.
À l’exception de quelques établissements et de quelques cas individuels dans la plupart des autres, les diplômes reflètent rarement le niveau de connaissance dont ils sont supposés témoigner. Le trafic d’influence, le harcèlement et même l’argent polluent la relation entre les étudiants, d’un côté, et les professeurs et responsables pédagogiques, de l’autre.
Si l’on en juge par le cri de désespoir d’un candidat au magister d’un institut d’Alger, nouvellement surhaussé au rang de… “Grande école”, il faut vite désespérer — pour ceux qui espèrent encore — d’un salut pour l’Université nationale.
Rappelons que dès l’année dernière, les postes de magister étaient réduits à cinq ou six par spécialité et qu’on voyait déjà des noms familiers, parce que des filles de hauts responsables et de proches de cadres de l’institut parmi les heureux “élus”. Trois majors de promotion ont été cependant “repêchés”. Bien sûr, rien n’interdit que des fils et des filles de responsables brillent dans leurs études, mais dans le cas d’espèce, le doute semble de mise.
Pour cette année, le ministère est revenu sur la promesse, arrachée par la grève, de vingt-cinq places de magister par spécialité et a ramené le quota à douze (pour quelque deux cents candidats), dont un est réservé, en toute logique, au major de promotion. Le jour de l’examen, certains postulants ont remis leurs copies au bout de dix minutes. Bizarrement, ces candidats pressés de remettre leurs feuilles — blanches ou pré-noircies ? — ont tous des noms connus pour leurs positions dans la hiérarchie nationale. Pour une partie des candidats, et surtout pour notre correspondant, “anonymes”, quelque chose leur dit que certains dés sont pipés d’avance.
En tout cas, le désarroi qui transparaît à travers sa lettre témoigne de sa conviction que, cette fois encore, cette pratique de favoritisme, probablement reproduite dans bien des compartiments de notre université, risque d’être rééditée. Il suffit de lire “la chute” de cette véritable “bouteille à la mer” pour s’en rendre compte.
Voici comment notre étudiant conclut sa missive : “Alors, nous ne savons pas quoi faire, ni à qui parler, tout ce qu'on souhaite, c'est (censuré par nous, et ce n’est pas pour cause de vulgarité) simplement quitter ce pays... et jamais revenir !”
On peut, au-delà de cette éventualité de partage à huis clos de places pédagogiques qui n’aura peut-être pas lieu dans ce cas mais qui se pratique à bien des niveaux de notre université, observer que des diplômes pas toujours significatifs de qualification sont tout de même courus, et par tous les moyens que l’influence, le pouvoir ou l’argent autorisent.
Sont-ils là juste pour couronner la discrimination sociale et politique par une discrimination scolaire ou pour justifier l’institution d’une sorte de transmission héréditaire des postes de l’encadrement dans le pays ?
M. H.
musthammouche@yahoo.fr