Le moins que l’on puisse dire, est que l’Algérie a de la peine à être crédible sur ses dénégations à propos de l’aide militaire qu’elle apporterait au régime de Kadhafi.
Personne ne lui fait crédit de bonne foi.
Un porte-parole du ministère algérien des Affaires étrangères avait démenti dès dimanche 10 avril les informations concernant une implication de l’Algérie dans une opération de mercenariat en Libye. Cela n’a pas empêché le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, de poser de nouveau la question à Mourad Medelci. « Je lui ai dit ‘‘voilà, il y a des informations qui circulent selon lesquelles Kadhafi aurait reçu plusieurs centaines de véhicules armés et transportant des munitions en provenance d'Algérie. Je lui ai posé la question et il m'a assuré que (...) ce n'était pas vrai ».
Il faut dire que tout joue en défaveur du régime algérien. Chacun estime « normal » que le régime de Boutefika réagisse ainsi.
Bouteflika fait figure de dinosaure dans un Maghreb en marche vers les libertés.
Il se découvre soudainement seul, isolé dans le Maghreb
Les révolutions arabes l’ont mis à nu. Il apparait comme la seule survivance de l’ancien monde au Maghreb, après l’annonce par le roi du Maroc Mohamed VI d’une réforme globale ; après la révolution démocratique en Tunisie et en Egypte et l’insurrection libyenne contre la dictature de Kadhafi.
Pour tous il se présente comme un pouvoir qui cherche la première occasion pour rétablir les conditions internes et externes de sa survie. Dans ce cas présent, à œuvrer pour rétablir l’ancienne figuration du Maghreb dictatorial, où il est à l’aise.
Pour tous, Bouteflika agit en sous-main, pour essayer de sauver Kadhafi afin d’être « moins seul »
Des positions publiques
En fait, le pouvoir fait tout, lui-même, pour donner prise à ces allégations.
Le régime de Bouteflika affiche ouvertement sa peur à propos des révolutions arabes.
Les officiels algériens par la voie de Daho Ould Kablia sur France 24, et Mourad Medelci dans la presse internationale n’ont pas fait mystère de leur inquiétude devant le processus démocratique dans les pays voisins. Alger préférait clairement Ben Ali, Moubarak et Kadhafi à l’ordre nouveau des révolutions démocratiques arabes.
Dans son discours de vendredi 15 avri, Bouteflika a clairement affirmé cela.
« L'Algérie suit, naturellement, les mutations en cours sur la scène internationale, particulièrement celles survenues dans certains pays arabes. Face à cette situation, l'Algérie réaffirme son attachement à la souveraineté des pays frères et à leur unité, son rejet de toute ingérence étrangère et son respect de la décision de chaque peuple découlant de sa souveraineté nationale. »
Deux jours auparavant, Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général du FLN et représentant personnel du président de la République, a tenté de minimiser l’ampleur des révoltes populaires dans les pays arabes. « En Algérie, nous avons une haute idée de la révolution. La révolution doit avoir des objectifs et une direction », a déclaré le chef du FLN.
Auparavant, Belkhadem s’était ouvertement attaqué à l’opposition libyenne. « Les opposants libyens ont fait appel à l’OTAN pour massacrer leurs frères. Nous, nous avons combattu l’OTAN », a-t-il déclaré lors de l’émission « Hiwar Essaâ » (Débat de l’heure), diffusée mercredi soir sur la chaîne A3 de l’ENTV. Le premier responsable du FLN, qui n’a, à aucun moment évoqué ces exactions des proches de Kadhafi, semble aussi avoir oublié que l’Algérie est considérée comme « un pays partenaire » par l’Organisation transatlantique nord (OTAN), étant pleinement engagée dans le Dialogue Méditerranée (DM). « L’armée algérienne a pris part, à plusieurs reprises, à des exercices conjoints avec l’OTAN, notamment en Méditerranée et en Ukraine. Mais Belkhadem est‑il au courant ? », ironise un confrère.
L.M.