Une centaine de blessés ont été dénombrés parmi les manifestants par les délégués de la Coordination nationale autonome des étudiants (CNAE).
Des dizaines de milliers d’étudiants ont battu le pavé, hier à Alger, pour réclamer l’application de leur plateforme nationale de revendications sociopédagogiques. Ils ont réussi à forcer un important dispositif sécuritaire assuré par des milliers de CNS. L’itinéraire de la marche, entre la Grande-Poste et le Palais du gouvernement, a été changé par les étudiants pour éviter l’affrontement avec la police. Ils ont donc fait mieux : ils ont marché de la rue Larbi Ben M’hidi jusqu’à la présidence de la République, sur les hauteurs d’El Mouradia. «C’est notre plan B. On savait que la police clôturait tous les alentours du parcours annoncé auparavant. On s’est mis d’accord pour prendre une autre direction, celle de la Présidence», a déclaré, en marchant, Kamel, étudiant à Dély Ibrahim. Cette marche a vu la participation de plusieurs milliers d’étudiants venus de plusieurs universités et grandes écoles. «Les chiffres ne nous intéressent pas. Mais une chose est certaine, les étudiants ont répondu par milliers à notre appel. C’est le plus important pour nous», a indiqué Farid Hadj Mouhand, l’un des délégués de la Coordination nationale autonome des étudiants (CNAE), initiatrice de cette marche.
Pour disperser les manifestants qui voulaient atteindre les portes du palais présidentiel, les brigades antiémeute ont donné l’assaut. Du coup, la marche pacifique s’est transformée en confrontation entre les policiers et les étudiants. Cela a engendré une centaine de blessés dont une vingtaine dans un état grave parmi les manifestants, selon la CNAE. Selon des sources sécuritaires, plusieurs policiers auraient été également blessés.
La CNAE se dit victorieuse
Durant tout le trajet de la marche, les étudiants ont résisté aux maintes tentatives de la police qui voulait les disperser. Ils ont scandé plusieurs slogans hostiles à leur tutelle et aux autorités : «Harraoubia dégage», «Chômage, harraga du programme Harraoubia», «Etudiant s’engage, système dégage», «Nous sommes des étudiants pas des voyous», «Etudiants autonomes», «Pouvoir assassin» et «Ulach smah ulach» (pas de pardon). Les étudiants, drapeaux et banderoles brandis, ont entonné des chants patriotiques et l’hymne national.
Avant que les contestataires ne soient délogés, ils ont écouté avec intérêt la prise de parole des délégués de la CNAE. «Nous sommes là pour dire que l’université algérienne vit une crise profonde. Nous sommes là pour défendre le caractère public de notre université. Etudiants, soyons solidaires. Nous sommes les porte-parole de tout le peuple algérien opprimé. Nous sommes ici grâce à notre détermination. Nous avons cassé l’état d’urgence. Vive les étudiants. Vive l’auto-organisation des étudiants», a crié Farid à l’aide d’un mégaphone avant d’être interrompu par un autre étudiant : «Libérez la liberté de pensée. Libérez la liberté d’expression. Amis étudiants, soyons pacifiques, responsables et solidaires.»
Les protestataires ont, par la suite, profité d’un moment de détente en s’asseyant par terre pour reprendre leur souffle. Près de deux heures après, les policiers, soutenus par des renforts importants, ont dispersé les étudiants. Ces derniers ont été victimes d’agressions de la part des brigades antiémeute. Plusieurs ont été conduits dans des véhicules de police pour être tabassé, tandis que d’autres se sont effondrés sous les cous de matraque et de pied. Les étudiants ont réussi à se rassembler de nouveau à la Grande-Poste, où ils ont crié victoire avant de se disperser dans le calme.