Le phénomène prend de l’ampleur
60% des produits importés sont contrefaits
El Watan le 31.07.12
La contrefaçon ne cesse de prendre de l’ampleur. Rien que pour le premier semestre 2012, les unités de la Gendarmerie nationale ont traité 29 affaires liées à ce phénomène, selon un bilan de ce corps constitué, impliquant l’interpellation de 40 personnes.
En comparaison avec le 1er semestre de l’année 2001 (11 affaires et 14 personnes arrêtées), il a été relevé une hausse de 163% en matière d’affaires constatées et de 186% en termes de personnes arrêtées. En juin 2011, Mohamed Abdou Bouderbala, directeur général des Douanes, avait jeté un pavé dans la mare. Selon lui, 60% des produits importés en Algérie, destinés à la revente en l’état, sont contrefaits. Entre 2 et 3 millions de produits contrefaits sont saisis annuellement par les services douaniers chargés de la lutte contre la fraude, selon ce haut responsable. Produits cosmétiques, pièces détachées, appareils électroménagers, robinetterie à gaz, cigarettes sont ramenés massivement chaque année par des importateurs fraudeurs, avait fait savoir M. Bouderbala.
Plus grave encore, la contrefaçon s’est étendue jusqu’aux médicaments. Selon ses révélations, des importateurs, peu soucieux de la réglementation, importent dans une première étape le vrai médicament afin d’obtenir l’autorisation d’importation du ministère de la Santé, qu’ils utilisent ensuite pour importer des médicaments contrefaits. Catégorique, il avait avancé que «presque la totalité des cosmétiques importés sont contrefaits et tous les appareils de téléphonie mobile qui ne sont pas agréés par l’ARPT (autorité de régulation) sont aussi de faux produits». Les produits contrefaits provenaient, en général, de Chine, des Emirats arabes unis et de Corée du Sud.
Outre la fuite de devises vers l’étranger, ce fléau affecte la sécurité et la santé des citoyens. Alors que ce phénomène tentaculaire tisse sa toile, les services de contrôle des Douanes algériennes manquent de moyens modernes d’expertise comme les laboratoires de contrôle au niveau des frontières, avait-il déploré. Formés sur plusieurs marques de produits pour intercepter les articles contrefaits, les 280 agents douaniers restent impuissants à lutter avec efficacité contre ces fraudeurs. Selon ses propos, les Douanes envisagent de «durcir la législation en matière de lutte contre la contrefaçon». M. Bouderbala n’avait pas toutefois précisé la nature des amendements à prévoir. Ira-t-on vers la criminalisation de ce fléau ? Rien n’est moins sûr.
Un grand paradoxe persiste : les articles contrefaits sont écoulés particulièrement sur le marché parallèle, sous l’œil complice des autorités en charge de la lutte contre ce fléau. En 2009, un rapport annuel établi par les services du représentant au commerce international américain (USTR) classait l’Algérie à la 3e place sur une liste rouge de onze pays dits «de surveillance prioritaire». Après la Chine et la Russie, l’Algérie serait le pays qui lutte le moins contre la contrefaçon, selon les conclusions dudit rapport.