Et que tout le monde débatte! Nous pastichons quelque peu ici le célèbre slogan d’un opérateur de téléphonie mobile. En vérité, cela ne semble pas aussi évident que cela paraît dès lors qu’il est question de débat politique. En fait, nous sommes à des années-lumière du débat politique tel qu’il est conçu et compris sous d’autres cieux. Aussi, rien ne semble assurément assez fort pour sortir les hommes politiques algériens de leur léthargie et du mutisme dans lequel ils se sont barricadés. Ils n’ont donc rien à dire, ces députés, ces sénateurs, ces démocrates, ces ministres, à défaut de commenter certaines sorties, comme celle de l’ex-président Ben Bella? Pas d’avis à donner sur la marche des affaires du pays, pas de propositions, d’initiatives alors que, nous semble-t-il, c’est la raison même du pourquoi de leur fonction: débattre des politiques (économique, sociale, culturelle, politique...) du gouvernement, porter la contradiction, être constamment sur le terrain à l’écoute des électeurs pour les uns, des demandes des citoyens, pour les autres. Dans les faits, rien de cela n’existe et chacun agit en vase clos. Les gouvernants soliloquent, ils n’écoutent pas, décident de tout, ne consultent pas leurs partenaires sociaux et économiques, n’expliquent pas des décisions prises au nom des Algériens. Ainsi, nous ne saurons jamais le pourquoi des pénuries des produits de large consommation, comme les raisons des augmentations de leurs prix...Il aurait été politique que les ministres se justifient du travail qu’ils effectuent ou n’ont pu, pour une raison ou une autre, réaliser, à l’instar du métro d’Alger attendu depuis trente années...On n’en saura rien, sinon que ces ministres répéteront à l’envi qu’ils exécutent le programme du Président. La belle affaire! Autant dire que nos ministres sont irresponsables de ce qu’ils font et ne sont pas comptables des innombrables ratages répertoriés. Certes, il est plus commode de se camoufler derrière les orientations du chef de l’Etat. Les députés et sénateurs, généreusement rétribués par l’Etat, se la coulent douce et ne s’inquiètent pas trop des dysfonctionnements qui affectent la marche de l’Etat et du pays, ne montrent aucune curiosité pour s’informer de la reproduction d’affaires scabreuses qui donnent une image déplorable de l’Algérie (corruption, cherté de la vie, multiples scandales défrayant la chronique, les détournements dans les administrations et les banques...). Combien d’enquêtes les sénateurs et les députés ont suscité et diligenté pour savoir? Aussi, il est absurde de demander combien de lois ils ont proposé, débattu et adopté, quand ils se sont surtout illustrés par leur absentéisme? Les démocrates et la société civile? Où sont-ils en ces moments d’incertitude où l’on tente d’amorcer le débat sur des lois (Constitution, électorale, sur les partis) qui engageront le pays sur le long terme? Or, ces derniers observent un déroutant silence donnant l’impression de n’être pas concernés par l’évolution du pays laissant le champ libre à d’autres voix qui ne font pas nécessairement consensus. Un silence radio impressionnant. Où sont donc passés les leaders démocrates, de la société civile et des associations de défense de la citoyenneté, se revendiquant de la démocratie et luttant pour une Algérie plurielle et républicaine? La politique est une bataille au long cours, et lorsque l’on ne peut tenir le rythme, ou que la conviction et la volonté font défaut, il faut savoir reconnaître ses limites et faire autre chose. Quand on ambitionne de guider les hommes, il faut à tout le moins avoir des convictions et en accepter les servitudes. Dès lors, on ne comprend pas le silence que s’imposent les démocrates au moment où de grands dossiers sont en débat. C’est pourtant, le triste constat qu’il faut être de mauvaise foi pour ne point relever quand la discussion sur le devenir du pays est soustraite à ses principaux acteurs.
Noureddine MERDACI