De nombreux postulants au prêt sur gage se résignent à la vente de leurs bijoux en or, après l’échec de leur demande de prêt sur gage.
La décision prise par la Banque du développement local (BDL), exigeant le poinçon sur tout bijou pouvant servir dans l’opération de prêt sur gage constitue le motif principal du rejet d’une grande partie des demandes. Ce constat, nous l’avons fait non pas à travers les chiffres, puisque ladite agence refuse toute communication avec la presse sans autorisation de la direction, qui, elle, reste muette à notre demande d’entretien, mais par les réponses recueillies auprès des postulants au prêt sur gage disponible auprès de cette agence bancaire située à Alger-Centre. Une grande partie des postulants pour ce genre de prestations est constituée de femmes. Ces dernières ont recours à cette pratique pour le règlement d’une facture d’électricité ou affronter des dépenses imprévues.
« C’est une bouffée d’oxygène pour moi, puisque j’ai le temps nécessaire pour rembourser mon dû et récupérer ma parure », nous dira une dame ayant réussi à décrocher le prêt. Mais, depuis que le poinçon est exigé comme paramètre principal dans la sélection du dossier de demande de prêt, les vendeurs illégaux s’ingénient à exploiter cette déception qui s’affiche sur le visage des postulants dont la demande a été rejetée. « Quoi, madame, on vous a refusé votre bijou, moi je le prends, je vous offre entre 1100 et 2700 DA, selon la qualité de la pièce », propose un jeune vendeur à une femme visiblement désappointée par la réponse de la BDL, expliquant que son bijou n’est pas poinçonné, mais elle sera vite rassurée.
« On va tout de suite le peser et vous donner un bon prix », explique également le vendeur, qui, en une fraction de seconde, sort une balance minuscule de sa poche. Il propose à sa cliente de choisir n’importe quel autre bijoutier pour faire expertiser son bijou et qui lui en donnera le même prix, au cas où elle ne fera pas confiance à l’évaluation faite par ses soins. C’est avec ce procédé que de nombreux postulants au prêt sur gage se résignent à la vente de leurs bijoux en or, après l’échec de leur demande de prêt sur gage auprès de la BDL. « Si les gens ont recours au prêt sur gage, c’est qu’ils n’ont aucune autre ressource financière pour régler un problème pressant. Emprunter de l’argent est certes beaucoup mieux à leurs yeux, mais vendre, reste la seule solution après le refus de leur demande », explique un vendeur interrogé devant l’agence de la rue Harriched.
En effet, Avec la dégradation du pouvoir d’achat et les répercussions de l’inflation sur les prix des produits de première nécessité, tous les moyens sont bons pour se soulager d’une facture ou rembourser des dettes. « Et je ne vois pas d’autre solution que de vendre mon bijou dont le gage a été refusé par la BDL », nous explique une femme rencontrée à la sortie de l’agence Harriched. « Tant pis, j’en achèterai un autre quand j’ aurai les moyens », se console-t-elle. Les « dellalines » que nous avons approchés expliquent que « la déception du client est à exploiter et à ne pas rater. Quelqu’un qui a besoin d’un prêt en urgence n’a pas trop le choix.
Au bout de quelques minutes, il décide de vendre ». Pourquoi ces vendeurs prennent-ils le risque d’acheter des bijoux pouvant être de qualité douteuse en l’absence de poinçon certifiant officiellement la bonne qualité de l’or ? Un vendeur nous a répondu : « Nous sommes pour la plupart d’entre-nous des bijoutiers dotés d‘une expérience nous permettant de déceler les bijoux confectionnés avec de l’or de bonne qualité ou du faux. En un clin d’œil, le bijou est expertisé et son prix est fixé », assure ce bijoutier illicite. Plusieurs « affaires » se concluent ainsi juste en face de l’entrée de l’agence BDL. Des quantités de bijoux circulent dans le marché informel. Imposer un poinçon est-il le seul moyen de reconnaître la bonne qualité de l’or ? Les pouvoirs publics sont-ils conscients de cette brèche ouverte aux vendeurs illégaux ? La BDL reste avare en communication concernant ce point précis.
Sollicitée pour un entretien sur ce sujet, aucune suite n’a été donnée à notre demande.
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