Face aux caméras de France 2, M. Sarkozy entend surtout parler, selon son entourage, des « problèmes réels des Français », à savoir la crise économique, les mesures de rigueur pour réduire les déficits publics et la réforme des retraites (projet phare de la fin de son quinquennat) et sur la réussite duquel il veut baser une nouvelle candidature en 2012.
Le chef de l’Etat doit encore convaincre les Français, sceptiques sur la justice de cette réforme, dont l’élément central est le recul de 60 à 62 ans de l’âge minimal de départ en retraite. Le texte sera présenté le lendemain en Conseil des ministres. Cette interview sera surtout l’occasion pour M. Sarkozy de réitérer son soutien à son ministre du Travail, Eric Woerth, chargé de cette réforme mais très affaibli par « l’affaire Bettencourt » dont les rebondissements font la une depuis un mois et sur laquelle il sera interrogé pour la première fois. Visé par des accusations de « conflit d’intérêts » en raison de la proximité de son couple avec la richissime héritière des cosmétiques L’Oréal, Liliane Bettencourt, M. Woerth est aussi soupçonné de financement politique illégal après des accusations fracassantes de l’ex-comptable de la milliardaire.
Celle-ci accuse le gérant de fortune de Mme Bettencourt de lui avoir demandé d’aller chercher 150 000 euros à la banque en mars 2007 pour les remettre à M. Woerth, alors trésorier du parti majoritaire UMP, pour la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Des accusations rejetées par M. Woerth, qui pourrait être bientôt auditionné par la justice dans le cadre des trois « enquêtes préliminaires » ouvertes sur les différents aspects de ce dossier. Cette affaire est le point culminant d’une série de scandales qui ont déjà entraîné la démission de deux ministres et contraint M. Sarkozy à annoncer des mesures pour réduire le train de vie de l’Etat dans un climat délétère où près des deux tiers des Français, selon un sondage, jugent leurs dirigeants corrompus.
Ça passe ou ça casse !
Face à cette crise de confiance, M. Sarkozy ne devrait pas pour autant suivre les appels, à gauche mais aussi à droite, à anticiper un remaniement ministériel prévu pour l’automne. « Notre priorité politique, ce n’est pas le remaniement », a assuré le Premier ministre, François Fillon, mercredi dernier. Le Président ne veut pas donner l’impression de céder à la presse, accusée par ses proches de « manipulations », voire « de méthodes fascistes » dans l’affaire Bettencourt. Pour soutenir Eric Woerth, Nicolas Sarkozy compte sur la publication, aujourd’hui, d’un rapport administratif interne sur la gestion du dossier fiscal de Liliane Bettencourt, dont M. Woerth est soupçonné d’avoir couvert de possibles fraudes lorsqu’il était ministre du Budget (de 2007 à mars 2010). M. Woerth est critiqué pour des « conflit d’intérêts », car non seulement il était trésorier de l’UMP à cette époque, mais son épouse Florence gérait une partie de la fortune de Mme Bettencourt.
Des enregistrements clandestins de conversation entre Mme Bettencourt et ses conseillers suggèrent des opérations d’évasion fiscale vers la Suisse et laissent entendre que Florence Woerth a été embauchée à la demande de son mari. Le climat de suspicion est d’autant plus pesant que les différentes enquêtes en cours sont pour l’instant menées par le parquet, hiérarchiquement dépendant du pouvoir. Ce qui pousse l’opposition, mais aussi avocats et syndicats de magistrats, à réclamer la désignation d’un juge d’instruction indépendant de l’exécutif.
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