Le dernier rapport du département d’état sur la situation sécuritaire dans la région se félicitant des « efforts considérables fournis par l’Armée nationale populaire (ANP) et les forces de sécurité pour avoir réussi à neutraliser les groupes terroristes » confirme bien l’échec de la politique de réconciliation nationale prônée par le chef de l’Etat depuis 1999, échec qui est sans doute un des facteurs probants à l’origine de son isolement politique sur la scène internationale.
Il conforte, en tout cas, l’idée selon laquelle Bouteflika ne gère plus le dossier du Sahel et que, sous l’influence des Américains, ce dernier incombe directement aux chefs militaires.
Suite à plusieurs kidnappings d’étrangers au Mali et en Mauritanie, revendiqués par des chefs algériens de la nébuleuse terroriste d’Al Qaïda au Sahel, les Américains avaient, en effet, fait comprendre qu’ils ne supportent plus les atermoiements de Bouteflika sur le volet terroriste et encouragé les généraux à divorcer avec la « réconciliation nationale », leur suggérant de reprendre les choses en mains. Avec l’aval des Américains, le Commandement de l’Armée algérienne avait alors, en décembre 2009, décrété zones militaires les zones frontalières séparant l’Algérie du Mali, Niger et Mauritanie, en imposant un laissez-passer. Dix ans après la « Concorde nationale » qui devait ramener « la paix dans les coueurs », cela sonnait bien comme un aveu d’échec. Plus de 3.000 militaires supplémentaires sont venus s’ajouter aux 15.000 déjà déployés le long des frontières Sud.
Curieusement, cette décision avait été mise en pratique quelque jours à peine après la visite surprise à Alger le 25 novembre 2009 du général américain William Ward, Commandant de l’Africom.
Par cette grave décision exclusivement militaire de fermeture des frontières, les généraux ont repris manu militari le pouvoir de décision sur un domaine décisionnel réservé au président, chef suprême des forces armées. C’est une amputation du pouvoir d’un président « marginalisé »
C’est pourquoi nombre d’observateurs voient dans cette date le début de l’affaiblissement de Bouteflika. Un mois plus tard sortait en effet la scandale Sonatrach qui a conduit crescendo à l’élimination des hommes du président.
Les Américains assument ce choix. Aussi le Département d’Etat semble-t-il se féliciter, dans le dit rapport, que l’Algérie a réussi à combattre le terrorisme en accueillant une série de réunions, en mars et en avril derniers. Ces réunions qui ont abouti, selon le rapport, à une stratégie commune et à l’installation d’un Etat Major des forces de ces pays, dont le commandement a été installé à Tamanrasset et dont l’objectif et la mission est de lutter contre le terrorisme au Sahel.
Les Américains se réjouissent aussi du « succès des services de sécurité algériens à démanteler les réseaux de soutien aux groupes terroristes », estimant 1300 le nombre de terroristes appartenant au mouvement d’Al Qaida au Maghreb Islamique, abattus ou arrêtés par les forces de sécurité algériennes et l’ANP.
Même les Français discutent directement avec les généraux si on en juge par cette délégation militaire française de haut rang qui vient de séjourner à Alger depuis dimanche 1er août, pour des discussions avec les autorités algériennes sur la coopération militaire dans la région du Sahel dans la lutte contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) au Sahel. Les discussions entre les deux pays ont été entamées lundi 2 août, avec les militaires exclusivement. Aucun représentant du Président n’y a été associé.