Leurs familles demandent l'intervention des ONG
Le sort des dizaines de jeunes, ayant pris le large à la recherche d’une vie meilleure, demeure inconnu.
Le nombre de 300 harraga qui croupiraient actuellement dans les geôles de centres de rétention tunisiens a, à maintes reprises, été avancé par des ONG internationales militant pour la défense des droits des migrants. Ces ONG ont même fait état de l’existence de 11 camps d’enfermement secrets en Tunisie dont la réalisation a été financée par l’Italie, en contrepartie de sa coopération dans la lutte contre l’immigration clandestine. Une coopération instituée par deux accords bilatéraux dont le premier remonte à 1998. A l’époque, l’Italie entendait par engagement économique vis-à-vis de la Tunisie, le déboursement de 150 milliards de lires (correspondant à 300 milliards d’Euros) en trois ans en crédits pour l’industrie, dont 500 millions de lires (01milliard d’euros) pour la réalisation en Tunisie de centres de rétention, précisent ces organisations humanitaires.
À partir de cette date (1988), ont été construits 13 camps d’enfermement (dont un autour de Tunis, un autre entre Gabes et à la frontière libyenne. «Où sont les autres 11 camps ? Cela a toujours été un secret, personne n’a jamais pu savoir ce qui se passe à l’intérieur ?», s’interrogent les défenseurs des droits des migrants. Des affirmations tacitement corroborées par Kamel Belabed, porte-parole du collectif des familles de harraga disparus en mer lorsque, interrogé, il a indiqué : «ce chiffre de 300 est important et bien précis. Le nombre est accablant mais reste probable et je ne serais pas surpris si on me disait qu’il y en a davantage». Des preuves ? «Où aller puiser ces preuves lorsque les Etats concernés eux-mêmes se font des cachotteries et que la rigueur est bannie de la gestion de cet épineux dossier pour laisser place à un laxisme déshonorant. Non pas pour les familles touchées qui boivent le calice jusqu’à la lie et cela tous les jours que Dieu fait alors que nos autorités acceptent une situation qui prendrait tout son sens si on la traduisait dans notre langue», a répondu notre interlocuteur.
Ce père sans nouvelles de son fils parti, depuis plus de trois ans, à la recherche d’une vie meilleure de l’autre côté de la rive, pointe du doigt les politiques algériens et étrangers en raison de leur placidité face à la souffrance et l’interminable attente des familles des disparus en mer dont il est le porte-parole. Pour ce qui est de son projet de créer une association devant regrouper ces familles pour agir de manière officielle auprès des instances nationales ou internationales concernées, il a tenu à démentir l’existence de toute démarche allant dans ce sens en précisant: «cela ne m’est jamais venu à l’esprit car on ne peut construire ou organiser quelque chose de tangible sur la misère des autres». Et d’ajouter qu’il n’a, néanmoins, jamais cessé et ce depuis 2007 (date de la disparition de son fils de se faire occasionnellement le porte-parole des quelques familles touchées et donc concernées au premier chef par cette dramatique situation, malheureusement laissées-pour-compte par nos institutions. A ses yeux, celles-ci ont apparemment d’autres soucis considérés prioritaires ou plus importants que les périls qu’encourent les quelques centaines voire milliers de jeunes qualifiés avec légèreté et mépris d’aventuriers.