Le général Phillipe Rondot, qui était dans les services de contre-espionnage (DST) à l'époque des faits, écarte la thèse d'une bavure de l'armée algérienne.
L’affaire de l’assassinat en 1996 des moines de Tibhirine, exhumée il y a plus d’une année, pour des causes occultes, s’est avérée, en fin de compte une tempête dans un verre d’eau. Le général Philippe Rondot, «conseiller pour les opérations spéciales» au sein du ministère français de la Défense et spécialiste de l’Algérie à la DST, qui a été entendu hier à Paris par les juges Marc Trévidic et Nathalie Poux, a remis les choses à leur place.
L’AFP, qui cite le procès-verbal de l’audition, indique que celui qui était chargé de mission dans les services de contre-espionnage français à l’époque de l’enlèvement des moines soutient que l’assassinat était l’úuvre du Groupe islamique armé (GIA) dirigé alors par Djamel Zitouni. Il ne subsiste aucune ombre de doute. Pour le général français, «c’est un groupe affilié à Zitouni, Zitouni lui-même» qui est responsable de l’enlèvement et de l’assassinat des moines trappistes en février 1996.
L’Agence France Presse qui a consulté le procès-verbal de l’audition rapporte que le général Rondot soutient en revanche que «les services algériens ont probablement laissé fonctionner Zitouni car celui-ci a éliminé beaucoup de groupes concurrents. Autrement dit, il a éclairci le terrain», a-t-il précisé. Mais cela relève surtout de la fantaisie après son affirmation que l’assassinat des moines trappistes est le fait du GIA et non pas, comme cela a été soutenu auparavant, par l’armée algérienne accusée, faut-il rappeler, de «bavure». Donc, la thèse d’une instrumentalisation ou manipulation de Djamel Zitouni, voire d’une bavure de l’armée algérienne, n’a plus aucun crédit. Déjà entendu par le juge Jean-Louis Bruguière, alors chargé de l’enquête, en décembre 2006, le général Rondot avait livré une version similaire, affirmant parallèlement n’avoir «aucun élément qui irait dans le sens d’une manipulation des services algériens». «Je n’ai aucun élément crédible que j’aurais pu recueillir qui permettrait d’affirmer que les services algériens (...) auraient été complices» de l’enlèvement, a-t-il répété hier.
La déposition du général Rondot mettra peut-être fin aux assertions de l’ancien attaché de défense à l’ambassade de France à Alger, le général François Buch Walter, qui avait affirmé au juge que «le massacre des moines résulte d’une bavure de l’armée algérienne». En réalité, tout le tapage politico-médiatique a été déclenché par cette déclaration, sous l’œil bienveillant évidemment de Patrick Baudoin, avocat bien connu des cercles qui agitent sporadiquement dans l’Hexagone la question du «qui tue qui» en Algérie. L’exhumation de l’histoire de l’assassinat des moines trappistes a ébranlé les relations entre Alger et Paris. La levée du secret-défense et la «déclassification de 105 documents» n’ont visiblement pas conforté les thèses de Buch Walter.