
En condamnant, en des termes très durs, hier mardi les dirigeants d’Afrique « qui changent les lois pour s’accrocher au pouvoir », le président américain, Barack Obama, a, en même temps que Ben Ali ou Biya, clairement visé le président algérien Abdelaziz Bouteflika dont on comprend maintenant pourquoi il ne l’a jamais rencontré.
En se faisant réélire pour un troisième mandat auquel il n’avait pas droit – après avoir trituré la Constitution de 1996 – et avec un score de 90,24 %, le chef de l’Etat algérien s’était, en effet, classé brillamment en 3è position dans Top 10 des dictateurs les mieux élus dans le monde, juste derrière Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, l’inamovible maître de la Guinée Equatoriale qui s’était donné 97,1 % des suffrages et Noursoultan Nazarbaïev, le seigneur du Kazakhstan, crédité de 91% des voix. Bouteflika devançait des despotes chevronnés comme Robert Mugabe du Zimbabwe (85,5%), Omar Hassan el-Béchir du Soudan (86,5%), Gurbanguly Berdimuhamedow du Turkménistan (89,23%) Islom Karimov d’Ouzbékistan (88,1%) et même Zine el-Abidine Ben Ali, Tunisie: 89,62% !
Le camouflet  est d’autant plus violent que Barack Obama parlait devant 120 jeunes  leaders de la société civile de plus de quarante pays d’Afrique qu’il a  préféré recevoir,  plutôt que de réunir des chefs d'Etat ou de  gouvernement, à l’occasion des cinquante ans d’indépendance en Afrique «  pour discuter avec eux de leur vision de l'Afrique pour les 50 ans à  venir » Or, le président Bouteflika était parmi les leaders africains  présents à Huntsville (Canada), au Sommet du G8, en juin, – avec le  Sénégalais Abdoulaye Wade, le Nigérian ¬Goodluck Jonathan, le  Sud-Africain Jacob Zuma, le Malawite Bingu wa Mutharika et l’Éthiopien  Mélès Zenawi – à qui Obama avait annoncé qu’il comptait convier  18 de  ses homologues africains en août prochain à Washington afin de célébrer  le 50e anniversaire des indépendances de leurs pays respectifs. 
Non  seulement le président des Etats-Unis a décidé de procéder autrement en  conviant plutôt les leaders des sociétés civiles africaines, mais il a  pourfendu les dirigeants d’Afrique dans un discours où Bouteflika est  décrit point par point.
 Premier point : "Si vous y réfléchissez,  dans les années 1960, lorsque vos grands-parents, arrière-grands-parents  se battaient pour l'indépendance, les premiers dirigeants disaient tous  qu'ils étaient pour la démocratie…" Bouteflika fait partie de ces «  premiers dirigeants »
Deuxième point : "Et lorsque ces dirigeants ont  été au pouvoir pendant un certain temps, ils se sont dit : « J'ai été  un si bon dirigeant que pour le bien du peuple, je dois rester en place.  Et c'est comme cela que l'on commence à changer les lois, à intimider  et à emprisonner des opposants… » Bouteflika se reconnaîtra sans peine.
Cette sortie d’Obama est capitale pour analyser les futures relations Algérie-USA.
Elle implique une nouvelle stratégie d’alliances américaine.
«  Certains d'entre vous deviendront un jour dirigeants de vos pays.  L’Afrique appartient aux Africains, mais nous ferons en sorte que vos  voix soient entendues pour que vous puissiez saisir ces opportunités.  Mais ne suivez pas les traces de la génération des indépendances qui  s'est accrochée au pouvoir depuis l’indépendance ! Veillez plutôt à  enraciner les principes démocratiques dans vos pays… », a dit Obama.
"Nous  sommes à la recherche de dirigeants qui savent que le fait de donner  plus de pouvoir aux citoyens est dans l'intérêt de tous", a dit Mme  Clinton
Dans le monde actuel, "un pouvoir basé sur un rapport  hiérarchique allant du sommet à la base n'est plus tenable", a-t-elle  poursuivi. 
Un langage sans équivoque.
R.B.