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Wikileaks.org, le site qui diffuse des fuites du monde entier


Wikileaks.org, le site qui diffuse des fuites du monde entier

Julian Assange, cofondateur de Wikileaks.org © Creative Commons by-sa 2.0 / New Media Days

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Par Guerric Poncet

Pour certains, Wikileaks.org incarne l'avenir du journalisme d'investigation. Pour d'autres, c'est le site à abattre. Une chose est sûre : il fait scandale. La vocation de ce portail atypique est de diffuser des documents sensibles, que ce soient des textes, des photos ou des vidéos.
Déjà célèbre dans le monde anglophone, Wikileaks a fait récemment son entrée dans les médias français, grâce notamment à une vidéo diffusée lundi 5 avril . Elle montre au grand jour ce qui ressemble à une bavure de l'armée américaine en Irak, avec des militaires abattant des civils (peut-être armés) ainsi que deux employés de l'agence de presse Reuters , puis détruisent le véhicule venu leur porter secours.
Depuis plusieurs jours, Wikileaks menaçait de diffuser cette séquence, enregistrée en 2007 depuis un hélicoptère Apache ayant participé à l'attaque. Reuters, de son côté, n'a jamais réussi à obtenir la vidéo par les voies légales, alors que le Freedom of Information Act aurait dû le lui permettre. Visite guidée de Wikileaks, les plombiers (leak = fuite) du scoop moderne.

Comment fonctionne Wikileaks.org ? Le portail a été créé en 2006 par The Sunshine Press, un organisme à but non lucratif financé exclusivement par les dons "de défenseurs des droits de l'homme, de journalistes d'investigation, de technophiles et du grand public". Une interface spécifique permet aux informateurs d'envoyer des documents de façon anonyme. Parfois, les fichiers sont illisibles en l'état, et Wikileaks fait appel à des spécialistes du décryptage. Les informations sont ensuite vérifiées par l'équipe du site puis éventuellement publiées.

À quoi s'intéresse le site ? À tout ce qui est sensible. Le site dit avoir reçu des centaines de milliers de fichiers concernant "des banques corrompues, le système pénitentiaire américain, la guerre en Irak, la Chine, les Nations unies". En revanche, tout n'est pas publié : l'équipe fait le tri, entre ce qui permet de révéler la vérité et ce qui ne ferait que dévoiler des secrets légitimes (procédés industriels, votes à huis clos, etc.).

Les faits d'armes. Parmi les publications les plus marquantes de Wikileaks, il y a évidemment les informations relatives au Pentagone (règles d'engagement des troupes en Irak, traitement des prisonniers de Guantanamo, etc.) qui ont très vite fait la une des médias américains. D'autres documents sur la faillite de l'Islande et l'accord Icesave, sur la liste noire de cybercensure australienne*, ou encore sur les attentats du 11 septembre 2001 ont consolidé la réputation de sérieux du site.
En 2008, Wikileaks a publié des captures d'écran du compte e-mail personnel de Sarah Palin, alors colistière de John McCain dans la course à la Maison-Blanche, prouvant ainsi qu'elle utilisait son e-mail personnel pour ses échanges professionnels, contrairement à la loi. La même année, le portail subissait un revers judiciaire après avoir publié des centaines de documents sur les activités offshore de la banque suisse Julius Baer, avant que le juge ne revienne sur sa décision.
Plus récemment, Wikileaks a publié un rapport secret de la CIA, qui explique comment convaincre les pays européens d'envoyer davantage de troupes en Afghanistan. Pour la France, le document conseille d'insister sur "l'impact positif de la mission pour les civils" (afghans) et de "culpabiliser l'opinion publique" en évoquant les conséquences catastrophiques d'un retour des talibans.

Qui se cache derrière Wikileaks.org ? Beaucoup d'anonymes travaillent pour Wikileaks, mais l'équipe dirigeante n'hésite pas à s'afficher. L'Australien Julian Assange (photo), cofondateur du site, donne parfois des interviews et participe à des conférences. À propos de la vidéo publiée lundi 5 avril, il a déclaré vouloir montrer "ce à quoi ressemble vraiment la guerre moderne" avec "un impact politique maximum", prouvant au passage qu'il "ne faut pas croire les rapports de l'armée américaine sur parole". À la fin de cette vidéo, un générique donne aussi quelques autres noms de collaborateurs de Wikileaks, dont ceux de Ron Gonggrijp, spécialiste du cryptage, ou Birgitta Jondottir, membre du Parlement islandais.
Le site est hébergé par le suédois PeRiQuito (PRQ), célèbre pour avoir accueilli The Pirate Bay pendant un temps. Mais les fichiers du site ne sont pas tous centralisés sur les mêmes serveurs. Pour l'avenir, les regards sont tournés vers l'Islande, où un projet de loi (Icelandic Modern Media Initiative, IMMI) pourrait garantir la confidentialité des sources et les libertés sur Internet, à contre-courant de ce qui se profile dans de nombreux autres pays, y compris dans de grandes démocraties, comme la France . Wikileaks pourrait bien migrer vers ce "havre pour journalistes", comme le décrivent les défenseurs de l'IMMI.

Qui finance Wikileaks ? Le budget annuel de fonctionnement du site est de 600.000 dollars, mais seuls 370.000 dollars ont été récoltés cette année. La centaine d'attaques juridiques menées contre le site ont largement contribué à augmenter les coûts, et les dons ne permettent pas encore de rémunérer ceux qui se consacrent à plein temps à Wikileaks.

Un site en danger. En 2009, Wikileaks a été récompensé par le prix des nouveaux médias d'Amnesty International, mais il s'est aussi fait de nombreux ennemis, dans tous les milieux. Au point que la CIA a envisagé de détruire ce trublion en traquant les personnes à l'origine des fuites, selon un rapport secret de l'agence de renseignements, publié par... Wikileaks. Son financement pose aussi problème, et le site appelle désespérément aux dons sur sa page d'accueil.

REGARDEZ - L'interview de Julian Assange, cofondateur de Wikileak



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