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Le législatif, instrument de l’autoritarisme exécutif

 
Par : Mustapha Hammouche

L’APN a voté le nouveau code communal. L’affaire a été rondement menée, malgré l’absence des députés de certains partis, l’abstention d’autres et la sortie a été emballée par d’autres encore. Le ministre de l’Intérieur avait prévenu “l’Assemblée nationale”, théoriquement détentrice des prérogatives d’amendement. “Les amendements qui touchent à l’équilibre du pouvoir entre l’État et la collectivité ne seront pas acceptés”, a-t-il déclaré, avant même que ne débute l’examen du projet de loi. De fait, président de la commission et député FLN, il a même inventé le contre-amendement oral pour conformer le mode d’élection du maire aux dernières orientations de l’Exécutif. Les élus RND allaient s’en offusquer avant qu’il ne comprenne le sens du putsch du président de la commission contre l’avenant proposé par sa propre commission.
Dans son intervention, en clôture du vote, Ould Kablia a ressenti l’obligation de rassurer les déçus du code communal : le texte régira les collectivités de base pour… “cinq ou dix ans” ; ensuite “on trouvera les moyens d’examiner de quelle manière doit fonctionner l’État algérien dans le cadre de la répartition des pouvoirs entre l’autorité centrale et les autorités décentralisées”.
Voici l’astuce : proclamer provisoire ce qui peut être contestable, quitte à ce que le provisoire dure “cinq à dix ans” et le proclamer à la face d’une “représentation nationale” qui n’est pas autorisée à apporter des amendements qui touchent à l’équilibre du pouvoir entre l’État et la collectivité. Serait-ce un domaine trop sérieux pour le laisser à la portée du soi-disant pouvoir législatif ?
Si on sait “parler le Zerhouni”, comme l’écrivait mon ami Benfodhil, on comprendrait forcément le “Ould Kablia”. Avec lui, on n’a pas à regretter la candide spontanéité de son prédécesseur, celle qui combine l’assurance des vicaires de premier rang d’une dictature et leur maladresse quand ils veulent la faire passer pour une République. Quand ils parlent d’évolution démocratique, ils révèlent, sans s’en rendre compte, leur intention de blocage politique. Dans quelle démocratie peut se coudre une loi pour la circonstance et se donner cinq ou dix ans, après un empire de douze ans, pour se décider de ce que sera “l’équilibre du pouvoir entre l’autorité centrale et les autorités décentralisées”. Des autorités décentralisées dont on se passe allègrement pour l’heure.
C’est au nom de la démocratie que Ould Kablia décrète qu’il n’y aura pas de nouveaux partis et qu’il continuera à organiser la tyrannie législative de la sainte Alliance, contrôlée par la toute-puissance exécutive. L’argument est imparable : “Il y a des chefs de parti qui sont à la tête de leur formation depuis quinze ans !” Cela, c’est après qu’il eut fait campagne pour une révision “législative” de la Constitution qui permette à Bouteflika de boucler un troisième mandat et… quinze ans de règne. En attendant mieux.
Il faut écouter Ould Kablia : derrière un mimétisme discursif démocratisant, c’est révélateur de la profondeur culturelle du fanatisme autoritaire qui enchaîne le pays.

M. H.
musthammouche@yahoo.fr  

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