Le président Bouteflika a déclaré que “les consultations” restent ouvertes à ceux qui veulent rejoindre le dialogue.
La réconciliation est toujours ouverte, aussi. C’est une caractéristique nationale : il y a une date de début à tout, mais jamais de date de fin. Cela vous donne un chantier de métro qui débute vers 1982 et se continue au siècle suivant. Idem pour l’autoroute Est-Ouest, le tramway d’Alger, pour la rocade Boudouaou-Zeralda, le programme de relance de la croissance, le PNDA/R…
La moitié du budget du programme 2010-2014 est dédiée aux “restes à réaliser” du programme 2005-2009 : ce qui veut dire que le programme 2005-2009 ne sera, en fait, clôturé qu’en 2014 ! Si tout se passe bien. Car, en fait, l’Algérie, si l’on s’en tient à la justification officielle du budget, on serait en train de mettre en œuvre deux programmes : celui à compléter de 2005-2009 et celui de 2010-2014. Comment un État, qui ne peut pas finaliser un premier programme, pourra-t-il en réaliser deux dans le temps normalement imparti au suivant ?
La gaffe, injustement attribuée à feu Kaïd Ahmed, sur la promesse de réalisation du plan quadriennal, “dans dix ans s’il le faut”, on y est, est dans l’acte. Comme pour l’univers, l’infinité est à la base de la pérennité du système. Dès qu’il est question de mettre un point final à l’erratique aventure, le système réagit violemment à l’idée de rupture. Au programme structuré du Congrès de la Soummam, on opposa un Congrès de Tripoli qui… n’a jamais été formellement clôturé. D’un certain point de vue, il est toujours ouvert.
Plus tard, c’est la réforme d’après-1988, Boudiaf et, ensuite, la limitation des mandats présidentiels qui subiront les putschs restaurateurs. Le règne a toujours été de durée ouverte : il fallait rectifier une Constitution qui introduisait l’idée de limitation du pouvoir dans ses prérogatives comme dans ses délais.
Même la guerre n’est pas finie, et si on n’est pas avec le pouvoir révolutionnaire en place, on est avec la France. C’est important pour le système que la révolution ne soit jamais achevée. Cela exclut toute remise en cause du cours des choses : ce ne peut être qu’une révolution contre la révolution, c’est-à-dire une réaction. D’ailleurs, le Président replace les réformes promises dans le nécessaire continuum politique : “En ultime étape, le peuple souverain aura à se prononcer sur la consolidation de l'État de droit et de la démocratie dont il est la source, et dont il a été l'artisan depuis la libération du pays au fil des différentes étapes de notre histoire contemporaine”, dit-il. La démocratie a donc toujours été là ! Une œuvre populaire continue, sans contrariété de la part du pouvoir, et toujours ouverte.
Pourquoi donc s’inquiéter de ce qui est ou n’est pas accompli, puisque tous les chantiers sont ouverts et que le système sera là, le même, pour nous assurer la permanence de cette ouverture ? C’est peut-être à cette continuité politique que le Président fait référence quand il rappelle que l’œuvre de réforme ne va pas sans garder à l’esprit “les principes, les constantes et les intérêts de la nation”. Ces éléments, c’est le système qui en a la garde exclusive. Son emprise politique se légitime par sa mission historique, éternelle.
M. H.
Un pouvoir ouvert, sauf au changement
Par : Mustapha Hammouche