Mouhib Khatir, le maire de Zéralda victime d'un complot.
Le maire de Zéralda ne fêtera pas l’Aid El Kebir avec sa famille. Ainsi en a décidé la juge en charge de l’instruction de ses dossiers.
Pourtant de nombreux observateurs parmi eux des juristes s’attendaient à un non-lieu sur son affaire dite des "portables" à peine 5 jours avant l’Aid. Un chroniqueur du quotidien L’Expression dans sa livraison du 17 octobre dernier, citant une source sûre, déclarait tout confiant que son dossier allait trouver une issue procédurale dans la semaine qui suit. L’accusé qui entame son 34ème jours de grève de la faim se meure à la différence générale des autorités compétentes.
Mouhib Khatir aurait écrit au président de la cour de Blida qui lui a répondu favorablement sans pour autant réussir à raisonner cette juge. Les objectifs de l’instruction restent opaques même pour les avocats, complètement écartés pour vérifier les éléments à charge conformément à la loi. Qui peut voir le maire pour s’enquérir de son état de santé puisque son statut de détenu à titre préventif ne donne droit qu’à une seule visite par semaine pour 3 personnes (sa femme et 2 de ses 6 enfants) pendant 15 minutes. Il refuse toute libération par la petite porte et il demande une audience publique pour affronter ses accusateurs et prouver son innocence.
Il existe vraiment un bras de fer entre la juge d’instruction et le collectif des avocats. En effet, selon son épouse, après avoir délaissé le dossier de son mari depuis près de deux mois, ce magistrat décide subitement de le convoquer pour le 31 octobre dernier afin de le confronter à ses accusateurs alors que le dossier a été clôturé avec la décision, le 8 septembre, de l’accusé de ne plus s’exprimer sur ce sujet que devant un juge en audience publique. On peut supposer que l’intéressé a dû constater une partialité dans le déroulement de l’instruction. Le hic est que cette convocation lui parvient à son domicile alors que c’est la même juge qui l’a mis en prison. Toujours selon cette source, la juge qui a cumulé un retard énorme dans le traitement des dossiers dont elle a la charge pour des raisons personnelles (maladie de sa mère), a fait venir en même temps que le maire une vingtaine de personnes. S’agissant des affaires pénales et donc sensibles, un minimum d’une heure est nécessaire pour l’instruction de chacune des affaires. Soit au total au moins 20 heures. Or, une journée de travail pleine dépasse rarement 10 heures y compris les heures supplémentaires. Alors on est en droit de se demander pourquoi jouer avec les procédures judiciaires de cette manière et que cachent ces manœuvres dilatoires et pour le compte de qui ?
Cette convocation est délibérément établie pour justifier une prolongation de la détention préventive dont les accusés emprisonnés n’ont en aucune responsabilité sinon d’être en permanence à la disposition de la justice et souvent au détriment de leur liberté et leur santé pour dans la majorité des cas des dossiers vides et qui ne nécessitent aucune instruction. La première session de la détention préventive du maire expire le 6 novembre 2011, soit le même jour que la fête religieuse et, ce conformément à l’article 125 de la loi 86-05 du 4 mars 1986. Normalement, s’agissant d’un accusé emprisonné, la juge si elle estime nécessaire une prolongation devra faire une demande avant cette date et non après. La présomption d’innocence devra jouer au bénéfice de l’accusé et non en fonction de l’agenda du magistrat. Or, cette juge reconvoque le maire pour le 10 novembre 2011, quatre jours après l’expiration de sa détention préventive réglementaire.
La théorie du complot
De nombreux observateurs, qui n’épousaient pas au départ la thèse du complot politique, commencent à l’envisager sérieusement. Comment expliquer le silence des autorités judiciaires et politiques devant cette forme d’arrestation spectaculaire par la brigade antiterroriste pour une simple présentation comme témoin devant un juge d’instruction. Le maintien en détention préventive de Mouhib Khatir, sans donner, ni indiquer à ses avocats l’origine et l’existence matérielle de la plainte. La multiplication des dossiers au nombre de cinq sans fournir d’arguments juridiques. La preuve ? Mouhib en sort à chaque fois acquitté. On apprend qu’à ce jour et en dépit de son état de santé à l’intérieur de la prison, des forces occultes cherchent à le nuire en lui collant d’autres affaires. La dernière en date et après celle de d’outrage à fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions et pour laquelle il a été innocenté le 29 août 2011, est une tentative pour l’inculper d’une organisation d’émeute dans la prison de Hadjout sous prétexte d’avoir été surpris en train de lire et de prendre des notes sur deux ouvrages disponibles dans la bibliothèque de la prison. En somme, tous les prétextes sont bons pour trouver un motif afin de le condamner et de l’empêcher de sortir par crainte qu’il puisse réactiver les plaintes contre ses détracteurs.
Il n’est pas normal qu’on s’en prenne à son épouse en l’inculpant de diffamation pour avoir externaliser le dossier de son mari à travers la chaîne de télévision de France 24. Il est aussi plus qu’anormal qu’un collectif de 5 avocats constitué pour sa défense n’arrive pas à dénoncer tout haut la dérive de cette affaire qui dévie de son cadre juridique. Comment une équipe soudée de juristes n’ont pas réussi à porter le problème de leur client à la hiérarchie judiciaire et mettre fin à son arbitraire. Comment des lettres ouvertes au Président de la République par sa famille, et une organisation internationale comme Transparency International n’ont pas fait bouger les choses, voire au moins faire parler les officiels de cette affaire.
Au-delà donc du 6 novembre 2011, date de l’expiration de la détention préventive, il n’y a aucune raison valable pour justifier le maintien en prison du maire de Zéralda. Ceci confirme encore une fois les propos graves tenus par Mokhtar Lakhdari, directeur central au ministère de la Justice et rapportés par www.dna-algerie.com. On est en train incontestablement de pousser les gens à transgresser la loi pour obtenir leur droit. Toute la question est : à qui profite une telle situation ?...
Rabah Reghis, consultant/chercheur