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L’abstention, ce grain de sable qui “habite” le pouvoir

 

Par : Mustapha Hammouche

Après Ouyahia, c’est Ould Kablia qui confie être “habité” par le spectre de l’abstention. On croyait que les “réformes” en cours avaient vocation à assurer la sincérité du scrutin et, donc, à ramener les Algériens vers les bureaux de vote. Sinon, cela voudrait dire qu’en forçant la marche vers les élections législatives, malgré ses appréhensions, le gouvernement prend volontairement le risque de remplacer, mai 2012, une assemblée nationale élue par 26% des électeurs par
une autre assemblée d’égale légitimité. Et celle-ci aura pour immédiate mission de voter la révision constitutionnelle qui donnera corps à “la réforme approfondie” annoncée par le président de la République le 15 avril dernier.
En plus des lois récemment votées et qui sont réputées avoir projeté notre vie publique au niveau démocratique, le Premier ministre et les ministres développent un second argument implicitement destiné à nous convaincre d’aller voter : les islamistes n’arriveront pas à s’entendre et, même associés, ils n’auraient aucune chance de l’emporter. D’où Ouyahia, Belkhadem et Ould Kablia tirent-ils cette conviction, maintenant que ni la manipulation ni la fraude ne peuvent théoriquement plus intervenir pour forcer le résultat électoral ? Le pouvoir prétend compter sur les Algériens qui ont “éprouvé l’islamisme” et la société qui “a ses spécificités et ses valeurs sociétales qui ne ressemblent pas forcément à ce qui existe ailleurs où les votes ont sanctionné des politiques plutôt que des valeurs”. Autrement dit, en Algérie, il n’y a pas de politiques à sanctionner et l’instrument — islamiste — de sanction devient sans objet !
Après avoir prédit ce qui se passera, le ministre conseille aux Cassandre qui nous prédisent un 1991 bis : “Restons sur la réserve et attendons ce qui se passera.” Si cette sage posture démocratique conduisait l’action publique, ces conjectures, qui, curieusement, sont le fait des officiels et non de commentateurs en mal de prospective, n’auraient même pas lieu d’être, en effet.
C’est à se demander si le message ne s’adresse pas plutôt aux dirigeants islamistes qu’aux électeurs : le pouvoir, vous pouvez le partager, pas le prendre. Ouyahia l’a clairement exprimé : “Le pouvoir, ce n’est pas un cadeau qu’on cède facilement.”
Dans sa conception patrimoniale du pouvoir, l’axe FLN-RND ne conçoit pas de céder plus de 51% du pouvoir. Cette règle de souveraineté sectaire sur le pays est valable pour les ambitions islamistes mais
aussi pour les partis du camp dit démocratique. Ouyahia a même désigné le profil politique qui peut être accueilli dans la maison en citant un parti pas encore agréé mais dont l’initiateur a, “dès le début”, soutenu le programme du Président. Car en 2012, il sera encore question de programme du Président dans une Assemblée dont on devrait, pour l’heure, ignorer la couleur politique !
Le noyau dur, nécessairement majoritaire, le FLN et le RND, a délégation de tutelle sur la nature politique de l’Assemblée et prospecte  déjà pour la future “Alliance”.
En un mot, et malgré les promesses, les lois nouvelles, les réformes, tout est su d’avance. Sauf le taux d’abstention. Or, l’abstention est la variable la plus aisément “observable”. Tout est programmable, sauf le taux d’abstention. Comme d’habitude.


M. H.

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