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Les enfants de la mort

 

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En ces temps confus et confucéens, on peut s’interroger sur le sens d’un Boudiaf mort. Et sur cette question d’héritage, au centre de tous les conflits algériens, qui déchire familles, tribus, clans et partis, civils et militaires. Qu’auront laissé les morts ? Ben Bella, pas grand chose de son règne chaotique et mégalomaniaque, à part cette belle image du drapeau algérien hissé à l’ONU, image censurée d’ailleurs par tous ses successeurs, l’actuel compris. Boumediène, une dictature patriarcale et une sécurité militaire qui, jusqu’à aujourd’hui, met plus d’énergie à traquer les opposants qu’à en finir avec la corruption d’Etat. Que laissera Chadli, dont on dit qu’il est proche de la fin ? Le souvenir d’un pays ruiné, mais revivifié par de nouvelles libertés médiatiques, politiques et syndicales. Zeroual n’est pas mort, mais aura laissé un pays en guerre, tout en laissant l’image d’un homme droit.

Quant au président Boudiaf, il n’aura pas eu le temps de déposer un héritage, tout juste une fugace image, vision furtive de l’entrebâillement d’une fenêtre sur ce qu’est un Président. Quelqu’un qui parle à son peuple et l’écoute, sans mépris ni égocentrisme, en restant au centre de principes fondamentaux et oublieux des équilibres et des compositions. Quant à l’actuel président, on ne sait pas trop ce qu’il laissera, lui qui n’a jamais dit un mot sur Boudiaf ou les morts algériens. Une justice féodale, un pays figé, gangrené par la corruption et l’informel, aux mains d’un régime de vieillards régionalistes ? Certes, il aura remboursé la dette extérieure du pays, mais avec 200 milliards de dollars de réserves de change, c’était la moindre des choses. Oui, il aura aussi construit des routes. Il laissera donc l’héritage d’un voyageur solitaire sans attache, prêt à embarquer avec n’importe qui. Triste héritage pour quelqu’un qui a assisté à la naissance de l’Algérie et grandi avec.
 

 

Chawki Amari

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