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L’histoire de l’Algérie indépendante est l’histoire de la perversion d’un peuple.

 

Posté par Rédaction LQA

 

Adel HERIK

Le problème de notre pays est le problème de la totale perversion de toute une nation : peuple, intelligentsia et dirigeants. Les gens de ma génération, qui ont connu l’Algérie de 1962, le savent. 50 ans après, ce n’est plus le même peuple, ni la même intelligentsia, ni les mêmes dirigeants – je parle de ceux qui avaient mené le combat pour l’indépendance, depuis les années 1920.

Aujourd’hui, l’Algérie n’a plus aucune volonté, plus aucune ambition. Les dirigeants volent des milliards, les intellectuels cherchent toutes sortes de combines pour arracher quelques avantages matériels et le peuple court sans cesse derrière les miettes. Plus de travail, plus d’abnégation, plus de fierté, plus d’ambition, plus de morale. Rien que la perversion et la médiocrité à perte de vue. C’est la même logique qui est à l’œuvre du sommet de l’État jusqu’à la base : comment arracher sa part de la rente. Cette part se chiffre en millions ou milliards de dollars pour les uns et en milliers de dinars pour les autres, c’est un fait, mais il y a à la base la même volonté de jouir de richesses que l’on n’a pas produites. L’État algérien, en ayant opté dès le départ pour une logique de distribution de la rente, a perverti le peuple et en a fait, au bout de 50 ans, un peuple médiocre, sans âme, sans fierté. L’histoire de l’Algérie indépendante est l’histoire de la perversion d’un peuple.

Voilà le vrai problème.

C’est dans ce climat de démobilisation générale et de course effrénée derrière les flots de dollars générés en abondance par les gisements pétroliers et gaziers du Sahara que quelques milliers d’idéalistes tentent vaille que vaille de faire bouger une intelligentsia et un peuple qui n’ont plus aucune ambition, ni aucun désir de sortir de la torpeur et de l’engourdissement. Le pays coule lentement mais sûrement noyé par les flots de pétrodollars. Dépenser, dépenser, dépenser. Manger, manger, manger. Voler, voler, voler. La machine qui broie l’argent de la rente broie en même temps le pays et le condamne à végéter dans la médiocrité et à s’enfoncer chaque jour un peu plus dans tous les domaines.

Le peuple algérien a besoin d’une longue, très longue thérapie avant de retrouver son état normal, celui qui était le sien en 1962. Cette thérapie, qui peut la lui administrer? Je ne vois que les intellectuels et militants encore capables de réfléchir, de questionner le réel, de s’indigner et de refuser l’humiliation. C’est un travail de longue haleine et ceux et celles qui veulent bien s’y consacrer doivent s’armer de patience et élargir petit à petit le cercle des « éveillés ». Ils doivent diffuser en permanence leur message subversif afin de contrer la machine du système qui broie les volontés et transforme les êtres humains en véritables zombies, totalement inconscients, insensibles et soumis.

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