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Prédation et pouvoir

Par : Mustapha Hammouche

L’ancien ministre de la Justice a révélé, sans susciter de démenti, que Saâdani l’a appelé, le jour même de son intronisation, le 29 août dernier, en tant que secrétaire général du FLN pour lui demander “amicalement” d’extirper le nom de Chakib Khelil de l’affaire Sonatrach 2.
D’autres “personnalités”, ayant été citées dans des affaires de malversations, ont vu récemment leurs noms retirés du dossier qui les impliquait. Sur presque tous les procès traitant, ces dernières années, de crimes économiques, planaient ainsi des noms de “personnalités” ayant délégué à des lampistes la peine de payer pour eux. Il n’y a pas que l’affaire Khalifa qui ait laissé l’impression d’un procès pour menu fretin. La vox populi n’est d’ailleurs pas dupe de cette pratique et ne fait plus mystère de ses bénéficiaires dans ses discussions.
L’impunité a permis à des torrents de transferts plus ou moins douteux de faire prospérer une puissante caste composée de fortunes dont l’ampleur et l’origine constituent, pour l’opinion générale, un secret de Polichinelle. Mais il n’y a pas que la position de pouvoir qui autorise ce genre d’enrichissements illicites, rapides et démesurés. Des ordonnateurs peuvent, forts de leurs prérogatives, engraisser des proches qui servent de prête-noms à leurs propres combines ou des relations qu’ils utilisent ensuite comme sponsors de campagne. Le gré à gré est la formule toute indiquée pour perpétrer cette espèce de procédé du “tiers payant” au bénéfice d’un “entreprenariat choisi”.
Parallèlement, l’enrichissement “spontané” a été banalisé, et il est devenu, peu à peu, socialement amoral de s’interroger sur l’origine des richesses privées. Dans un pernicieux processus de “démocratisation” progressive de la débrouille, de l’activité économique et du commerce parallèles, du viol de la réglementation, la question du procédé d’enrichissement ne se pose plus. Dans une telle culture peuvent alors s’engouffrer les “réussites” les plus coupables.
Il semble que ces fortunes providentielles aient acquis un niveau de puissance et de structuration politique les poussant à ambitionner le monopole du pouvoir politique. Les premiers signes de ce mariage pouvoir-argent se révèlent dans le rôle devenu décisif des finances dans les campagnes électorales. Mais la preuve la plus éclatante fut celle délivrée par les élections sénatoriales de décembre 2009 : les voix des “grands électeurs” furent tarifiées. À cette occasion, le RND, par la voix de Miloud Chorfi, et le FLN, par la voix de Bouhadja, reconnurent indirectement la commercialisation des sièges de sénateurs en déclarant que “la vente des voix est un acte de corruption” que l’un et l’autre condamnaient.
Le même Bouhadja et ses compagnons se retrouvent, aujourd’hui, dépassés par ce que des responsables du parti appellent eux-mêmes le  “clan des milliardaires”. Inutile de lister la composante de ce clan ou de rappeler la rapidité suspecte de l’enrichissement de la plupart de ses membres et la fulgurance de leur essor politique !
Le fléau du détournement et de la corruption est une permanence du système algérien. Sa première “constante”. Ses effets sont tels qu’aujourd’hui, l’argent mal acquis conteste leur influence aux pouvoirs institutionnels traditionnels et se pose en prétendant au monopole du pouvoir.

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