Le DG de Sanofi-Aventis Algérie condamné à une année de prison avec sursis
La justice algérienne a condamné Thierry Lefebvre, directeur général de Sanofi- Aventis Algérie. Elle a également établi la responsabilité de cette filiale algérienne du géant mondial de l’industrie pharmaceutique.
Lyas Hallas - Alger (Le Soir) - Le verdict a été prononcé très tôt hier, vers 8h30, par le pôle judiciaire spécialisé près la cour d’Alger. Poursuivis pour des infractions de majoration de valeur dans le commerce extérieur, engendrant un transfert de sommes importantes de devises à l’étranger, Sanofi-Aventis Algérie a écopé d’une amende de deux milliards de dinars (200 millions d’euros environ) et Thierry Lefebvre, directeur général de cette filiale du pharmacien français, a été condamné à une peine d’une année de prison avec sursis. Interviewé en février 2011 par Le Soir d’Algérie à propos de cette histoire de surfacturation, Thierry Lefebvre déclarait : «Le jour où je serai informé, je pourrai m’expliquer sur ce malentendu. Si effectivement il y a un problème, il est impossible que nous ne puissions pas apporter d’explication. Il y a une explication. Nous ferons tout pour clarifier la situation. Sanofi-Aventis a toujours travaillé avec le gouvernement algérien et dans le plus total respect des lois algériennes.» Or, il savait ! Il convient ainsi de préciser que l’affaire a éclaté bien avant que le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière ne s’intéresse au sujet des surfacturations. C’était au courant de l’été 2010. Des P-V de constat d’infractions à la législation de change et des mouvements de capitaux ont été établis par les services des Douanes algériennes de l’aéroport international Houari-Boumediène d’Alger suite aux contrôles effectués sur une série d’opérations d’importations de Sanofi-Aventis Algérie. Mesures prises, précise-t-on, sur la base d’un document allemand trouvé dans les colis de Sanofi-Aventis Algérie et qui faisait état des prix réels des produits. «L’achat de 25 kg de Glimepiride, un principe actif entrant dans la fabrication des médicaments antidiabétiques, acquis par Sanofi Winthrop Industrie France pour la modique somme de 38 219,75 euros auprès de Sanofi-Aventis Deutchland, a été facturé pour Sanofi-Aventis Algérie à plus d’un million d’euros (1 139 410 euros) par Sanofi Winthrop Industrie France. Une opération ayant permis donc le transfert illicite de 1 101 191 euros. Les investigations menées par la suite ont démontré que le laboratoire usait de cette technique depuis 2008. Les transferts illicites porteraient, essentiellement, sur l’achat de Glimepiride ainsi qu’un autre principe actif, l’Alpha-Amylase.» (lire Le Soir du 28 février 2011). Sanofi-Aventis Algérie fait ses «emplettes» chez des filiales de ladite multinationale française du médicament qui, à leur tour, achètent chez d’autres filiales du même groupe ou chez des fournisseurs agréés par lui. C’est que la filiale algérienne majorait les prix d’achat des produits acquis auprès de sa société mère. Les surfacturations des médicaments ont été estimées en 2011 à 94 millions de dollars pour 34 produits importés par presque autant d’opérateurs, selon les chiffres fournis récemment par le ministre de la Santé, Djamel Ould Abbès. Il convient aussi de rappeler que les Douanes algériennes avaient déposé une plainte auprès du tribunal d’El Harrach qui s’est dessaisi de l’affaire peu de temps plus tard. Le procureur de la République avait requis lors du procès ouvert le 18 avril dernier par le pôle judiciaire spécialisé de Sidi M’hamed, près la cour d’Alger, une peine de trois ans de prison ferme contre Thierry Lefebvre assortie d’une amende à hauteur de deux fois le montant des transactions et contre Sanofi-Aventis Algérie une amende de quatre fois le montant des transactions. Le juge a demandé la comparaison des prix déclarés à l’importation par Sanofi-Aventis Algérie et ceux déclarés par le Groupe Saidal, opérateur public algérien et non moins partenaire de Sanofi-Aventis dans Winthrop Pharma Saidal, joint-venture qui a pour mission de mettre sur le marché des médicaments génériques de qualité Sanofi-Aventis sous la marque Winthrop. Ceux de Sanofi-Aventis Algérie sont cent fois plus chers que ceux de Saidal. Le préjudice causé à l’économie nationale se chiffre en milliards. Sauf que la Banque d’Algérie ne s’est même pas constituée partie civile…
L. H.