Par : Mustapha Hammouche
Belayat, l’actuel “animateur” du FLN, est connu pour son sens de l’humour. “Bouteflika a le droit d’être candidat, nous dit-il, mais nous pouvons choisir un autre”, sans sourire.
Comme s’il pouvait se concevoir que celui qui, d’emblée, posait la condition d’“une majorité significative” — sinon “il rentrait chez lui” — accepterait aujourd’hui d’aller à une élection sans garantie de plébiscite.
Même si Belayat fait semblant de l’ignorer, la situation même du FLN est tributaire de la décision de Bouteflika concernant sa candidature. En fait, la perspective nationale est suspendue à cette décision. Tout se passe comme si le pays est à l’arrêt en attendant que la question du quatrième mandat soit résolue. Rien ne doit être fait qui nécessite le règlement de ce préalable. Et la marche du pays est synchronisée de manière à ne pas bousculer la prise de décision du Président quant à son avenir politique.
Ainsi, la rédaction du projet de réforme constitutionnelle est réglée sur l’échéance 2014. On voit mal, en effet, le pouvoir dévoiler les éléments de cette réforme avant que le régime n’ait tranché entre l’option de la continuité et celle de la succession. De toute manière, la nature des changements qui seront apportés au texte dépendront entièrement de ce choix.
Ce sera, soit une Constitution pour un quatrième mandat, soit une Constitution pour une nouvelle présidence. On ne change pas un texte fondamental en fin de mandat pour améliorer
ses qualités démocratiques. Ce n’est pas, au demeurant, la vocation du
régime actuel ; si c’était le cas, on l’aurait éprouvé, depuis quatorze ans qu’il sévit.
La lenteur du processus de “réforme” constitutionnelle n’a pas d’autres raisons que la nécessité de la caler avec le rendez-vous électoral de 2014. On en connaîtra les contours de la prochaine version qu’à la veille de la présidentielle, en ayant juste le temps de la voir adoptée, comme ce fut le cas de la révision “démocratiquement” adoptée en 2008.
Entre-temps, tout ce qui peut renseigner sur les intentions du régime sera suspendu.
Y compris la désignation des chefs de parti du pouvoir, Monsieur Belayat. Et la classe politique, pouvoir et ralliés, faux et vrais opposants, fera du courant d’air pour donner un semblant de vie publique au pays. Mais chacun s’efforce de trouver les mots pour s’exprimer sans oser l’affront d’un éventuel changement de régime mais sans oser un franc pari pour la continuité.
La classe politique mais aussi la société resteront ligotées par cette pause imposée à la vie nationale. Chacun tentera de glaner ce qu’il peut comme acquis : les collectifs de fonctionnaires syndiqués, les commerçants, les prétendants aux logements sociaux…
Il y a un gouvernement pour cela, qui fera patienter, par la promesse et par la dépense, tout ce beau monde, impatient de décrocher quelques droits ou avantages avant que le pouvoir
n’ait encore renouvelé ou renforcé son assise.
Même la justice, confrontée à des dossiers aux prolongements politiques évidents, doit s’adapter au temps politique. Ce qu’illustre l’étonnant report du procès Khalifa à “une prochaine” session. Rien qui puisse dévoiler les intentions du régime pour l’année prochaine ne doit apparaître. On laisse le peuple fantasmer sur une évolution consentie d’en haut avant de le prendre dans son sommeil, une nouvelle fois, par surprise, comme d’habitude, pour un autre tour.
M. H.
musthammouche@yahoo.fr