La tenue aujourd’hui du 5e Conseil de l’Accord d’association entre l’Algérie et l’Union européenne sera l’occasion de mettre à plat les problèmes qui ont rendu quasi impossible une application productive et harmonieuse de l’accord entré en vigueur en 2005.
Un accord qui, au fil des ans, est devenu la cible de critiques de la part de l’Algérie qui reproche à son homologue européen d’avoir une vision mercantiliste de l’accord, et de tarder à mettre réellement en pratique ses engagements concernant l’investissement, la mise à niveau du tissu industriel et le transfert technologique. Le bilan avancé s’avère, aux yeux des décideurs algériens, clairement en défaveur de l’Algérie qui perd ainsi au change face à son partenaire. Les Algériens en veulent pour preuve le fait que l’accord, signé après de longues négociations, n’a ni favorisé les exportations algériennes hors hydrocarbures ni permis d’installer des IDE européens en Algérie. Pour illustrer ce bilan négatif, le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, a fait savoir récemment que « pour 1 dollar exporté vers l’UE, l’Algérie importe pour 20 dollars ».
Du côté des pouvoirs publics, on cite également les pertes fiscales qui se chiffraient, en 2009, à 2,2 milliards de dollars, et on les oppose à la quasi-inexistence des investissements étrangers qui n’ont pas dépassé les 500 millions de dollars. Du côté européen, on cible par contre « le manque de réformes structurelles en Algérie » et on minimise le déséquilibre des échanges. Pour le partenaire européen, la raison des importations trop importantes est à chercher du côté de « la surconsommation de l’Algérie » qui souffre d’un problème de demande intérieure excessive. Un argument comme un autre qui sert clairement à défendre la position européenne vis-à-vis d’un accord qui se révèle de toute évidence plus que bancal.
Cependant, l’argument, même s’il ne peut justifier à lui seul un déséquilibre aussi flagrant dans les échanges, reflète, tout de même, un aspect non négligeable de la hausse des importations algériennes qui ont représenté en 2008 plus de 20 milliards de dollars et qui mettent en évidence la faiblesse de la production de biens en Algérie. Une réalité qui explique en partie la difficulté de l’Algérie à s’imposer dans le cadre de cet accord tant décrié après cinq ans d’application. En prenant les fameuses décisions pour réduire les importations, à la faveur de la loi de finances complémentaire 2009 et la loi de fiances 2010, le gouvernement Ouyahia a tenté de rectifier le tir, il est parvenu rapidement à réduire les importations. Ainsi une baisse de 1,62% a été constatée en 2009, et une autre plus conséquente de 7,8% au premier trimestre 2010 concernant les importations à partir de l’Europe.
Des baisses qui touchent notamment les biens alimentaires et les véhicules et qui allègent quelque peu la pesante facture des importations algériennes. Un effet positif des mesures qui sont pourtant assimilées à des décisions protectionnistes de la part des Européens qui jugent par exemple la mesure obligeant l’investisseur étranger à céder 51% des parts d’une société à un partenaire algérien, un véritable frein au libre investissement des étrangers en Algérie. Un motif qui a fini par augmenter la crispation des relations autour de cet Accord d’association qui, de toute façon, n’a rien changé ou presque aux relations commerciales entre les deux côtés de la Méditerranée. Exportations d’hydrocarbures d’une part, exportations de biens divers pour les besoins de la consommation et de la production locale, d’autre part, restent une règle immuable.
Les échanges d’accusations – enrobés de langage diplomatique et de formules de politesse – ne changeront pas la réalité des relations déséquilibrées, rendues encore plus complexes par un environnement économique en crise ou chaque Etat cherche à tirer son épingle du jeu et à minimiser les pertes. Même les grands ensembles économiques plus équilibrés, en apparence, se heurtent actuellement à la nouvelle réalité et on y tend à repenser un positionnement plus égoïste. Alors quelles chances dans ces conditions pour un accord plus équilibré avec l’UE où les échanges seront pensés en termes de partage et de complémentarité au lieu d’être jugés sous la lorgnette des intérêts économiques et financiers des plus influents des partenaires ?
Par Zhor Hadjam