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Islamisme et opportunisme

 

Par : Mustapha Hammouche

Au dernier jour du soulèvement d’octobre 1988, alors que la répression avait fait des centaines de victimes, tuées, torturées parmi les jeunes manifestants, les militants islamistes dormants convergent vers le centre d’Alger en tentant de drainer un maximum de jeunes dans leur sillage. Ils viennent de déborder les adolescents sortis crier leur ras-le-bol d’un système de caste, peu soucieux de la condition populaire et dont ils subissent l’injustice dans leur vie quotidienne.
Plus récemment, les révolutions de Tunisie, d’Égypte et de Libye ont révélé ce réflexe caractéristique des islamistes qui consiste à surgir sur le champ de bataille pour détourner un combat que d’autres ont initié et pour lequel ils ont payé.
Le mouvement indépendantiste touareg vient de se faire coiffer au poteau à Tombouctou, à Gao et ailleurs dans l’Azawed par des groupes islamistes qu’il croyait héberger en bonne entente. Et l’objectif nationaliste du MNLA s’est transformé en opération de terreur islamiste avec la finalité d’instaurer la charia au Mali.
Quelle que soit l’obédience, les entreprises politiques à base islamistes cultivent toujours un attentisme tactique. En attendant la faille. Selon les moyens du mouvement, la voie “démocratique”, l’entrisme institutionnel comme la violence terroriste sont employés pour exploiter la chute d’un ordre finissant et pour prendre les devants sur un ordre nouveau.
Et comme le pouvoir constitue la fin et la religion le moyen de toute force islamiste, aucune voie n’est exclue par principe : le crime comme la charité, l’alliance avec le diable comme la guerre entre “frères”.
Cette nature opportuniste leur permet d’exploiter les moments de faiblesse des États, des communautés et des personnes. Comme des charognards, ils sont les premiers à débouler dans un domicile mortuaire. Supposés maîtriser les rites funéraires, l’occasion est trop bonne pour se prévaloir tacitement de cette compétence qui les place en médiateurs entre le défunt et le rite, entre le monde et l’au-delà. C’est l’occasion de marquer l’autorité qui devrait caractériser leur rapport au profane, fut-il savant. Qu’importe, en effet, puisqu’ils ont la compétence ultime. Ils le lui ont déjà fait valoir par la      Fatiha du mariage ; ils le lui rappellent à chaque funeste occasion. Ils sont aussi les premiers arrivés sur un site de catastrophe naturelle : c’est connu, l’activisme caritatif est la première étape du prosélytisme intégriste. On ne convertit facilement que les plus faibles, économiquement ou psychologiquement.
C’est véritablement une disposition particulière de la culture islamiste que d’être là au bon moment, c’est-à-dire au moment où les obstacles à leur hégémonie — l’État, les mouvements politiques et sociaux, les consciences individuelles — sont ébranlés.
Le détournement spectaculaire de l’offensive du MNLA, en même temps qu’il dévoile la naïveté stratégique d’un mouvement pourtant historique, rappelle à quel point l’opportunisme est constitutif de l’islamisme.

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