La rumeur donne mort un homme que la rumeur donnait malade. Finalement, cette rumeur est démentie par une autre rumeur, qui dit qu’il n’y a pas mort d’homme, mais simplement un malaise. Puis la rumeur est officiellement démentie, ni mort ni malade, ni république intégriste ni Etat policier, ce qui a rendu malades les professionnels de l’information et installé un profond malaise. Mais ce n’est pas une rumeur, l’espérance de vie à la naissance est officiellement de 72,9 ans en Algérie, et tout homme de 75 ans aurait officiellement dû mourir il y a 2,1 ans, surtout si c’est un personnage très officiel. De fait, depuis 2010, il faut s’attendre à tout, à des rumeurs, des malaises, des morts subites, des statistiques macabres et peut-être même des coups d’Etat médicaux. D’où la question : quand le Président mourra vraiment, comment l’apprendrons-nous ?
Par une rumeur d’abord, amplifiée puis suivie tardivement d’une confirmation officielle ? Ou sans rumeur mais par une information venant de l’extérieur du pays, de Paris ou de Washington ? Ou encore par une information officielle de la Présidence, donnée une minute après la mort ? Si l’on se pose toutes ces questions, c’est bien que les secrets entourant la santé des illustres mortels sont encore plus secrets que ceux entourant le développement du nucléaire en Algérie. Et qu’au-delà de l’au-delà, toutes les informations sensibles sont des informations sensibles, de même que chaque mort est toujours vivant avant sa mort. Avant de passer à l’APS, puis à la télévision, la rumeur a été officiellement démentie par le porte-parole des Affaires étrangères. On aurait aimé qu’il démente aussi la mort de Tahar Touati, diplomate enlevé à Gao par le Mujao. Mais une rumeur dit que les morts ne sont pas les mêmes, surtout quand ils font l’objet de rumeurs. On attend donc maintenant avec impatience l’infirmation de cette triste rumeur.